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Télé Paris (4) : le service public

Le public dans les émissions de télévision constitue vraiment un élément du décor indispensable à la crédibilité du spectacle proposé. Rien n’est vraiment spontané dans sa composition ou dans son rôle. Tout est soigneusement agencé selon les angles des caméras ou les âges puisque le sport numéro un sur ses plateaux consiste à apparaître à l’écran pour épater les copines, les copains ou la famille. Il faut donc savoir que les consignes sont strictes : se tenir immobile et plus encore répondre aux sollicitations du « chauffeur de salle ».

Il existe en effet des personnes que l’on n’aperçoit jamais mais dont le rôle est essentiel puisqu’ils séquence la participation de l’assistance au déroulement de l’émission. Elles ne disent rien mais donnent le signal des applaudissements, des rires éventuels ou des réactions de satisfaction. Tout doit être positif. D’ailleurs il existe la plupart du temps des « répétitions » avant le début du direct ou de l’enregistrement.

Le choix des participant.e.s est particulièrement serré. Il va donner la tonalité générale et être en adéquation avec les panels des audiences. En général, dans la période actuelle la fameuse ménagère de plus de 50 ans n’est pas la plus recherchée.

La jeunesse, la parité, la diversité deviennent les critères pris en compte parmi les inscriptions. Dans certaines circonstances le repérage constitue d’ailleurs une nécessité surtout sur les plateaux des émissions politiques où un certain nombre de places sont attribuées aux participant.e.s.

Il existe, car j’en ai rencontrés des spécialistes de la figuration télévisée. Ils (elles) s’inscrivent systématiquement dans toutes les émissions où le public est admis. Leur objectif ne consiste pas nécessairement d’apparaître à l’écran mais de figurer sur les clichés pris par les photographes de plateaux. Ces professionnels mitraillent bien évidemment les vedettes présentes mais souvent dans leur objectif on trouve une part des fans sur les travées de l’assistance.

Ils cherchent ensuite chaque semaine dans les journaux, dans les magazines, sur internet les clichés relatifs soit aux émissions, soit aux invité.e.s présents. Personnellement j’ai rencontré des éminent.e ;s spécialistes qui arborent une cahier ou n classeur dans lequel ils stockent les preuves de leur présence à la télévision. Ils inscrivent le titre de l’émission, la date et ils tentent d’obtenir le maximum de coupures avec leur silhouette ou leur visage.

Dans une émission du célèbre Pierre Bonte, spécialiste des traditions, des terroirs et de la France rurale j’avais été invité à présenter mon premier bouquin sur l’histoire du legs Bertal et des Rosières créonnaises (1). Une bien belle aventure ! Lors de l’enregistrement j’ai croisé ce public qui ne vit et ne pense qu’à la télé.

Il s’échangeait les numéros de téléphone des responsables du recrutement de la claque organisée avec des commentaires sur les réussites et les échecs et comparaison des bilans des présences attestées. Il y ajoutait les conditions d’accueil. Buffet poste-émission ou pas ? Petite rémunération avec des petits gadgets ou rien ? Autorisation d’approcher les invité .e.s ou pas pour les autographes ou renvoi immédiat ? Je finissais par me demander quels étaient les éléments principaux des rendez-vous dans les studios.

« Bonjour la France » à laquelle je participais était le pendant pour Pierre Bonte de sa célèbre rubrique d’Europe N°1. Il avait un partenariat différent à cahque émission avec un comité départemental du tourisme qui lui fournissait de larges échantillons des produits du terroir. Ils étaient étalés sur une table afin que les caméras puissent en vanter les mérites. Ce jour-là le département choisi était celui du Jura qui avait généreusement doté la revue des particularismes locaux effectuée par Pierre Bonte.

Tout se passait pour le mieux jusqu’au moment où le clap de fin intervint. Les habitué.e.s savaient en effet que l’habitude était d’abandonner au public les offrandes exposées. Ce fut la ruée et la curée comme si une troupe de barbares s’empara d’un butin précieux. La règle était simple : une seul prise par personne.

Tout fut raflé dans la confusion la plus totale en quelques secondes avant que ne débute un troc permettant d’échanger un peigne en corne contre un saucisson de sanglier, du morbier contre des chaussons ! Effrayant.Cette époque est cependant révolue.

Maintenant les publics se sont quasiment professionnalisés. On les recrute avec des castings impitoyables pour les positions stratégiques et la nécessité de créer une ambiance « sociologique » en conformité avec les volontés de la production. Une technique que la politique a mis en marche et utilise désormais à plein régime quand manquent à l’appel les militant.e.s « ordinaires »… Et ce n’est que le début !

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Cette publication a un commentaire

  1. J.J.

    « Tout fut raflé dans la confusion la plus totale en quelques secondes …. »

    C’est hélas une constante, cet instinct prédateur débridé.quel que soit l’objet excitant la convoitise.
    Et l’on peut voir des personnes, que l’on pourrait croire un peu raffinées, occupant un honorable statut social, se conduire comme des chiens se disputant un os, ou comme si leur vie dépendait de leur prédation.
    J’en ai même parfois vu, qui, prévoyantes, s’étaient munies de divers « contenants » leur permettant d’emporte leur butin.
    Lamentable !

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