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Quelques blessures de campagne

Les campagnes des municipales ne sont pas loin s’en faut, les plus paisibles et donnent souvent lieu à des comportements pour le moins dénués de toute aménité. Les querelles personnelles ou les règlements de compte (parfois historiques) occupent en effet bien souvent le devant de la scène. J’ai des souvenirs de ces périodes depuis 1971 date à laquelle j’ai commencé mon engagement citoyen local.

C’était à Sadirac où mes parents, employés municipaux, soutenaient le maire d’alors André Lapaillerie élu depuis 1945. Homme au passé exceptionnel (1) il devait pour la seconde fois affronter une liste concurrente alors que jusqu’à présent dans ce village d’à peine 2000 habitant.e.s sa gestion avait fait l’objet d’un large consensus.

Cette première expérience me laissa des traces douloureuses. Il était en effet particulièrement difficile de critiquer le premier magistrat sortant sur sa vision d’une commune dans laquelle il avait réalisé des équipements largement en avance sur cette époque (2 groupes scolaires neufs, salle des fêtes, Bureau de Postes, stade, douches municipales…) alors la campagne dégénéra en attaques personnelles directes.

André Lapaillerie fut la cible de tracts anonymes dont un le blessa particulièrement. Il était représenté en « pieuvre » avec sur chaque tentacule l’une des fonctions qu’il occupait ! Président de l’amicale des maires, du syndicat d’électricité, du syndicat des eaux… et surtout son métier de banquier. Que répondre ?

Lors d’une réunion publique sur les bancs du restaurant La Renaissance dans le village de Lorient, dans une ambiance surchauffée, mon père avec lequel j’étais, voulut prendre la défense du Maire sortant. Il se leva pour prendre la parole et fut cueilli par « Toi le Rital tu fermes ta gueule et tu sors avant qu’on te sorte ! » C’était terrible. C’était même horrible avec les commentaires sui suivirent. il ressassa cette soirée de campagne électorale durant des années !

L’auteur de cette insulte était sur la liste adverse et il affichait de cette manière la qualité de son projet. La bataille fut ensuite de ce niveau. André Lapaillerie et toute son équipe fut nénamoins élue au premier tour et on ne revit jamais les opposants. Par contre il mourut d’un accident cérébral quelques semaines après sa sixième élection dans le fauteuil de maire.

Les hasards de l’engagement citoyen a fait que par la suite, j’ai eu à participer directement (1983,1989, 1995, 2001, 2008) ou indirectement mais de manière active (1977) aux scrutins créonnais. Toutes ces périodes furent différentes et avec des enjeux politiques forts. Le bon vieux antagonisme « droite-gauche » fut au centre de celles de 77, 83 et 89… L’expression « battre la campagne » avait alors tout son sens avec des dizaines de publications, des réunions publiques tendues et des tentatives de débats contradictoires plus ou moins réussies. Nous avons eu droit aux coups de fusil, aux pamphlets anonymes dont un « Instit’ soit-il … » aux lettres ou aux dénonciations anonymes, aux vrais fâcheries avec des « faux » amis, aux séquences de doute.

Les camps en présence ne se ménagèrent jamais avec cependant des échanges d’argumentations, des mises en cause de réalisations ou de projets, des confrontations de méthodes de gestion. Je relis de temps à autres les dossiers que j’ai constitué avec les publications et je trouve sincèrement qu’ils contiennent des documents artisanaux ou désuets mais avec un vrai contenu.

J’étais seulement un auxiliaire de la vie locale, un militant constructif, un adepte de la pédagogie citoyenne… et j’avoue que ce n’était pas facile. Nous avons gagné à chaque fois dès le premier tour sans trahir nos convictions autour de valeurs fondatrices de l’action municipale (2)

Quand il me revint le rôle de chef de file je n’ai jamais renoncé à convaincre pour vaincre. Je n’ai pas demandé de soutiens particuliers qui d’ailleurs ne m’auraient pas été accordé. En 95 ce sont les circonstances que seuls quelques amis connaissent qui m’ont propulsé sur le devant de la scène.

J’ai toujours conservé en mémoire les campagnes antérieures pour éviter lors de cette échéance les excès constatés ! Aucune attaque personnelle, aucune remise en cause du camp adverse, aucune volonté de dénigrer et à l’arrivée une large victoire au premier tour.

Les circonstances que regretteront bien d’autres ont fait qu’en 2001 et 2008 il n’y eut pas de concurrence. Je l’ai vécu comme une simple reconnaissance d’un climat citoyen apaisé. Et d’ailleurs lors du dernier scrutin où je fus candidat alors que nous étions seuls en lice plus de 75 % des Créonnais.e.s inscrit.e.s (pas des votants) ont fait le déplacement pour soutenir la liste avec un bulletin de vote en connaissant parfaitement mon engagement politique. C’était une autre époque direz-vous. Je veux bien en convenir.

  1. je lui au consacré une série de chroniques de ce blog
  2. Elles sont résumé dans mon livre sur le partage du pouvoir local Editions Le Bord de l’Eau
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Cette publication a un commentaire

  1. faconjf

    Bonjour,
    Ah! les belles campagnes électorales d’hier et avant-hier, ses beaux souvenirs d’insultes en face à face avec ses chasseurs envinassés qui vous menacent. Ces vieux paysans manipulés qui viennent vous cracher au visage un bon vieux mollard vert bien préparé. Les pneus crevés, les corbeaux avec leurs lettres anonymes et les rumeurs insidieuses qui roulent sous vos pas. Rien que des bons souvenirs à raconter.
    Aujourd’hui, tout se fait sur les réseaux sociaux et la violence y est aussi palpable, visqueuse, collante et puante. Vox populi reprend en chœur, des bancs de l’église jusqu’au café du commerce, les rumeurs de constructions de mosquées et autres fariboles faisandées sur la toile. Et dès lors les démentis se transforment miraculeusement en aveux ou en caisse de résonance amplificatrice.
    Pendant les campagnes, d’hier et d’aujourd’hui, la haine est présente. Mais elle renforce les liens entre les colistiers car elle produit immanquablement des amitiés solides car trempées par les épreuves.
    Salutations républicaines

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