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Paris par le menu (2) : deux repaires politiques

Lorsque vous voulez vraiment connaître les petits secrets de la vie publique nationale il faut connaître les restaurants pour le déjeuner et ceux pour dîner où les Députés ont leurs habitudes. Il suffit d’avoir des yeux éveillés et des oreilles grandes ouvertes pour surprendre des rencontres ou des discussions instructives. Il est vraiment difficile de savoir si les personnalités qui s’y installent veulent vraiment garder le secret sur leurs fréquentations. D’ailleurs peu importe puisque tout le monde connaît les règles du jeu : «  je vous le dit ou je vous le montre mais surtout ne le répétez pas ». Ce qui veut dire : «  N’hésitez pas à le répéter sans dire que c’est moi qui vous le dis ».

Aux alentours de l’assemblée nationale le rendez-vous institutionnel n’est autre que la Brasserie « Le Bourbon ». Au café du matin, au repas du midi, les rendez-vous sont nombreux et extrêmement nombreux : on vient rendre compte d’une réunion de groupe, de commissions ou rechercher une oreille attentive. Les duos reflètent des échanges directs parfois à voix basse mais aussi très perceptibles par des voisins attentifs. La cuisine française y est agréable sans être trop sophistiquée mais si on n’y vient ce n’est pas forcément pour la carte.

Pas plus que pour le vue sur l’ Assemblée Nationale et ses immeubles du XVIIIe, entre le Musée d’Orsay et le Musée Rodin, la Maison de la Chimie et l’Esplanade des Invalides. En été ou aux beaux jours la terrasse sur la Place du palais Bourbon est bondée et garantit une meilleure confidentialité.

La Brasserie Le Bourbon s’adapte à toutes les sollicitations et propose deux belles salles au sous-sol pour 10 ou 20 personnes (dont une voûtée) pour les petits-déjeuners individuels de travail, repas de groupes, buffets apéritif en fin de journée. Bref si le palais ne se régale pas toujours on peut échapper en ce lieu aux contraintes protocolaires de la maison d’en face.

Il faut savoir traîner au Bourbon et tel un chasseur à l’affût attendre que les « fauves » viennent à l’abreuvoir. Souvent on se contente du menu fretin des assistants qui n’ayant pas accès seuls au restaurant du dernier étage du 101, rue de l’Université viennent commander l’actualité sans trop de retenue.

Souvent sur la petite place Édouard Herriot adjacente se déroulent des manifestations encadrées par un service d’ordre supérieur au nombre de présents. Les rencontres peuvent y être passionnantes… car elles traduisent toujours des détresse individuelles ou collectives mais elles ne changent rien aux conversations des consommateurs installés à quelques mètres dans le Bourbon.

Chacun a son repaire pour rencontres particulières. Pour bon nombre des habitués de l’Assemblée nationale, l’abri souterrain de « Chez Françoise » garantit une plus grande discrétion. D’abord parce que l’endroit est beaucoup plus discret et confortable. Tout y est fait pour que les sons soient atténués. Les tablées plus rondes, plus serrées permettent des échanges plus larges à l’abri des regards extérieurs. C’est le rendez-vous collectif du partage des décisions collectives.

On y retrouve sous la gare des Invalides une mixité des fonctions avec certes des élu.e.s, mais aussi des hauts fonctionnaires et des décideurs politiques. Tout ce que compte la France comme personnalités est un jour ou l’autre passé dans ces salles douces, aux tonalités chaleureuses et au fonctionnement de l’ancien monde. Tout est millimétré « chez Françoise » et on se sent vraiment dans un univers protecteur qui évite les photos ou les oreilles bien embouchées.

La vie politique hexagonale doit beaucoup à ces deux lieux où se sont noués bien des intrigues et dénoués bien des affaires. Ils appartiennent à l’histoire sans que pour autant on puisse leur attribuer une importance particulière. Le « Bourbon » est portant le numéro un en la matière suivi selon les observateurs du « Divellec », du « Café de l’esplanade » et de la « Rotonde » quand mon goût personnel va plutôt vers « chez Françoise ».

L’habitude française du « déjeuner d’affaires » existe en politique et elle est organisée selon des codes précis. En les connaissant parfaitement on savoure des moments instructifs pouvant faire perdre bien de ses illusions si on en a en allant dans la jungle parisienne.

Ce champ est nécessaire.

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