Quelle est la réputation mondiale de la France pour les diplômés ? Simplement un constat vu de l’étranger : on y fait ses études car elles ne coûtent pas chers et on y revient pour passer sa retraite car l’immobilier dans certaines régions est abordable…et on peut y apprécier alors la qualité de vie. Entre les deux si on veut aborder la vie professionnelle avec une meilleure rémunération et des conditions acceptables on va tenter d’aller travailler à l’étranger. On appelle cette propension à l’émigration volontaire, la « fuite des cerveaux » de manière simpliste car cette formule supposerait que seuls les gens de très haut niveau vont s’installer au-delà des frontières. En fait le « niveau » des partants faiblit et la recherche d’un avenir plus prometteur touche désormais les technicien(ne)s supérieurs ou des spécialistes de la santé ou des nouvelles technologies. Les diplômés français sont de plus en plus nombreux à partir à l’étranger pour débuter leur carrière ou parfois s’installer dans une autre société après avoir « appris » en France. Il faut admettre que leur avenir immédiat n’est parfois guère rassurant.
Une étude du Conseil d’analyse économique (CAE) vient confirmer cette tendance au départ vers des horizons plus souriants d’une part des jeunes. Formés avec les deniers publics ils quittent leur pays avant souvent d’y revenir pour y bénéficier des deniers publics sous la forme de l’aide à nouveau publique aux personnes âgées ! Actuellement, on estime à trois millions le nombre de personnes nées en France résidant à l’étranger. Le phénomène est en augmentation constante mais il est compensé par la venue chez nous d’étrangers qualifiés ou les retours des « émigrés » après de périodes de travail qualifié sur des sols parfois lointains.
Nous ne cessons de nous lamenter sur notre système éducatif qui ne produirait pas des gens susceptibles d’entrer avec efficacité et compétence dans la vie active. Il manquerait toujours la fameuse expérience qu’il faudrait avoir pour être « rentable ». Or en recrutant des jeunes issus des lycées, des écoles spécialisées, des IUT, des facs ou des grandes écoles techniques les entreprises, les centres de recherche, les universités étrangers reconnaissent de fait… la qualité de notre formation initiale ! Ils osent le débutant s’il s’avère capable d’être efficace et audacieux ! Cette propension à l’exil volontaire des « cerveaux » ou des « bras qualifiés » offre néanmoins quelques avantages : améliorer les échanges commerciaux, intellectuels et culturels, surtout quand il s’agit de la sphère francophone. Ces expatriés revenus parfois chez eux apportent des savoir-faire et une expérience à l’international très bénéfique pour l’économie française. Enfin quand ils rentrent car beaucoup ne reviennent que pour les vacances. Et encore !
La frilosité du secteur économique, la diminution des crédits dévolus à la recherche, la raréfaction des investissements « recherche » des entreprises et surtout une fâcheuse à refuser de donner une juste rémunération aux diplômés débutants font que ces derniers vont tenter leur chance dans des pays plus ouverts à la création, à l’initiative et à de justes salaires. Et finalement il devient improbable que la France récupère un jour les sommes investies dans l’éducation et la formation des partants ! Depuis des années en revanche la France attirait des « qualifiés » entrants francophones ou ayant envie de le devenir ! Sauf que la circulaire Guéant – datant du 31 mars 2011 et abrogée par le gouvernement Ayrault en 2012 – a eu des effets très contre-productifs en réduisant par la restriction sur les visas, les arrivées de « cerveaux » sur le sol français. En refusant systématiquement aux étudiants étrangers de pouvoir travailler après leurs études chez nous le gouvernement Fillon avait porté un coup d’arrêt à cette immigration « rentable ». On en paye encore les conséquences. Le mythe de l’attractivité de la vie à la Française n’a plus cours et on observe une diminution de la mobilité des qualifiés entrants par rapport aux sortants ce qui va à terme détériorer les équilibres positifs antérieurs.
On apprend chaque jour que des starts-up créées par des jeunes français se sont installées aux Etats-Unis car elles peuvent y trouver des investisseurs avides de « pépites » pour l’avenir… En France les inventeurs, les entreprenants, les initiateurs savent que l’accès aux investisseurs leur est très difficile voire même impossible. La matière grise s’évapore donc malgré des « incubateurs », des « pépinières », des « clusters » et je ne sais quoi encore dont on sait qu’ils sont réservés à des structures naissantes en fait déjà bien installées. Arrivés au moment du choix, comme le veut une constante sociale historique, « l’herbe est meilleure ailleurs » et certain(e)s n’hésitent pas à franchir les frontières pour s’y ébattre avec délectation. Attention ce ne sont pas que des « cerveaux » mais malheureusement des « acteurs », des « exécutants » de valeur.
Il ne s’agit pourtant pas de laisser accroire que l’avenir appartient à l’expatriation. Loin s’en faut. La « protection » sociale française, les systèmes éducatifs et de santé restent encore pour quelques temps des atouts enviables par rapport à ceux d’autres pays. La liberté que l’on peut trouver ailleurs se paye parfois cher au moment des bilans car elle suppose une vraie capacité à gérer personnellement sa vie. Et ça rien n’y prépare la jeunesse française !
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Cher monsieur Darmian,
Ce phénomène n’est pas récent, vous n’êtes pas sans savoir, et comme vous c’est un réel crève coeur.
Que faire? À commencer par la politique: laisser de la place aux jeunes hommes et aux jeunes femmes. A mes yeux la première des réformes, au risque de vous froisser…… combien sont ils octogénaire ou proche à être aux décisions.
Ils ou elles revendiquent leur expérience sauf que celle ci étouffe les jeunes, sans évoquer leur esprit rétrograde et passéiste.
Mon passage récent au Québec m’a révolté encore plus…….
Et si un gouvernement le courage a réduire le nombre de mandats successifs. Pour moi je ne suis pas hors sujet les jeunes en FRANCE auraient de l’avenir et leur destin en main. Donc une marge d’espoir.