Tous les magazines tentent de draguer le lectorat de vacances à travers des accroches exclusivement liées aux régimes estivaux. Il est en effet indispensable de se priver durant ces mois pour afficher à la fois une mine bronzée et une ligne haricot vert lors du retour parmi le monde des obèses blêmes un tantinet demeurés (chez eux ou au boulot!). Le seul problème c’est que selon où l’on se rend pendant l’été les difficultés s’amoncellent pour celle et celui qui ne sait pas résister à la tentation culinaire.
Comment séjourner en Aquitaine sans se payer une tranche de foie gras ou en matière d’entrecôte s’en griller une en cachette ? Comment résister à fréquenter le gratin dauphinois ? Doit-on renoncer à se payer une bouillabaisse ? Peut-on éviter de « papiller » dans le choucroute ? Est-il humainement possible de ne pas fréquenter les jambons surtout de Bayonne ou de s’acoquiner avec de grandes saucisses même pas de Francfort ? Si vous ne mettez pas les gaz vers un cassoulet c’est que vous appartenez à la caste des fayots de la diététique ! Qui n’a pas imaginé se faire « tripoutouiller » en Aveyron ou se passer d’une andouillette ? Avez-vous vraiment refusé d’avoir la frite à la graisse d’oie ? Acceptez-vous de prendre une tarte ou de recevoir une crêpe ? Bref le bon gras, naturel, parfaitement assaisonné appartient aux joies de l’été… quitte à ce qu’ensuite une salade verte, deux rondelles de tomate et une rondelle de féta sans assaisonnement rattrape la faute impardonnable au retour vers le monde aseptisé. L’été de tous les dangers est celui de la gastronomie d’antan. La cuisine moléculaire n’entre pas dans les programmes estivaux des gens qui savent que la vie ne souffre pas la maigreur des esprits et des cœurs.
Pourtant quand on écoute les narrations ensoleillées des revenants d’un paradis perdu on apprend vite combien les nourritures terrestres comptent dans l’appréciation sur les vacances . « Tu sais Chloé il y avait un buffet super. On pouvait y revenir tant qu’on voulait ! C’était copieux et frais ! » explique l’adepte du club ou de la demi-pension hors des frontières ! « On a trouvé une auberge je te dis pas… On n’est même pas arrivé à finir le menu ! » explique les excessifs repentis. « On est allé à la ferme et on ramène des conserves maison et du vin du producteur ! On vous invitera à les goûter ! » ajoute celle ou celui qui est entré en campagne… Bref tout le monde parle de bouffe alors que la majorité était certaine de ne pas s’y intéresser. Le gras double le plaisir tant que l’on n’a pas pris connaissance de l’étude qui va culpabiliser tous les amateurs lucides de bonne chère. Heureusement qu’elle a été réalisée sur des rats car elle permet de relativiser ses résultats. A-t-on vu un rongeur se délecter d’un cote de bœuf à la moelle ou apprécier un maroilles crémeux comme un bougre ?
Les résultats publiés dans la revue « Neuropsychopharmacology » montrent qu' »indépendamment de la prise de poids et de l’obésité, une alimentation riche en matières grasses peut en effet provoquer des déficiences dans le fonctionnement des circuits du cerveau directement impliqué dans les troubles de l’humeur, la motivation, la toxicomanie, la suralimentation ainsi que dans l’hedonia, qui caractérise un état mental de bien-être. Les effets d’une alimentation riche en gras sur la diminution de la sensibilité du système de récompense du cerveau sont spécifiques aux graisses saturées comme l’huile de palme. C’est donc avéré et cet été préférez la graisse de canard ou celle d’oie pour votre confit ou vos repas… Le reste est nocif !
Pour parvenir à ces résultats, les chercheurs ont travaillé avec trois groupes de rats. Le premier, le groupe de contrôle, a été soumis à un régime pauvre en graisses. Le deuxième groupe a reçu une alimentation riche en acides gras mono-insaturés, dont 50% des calories provenaient de graisses issues de l’huile d’olive. Le troisième, enfin, a reçu une alimentation riche en graisses saturées dont 50% des calories provenaient de dérivés d’huile de palme. Les rats étaient libres de manger la quantité qu’ils désiraient ce qui bien évidemment fausse la comparaison avec le touriste qui lui sait se limiter (du moins on peut le penser!).
Au bout de huit semaines au retour chez eux après ces vacances débridées ils ont subi une série de tests biochimiques et comportementaux, significatifs du fonctionnement de la dopamine chez le rat. L’étude établit que les rats qui avaient eu le régime à base d’huile de palme avaient une fonction de la dopamine émoussée comme des vacanciers revenant frustrés de s’être privés de tout ! Cette étude est la première du genre à montrer que, indépendamment des changements de poids, la surconsommation de graisses peut avoir une action directe dans le cerveau. Heureusement les tests n’ont été effectués que sur des rats en vacances car autrement méfiez-vous votre été serait bien triste si par hasard vous aviez l’intention d’en tenir compte !
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Entre une alimentation 100 0/0 gras saturé et un régime d’anachorète, il ya peut-être un juste milieu ? « Virtus un medio stat », comme disaient les anciens, Epicure, par exemple dont je suis un adepte.
Contrairement à ce que voudraient nous faire croire les Tartuffe de tout bord, pour qui le plaisir (des autres) est un péché, la doctrine d’Epicure ne prône pas une vie d’orgies débridées. Au contraire, c’est jouir de l’existence avec « tact et mesure ». « Cueille le jour « qui est fait de petits plaisirs.
J’apprécie d’autant plus mon 1/2 verre de vin, que je ne le bois que rarement et que j’en découvre les qualités bien mieux que lorsqu’il était quotidien. Il en va de même de ma cigarette ou de ma coupe de glace du dimanche.
Ainsi je n’ai pas besoin de surveiller ma ligne, ni haricot vert, ni bibendum, ni me faire du souci pour mon taux de cholestérol, à moins que celui-ci soit indépendant de mon alimentation, comme il arrive parfois malheureusement.
Les rat étaient-ils anglo-saxons, grecs, périgourdins ou hollandais, haut-landais ?
Car tous n’ont pas les mêmes habitudes alimentaires…
Mais nous savions que l’huile de palme c’est pas royal !
Bonnes vacances culinaires à toutes et tous.