La sensation indéfinissable d’abandon pèse sur le milieu rural et commence à gagner des zones rurbaines du territoire national. Il tient à un phénomène de plus en plus puissant fondé sur la déliquescence du lien social fondateur du vivre ensemble. La trame essentielle, celle des services publics qui se sont d’abord éloignés puis raréfiés n’existe plus dans de nombreux villages. Les écoles publiques creusets essentiels de la République offrant à tous des années de vie commune sur un territoire identifié ont par exemple progressivement disparu à cause du vieillissement du peuple des campagnes ou de son départ vers de nouveaux horizons. Elles ne sont jamais revenues par la suite même si le nombre d’enfants pouvaient le justifier. On n’a que très rarement rouvert d’écoles fermées dans la seconde moitié du XX° siècle !
D’abord parce que les fameuses « classes uniques » ou celles « à cours multiples » ont été présentées comme des lieux dans lesquels les apprentissages étaient moins bons que celles des villes réputées homogènes car à niveau unique. Souvent les parents ont fait déserter leur propre établissement communal à leurs progénitures pour les conduire dans celui du chef-lieu de canton. Ensuite il y a eu un manque d’enthousiasme pour ces écoles des enseignants ayant le choix de leur affectation. Le « rural » a précédé dans cette désaffection les « banlieues »… et le résultat a été le même ! Enfin il faut bien reconnaître que les « normes » éducatives ont été bouleversées au fil des ans désavantageant grandement les petites unités pédagogiques. Le résultat ne s’est pas fait attendre avec une disparition inexorable de la vie locale : associations de parents d’élèves, amicale laïque, clubs sportifs périscolaires… Les manifestations autour des écoles constituaient des moments privilégiés d’échanges qui atténuaient l’isolement. Le mal est fait !
Les autres services qui permettaient l’échange comme La Poste ont été à leur tour abandonnés par les populations elles-mêmes puisque de nouvelles habitudes (circulation d’argent liquide porté par les facteurs, mandats, lettres moins nombreuses…) ont détourné les flux de clientèle. Là aussi le départ a été plus ou moins rapide grâce souvent à l’intervention des communes qui tenaient à maintenir un espace d’accueil avec des « créneaux horaires » toujours en décalage avec les nouvelles populations ou calqués sur les fréquentations constatées. Souvent La Poste a résisté quand sont partis faute de client(e)s venant dans le bourg ou privilégiant les achats massifs hebdomadaires en grande surface, le boulanger, le boucher, les commerces de proximité…
Désormais une nouvelle donne est annoncée avec l’arrivée du haut débit puisqu’en Gironde les acquisitions via internet approchent dans certaines zones rurales non encore vraiment équipées plus de 10 % avec des pointes à 12 %. Les livraisons rapides et parfois gratuites font disparaître cet éloignement géographique mais condamnent chaque jour davantage certains secteurs d’activité comme les vêtements, les chaussures, la quincaillerie et même parfois la nourriture. Surtout il renforce l’absence de contacts et d’ouverture sur les autres ! Le mouvement pendulaire domicile-travail n’améliore absolument pas la situation. Il arrive que des nouveaux habitants passent une année voire plusieurs années sans aller dans un lieu collectif de leur commune qui n’a plus d’école, une salle des fêtes rarement animée, une maigre bibliothèque ou de services médicaux. Tout de ce qui débute par… « télé » ne brisera pas de manière décisive le sentiment d’abandon qui gagne sans cesse davantage d’esprits.
Deux études déjà anciennes en attestent. La première s’est penchée sur les résultats du FN dans le monde rural lors des dernières élections européennes et elle est probablement très éloignée de ce qui nous attend dans un proche avenir. Plus le nombre de services et de commerces est conséquent plus le score du Front national est bas. Le vote FN dépasse les 30% dans les villages de moins de 500 habitants lorsqu’il n’y a rien, et tombe à 23,5% lorsque l’on y trouve au moins six commerces ou services de base. Ensuite, parmi les neuf commerces et les services étudiées, c’est effectivement la présence ou non d’un bureau de poste qui semble jouer le plus surtout quand il n’y a pas du tout de guichet « humain ». Les communes du canton de Créon qui n’ont plus d’école, plus de Poste, plus de boulangerie, situé loin des réseaux de transports collectifs sont nettement plus sensibles au FN que celles qui en ont. Et ce n’est que le début !
Chaque jour en effet les décisions venues de Paris détruisent davantage, au nom des nécessités de gestion ce qu’il reste de cet équilibre très fragile. De nouvelles formes de paupérisation matérielle, surtout culturelle (dont on en parle jamais!), sociale se renforcent malgré les apparences des « nouveaux» venus souvent accédant aux maisons individuelles de leurs rêves sur ces territoires souvent déjà déshérités. Et comme le choix effectué par le gouvernement est tourné vers les zones les plus peuplées et les plus porteuses pour la croissance le FN a de beaux jours devant lui dans les campagnes !
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Terrible constat en effet ! Les services publics ont déserté nos campagnes. Les pompiers circulent dans tous les sens, professionnels, volontaires et maintenant drones pour surveiller les reprises de feux. Ces hommes et femmes ne font que se soumettre aux décisions prises par des cerveaux puissants, dont il ne faut surtout pas contester le bien fondé. On regroupe tout et n’importe quoi et nous assistons à des collèges à moitié pleins, à des enseignants qui viennent d’ailleurs et qu’il est difficile de remplacer en cas de maladie, à des infrastructures qu’il faudra rembourser. la population vieillit, les visites médicales nous obligent à faire 45 kms, le prix du carburant s’envole, nos poches sont régulièrement faites et de quelle façon. Qui s’en soucie ? Certainement pas Jupiter que d’aucuns fêtent son premier anniversaire. Moi, je ne lui dit merci, il nous pourrit la vie !
Est-ce que ce ne serait pas des gens du FN qui auraient chassé le boulanger de leur village parce qu’ il était migrant (à l’ époque, sans pudeur,on disait étranger) dans le sketch de Fernand Raynaud? Le problème n’ est pas nouveau mais effectivement il s’ aggrave. D’ abord parce que la perception médiatique dans des zones rurales isolées fait que certains s’ imaginent que dans nos villes on baigne dans l’ insécurité. Au point que certains ne veulent pas me croire quand je leur dit que je ne côtoie aucun danger. Intoxication. Autre problème, la montée « démocratique » au pouvoir de partisans de l’ extrême-droite dure dans bien des pays, ce qui lui confère une honorabilité désastreuse. Plus besoin de cacher ses penchants pour le néonazisme, c’ est homologué… Quand j’ étais gosse, ça existait mais au moins on pouvait leur mettre la main sur la g…sans se retrouver au tribunal.
De la part des élus locaux d’un ancrage géographique elargie, il aurait été convenable que les élus réclament le besoin de ces services publics.
Reveillez vous nous a dit le PCF, drôle de communication !
LAVIGNE Maria : appeler Jupiter le valet des banques qui met à sac notre pays et ne sent plus gonfler ses chevilles, c’es injurieux pour le dieu des dieux de l’Olympe ; comme on dit vulgairement, « ça me mâche ».
Je le vois plutôt, ce nuisible Jupiter d’opérette, dans le rôle grotesque qu’il tient dans l’Orphée aux Enfers, de Jacques Offenbach et Meillac et Halévy.
Ce phénomène de désertification ne se cantonne pas aux zones rurales : déjà des villes moyennes se voient privées de trains depuis la mise en service de la LGV et le phénomène va s’amplifiant.
Une autre nouvelle inquiétante : le projet de suppression des académies de Poitiers et Limoges, au bénéfice de Bordeaux, capitale du monstre « Nouvelle Aquitaine ».
Le projet étant annoncé, c’est comme si c’était fait…
D’abord on fait plaisir aux grands élus après c’est un système parmi tant d’autres. D’abord les grandes régions avec les habitants qui vont avec. Ah les capitales regionales avec leur transport, c’est pas n’importe quoi ?