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HISTOIRES D’ÉTÉ : on se retrouve tous sur le sable

En été il n’est pas certain que le nombre de gens qui se retrouvent sur le sable soient forcément pauvres. D’ailleurs beaucoup d’entre eux espèrent bien avoir de l’or sur la peau ou au minimum un peu de bronze afin de faire remonter leur côte auprès de celles et ceux qui sont attachés aux apparences. Ils aiment avoir des plages de silence pour celles et ceux qui souhaitent se défouler alors que d’autres veulent absolument être à la plage pour vérifier qu’ils peuvent espérer encore faire un roman de leur vie. Certains vont bâtir des châteaux en Espagne afin de se persuader qu’ils peuvent encore travestir leur quotidien en s’inventant une vie nouvelle loin de tout. D’autres se contentent de prendre la pelle, le seau et le sable pour justement construire ou améliorer leurs réalités quotidiennes. Ce sont deux visions des vacances estivales qui se télescopent au moment où s’écoule le sablier trop rapide des congés.
De plus en plus de gens consacrent en effet leurs congés à tout autre chose que le farniente dans une crique, sur une grève ou une dune. Ils bossent dur afin de terminer une petite maison pas nécessairement dans la prairie, construire ce qu’il considère comme essentiel à leur qualité de vie : l’été reste celui des « auto-entrepeneurs-bricoleurs ». Cette année entend-on pas de vacances et la seule sortie réside dans des escapades matinales dans des grandes surfaces de matériaux. Souvent ce ne sont pas eux qui vont au sable mais le sable qui vient à eux…pour ce qui ne sera surtout pas une sinécure.
La terrasse, la piscine, la véranda, le barbecue : l’homme moderne très souvent aidé par son épouse s’érige en bâtisseur estival des lieux nécessaires pour prendre un bonheur estival ultérieur. Il ne conçoit ses congés qu’avec une création utilitaire familiale comme s’ il fallait à tout prix avoir dans l’avenir tout sur place pour ne plus jamais partir en vacances ! Parfois ces stakhanovistes du « fait maison » finissent leur période de repos beaucoup plus fatigués qu’au moment où ils l’ont entamée. Ils rentreront avec des photos sur leur mobile d’une réalisation qu’il présenteront avec la fierté légitime d’en être l’auteur quand d’autres arboreront les cocotiers ou les palmiers, le mojito incomparable, la truite gigantesque, le chemin montagnard ou plus simplement les « petits » sur la plage ou sautant dans la piscine. Il existent bel et bien des besogneux estivaux, des adeptes du sable utile. Toutes les statistiques le prouvent : le bricolage intensif devient le premier sport de l’été et juillet-août sont de bons mois pour les chiffres d’affaires des « Brico quelque chose ». Ces laborieux de la truelle, ces terrassiers besogneux n’imaginent pas un seul instant que leurs vacances soient construites sur du sable. Eux s’ils partent, c’est « seulement quelques jours et quand tout est fini !»
Par contre pour beaucoup il faut absolument être à la plage. C’est à dire s’installer sur une serviette réputée éponge pour se dorer la pilule au soleil en tapotant sur un écran de téléphone le casque sur les oreilles. Le sable devient alors un support aux rêves les plus fous : une vie remplie de ce plaisir indicible de n’avoir à rien faire loin de tout quand toutes et tous s’agiteraient autour de vous. Le sable doux, léger, ambré ou parfois noir sur lequel on s’étend devient alors le symbole d’une certaine forme de réussite que l’on ne respecte pas nécessairement. Il faut désormais nettoyer, laver, ratisser, désinfecter le sable afin qu’il soit digne de recevoir des centaines de milliers de fesses plus ou moins dénudées ou de cuisses propres ! En fait le plus pur, le plus sain, le plus fin reste celui des déserts là où justement ils est le plus dangereux !
Une plage « blanche » dénuée de toute trace de souillures du passage du vacancier devient désormais le nirvana de celles et ceux qui voudraient jouer à Robinson sur une île avec des étoiles du confort optimum. Il paraît que ça n’existe que pour les milliardaires stressés par la simple idée que leur or virtuel déposé dans une banque quelque part au soleil des caraïbes ne se transforme pas en sable sous les effets nocifs de quelque tours de passe-passe financiers. On vous les promet sur les plages jamais glacées mais surchauffées des catalogues des agences de voyage avec des tarifs à tuer justement ceux qui mettent leurs congés payés dans la construction d’un abri de jardin ! Là-bas tout est beau : la plage s’étire sur des hectomètres , l’eau se veut turquoise, les pelouses ou les arbres s’affichent d’un étonnant vert pomme, les hébergements ressemblent à la maison en paille des petits cochons… Et surtout il n’y a jamais personne sur les clichés afin que vous ayez le sentiment que vous serez un privilégié et que vous aurez le sable pour vous seul ! Attention pour que vous n’ayez pas justement de contact avec ce sable qui envahit parfois votre intimité, il existe… aussi dans ces paradis artificiels une piscine vous permettant de ne jamais y poser le pied dessus ! Si vraiment vous osez aventurer votre corps de rêve sur la plage sachez qu’il existe désormais la « Bross’Playa » nec plus ultra pour adeptes maniaques de la propreté corporelle. Ronde comme le soleil, douce comme la soie cette brosse branchée vous permet de vous débarrasser de ces grains (de sable) qui ne font pas de vous une beauté ! Chassez le naturel… il s’enfuit au galop !
Jean-Marie Darmian

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