Réduction des dotations… augmentation du chômage !

En politique quand on tente de faire le grand écart le risque est très grand de finir avec un claquage aux adducteurs de droite et de gauche. C’est une réalité que le gouvernement n’a toujours pas comprise alors que tous les symptômes de la déchirure profonde sont patents. Il faut reconnaître une certaine lucidité à Manuel Valls quand il annonce la « mort de la Gauche » mais, si je partage son diagnostic, je ne partage pas les analyses qui sont les siennes. Pour le chantre du modernisme gouvernemental cette disparition programmée repose sur le refus par une majorité de militants de soutenir sa politique présentée comme inexorable pour le sauvetage du pays ! Je pense plutôt que la gauche risque de disparaître car elle n’est plus novatrice, lieu de débats réels, recroquevillée sur de fausses certitudes technocratiques, incapable de se tourner vers les préoccupations très diversifiées des gens, tétanisée par le monde du profit et surtout persuadée que son échec n’est dû qu’à une mauvaise communication, que les choix effectués ne sont pour rien dans le marasme actuel. En fait on a véritablement l’impression que sur la passerelle du navire battant pavillon socialiste on navigue dans les écueils au sondage sans véritable carte et même sans boussole.

Prenons un exemple concret. La priorité des priorités serait celle de l’emploi avec l’espoir qu’en 2016 la courbe du chômage, quelques mois avant les présidentielles soit durablement inversée. Toutes les mesures prises (mal assurées car très artificielles) visent à obtenir ce résultat réputé être le seul susceptible de redonner de son lustre au socialisme hollandais. On va d’exonération en exonération, de soutien en soutien, de dérégulation en dérégulation, de déclaration d’intention en déclaration d’intention, de prévision de croissance en prévision de croissance sans avoir la moindre certitude sur le résultat. C’est un mélange de discours incantatoires et de pieuses résolutions sous l’œil goguenard de Bruxelles. Une partie de cette Gauche que ne veut pas voir Valls n’arrive absolument pas à inverser les options présentées comme les seules possibles, car son discours reste trop abscons. En fait il suffirait de rappeler deux principes clés de la sauvegarde de l’emploi : on n’embauche que quand on a des clients ayant recours à votre activité et on ne peut pas se développer quand il n’y a plus d’investisseurs. Or tout est fait dans le contexte actuel pour s’écarter de ces éléments clés pour un nouveau départ économique.

En 2016 la situation s’aggravera au lieu de s’améliorer. Quand on examine les récentes décisions prises sur la réforme territoriale (indispensable et que je ne refus pas!) on peut sans être un grand devin prévoir un effondrement dramatique de l’investissement public. Les 27 milliards de réduction des subsides de l’État pour le bloc communal, les départements et les régions va en effet précipiter vers une violent cure d’austérité les programmes de construction et d’aménagement. D’abord parce que faute d’autofinancement suffisant il ne se leur sera plus possible de donner du travail à des milliers de personnes dans les secteur du BTP. Moins de chantiers, moins de flux commerciaux, moins d’emplois, moins de cotisations sociales, moins rentrées fiscales et donc au bout un marasme garanti.

Pour 2015 on s’en tirera tant bien que mal en revanche dès 2016 et en 2017 la réduction des dotations aura des conséquences dramatiques pour l’emploi. Ainsi les communes verront leur taux d’épargne passer de 16,5 % à… 10,8 % ce qui les obligera (si elles souhaitent le maintenir pour investir) à augmenter chaque facette de la fiscalité locale en 2016 de 16,5 % et à réduire leurs dépenses de fonctionnement de 7,7 %. Pour les départements le taux d’épargne ne pourra être maintenu qu’avec une réduction du fonctionnement de… 19,3 % (pour les dépenses non obligatoires dont les subventions) et d’augmenter le foncier bâti de… 34,3 % (ou de 25 % pour 70 % des conseils généraux). Résultat une capacité de remboursement des dettes qui passera de 4 ans à 8,2 ans ! C’est l’asphyxie garantie. Il est certain que les conseils généraux n’ont plus aucune marge de manœuvre et que les prévisions en matière de collèges, d’infrastructures, de soutien aux communes, de participation à la vie associative dis^paraissent dès 2016 du paysage ce qui va renforcer la fragilisation des communes.

Il faut m’expliquer ce que la réforme fera économiser…Il va falloir des trésors d’imagination à Pôle emploi pour masquer une déferlante de chômeurs (fin des chantiers LGV, pas de lancement des travaux pour les transports en site propre, plus d’investissements en matière d’eau et d’assainissement, disparition des subventions associatives…) venant de la stagnation des constructions et du désengagement des collectivités. Les banques plutôt que de prêter au milieu économique et de payer la BCE pour placer leur fric (intérêts négatifs) se précipitent vers les communes ou les départements pour placer leurs fonds qu’elles ne veulent pas injecter dans l’économie réelle jugée encore plus fragile à terme. Elles savent qu’elles seront obligées de s’endetter pour faire face aux besoins et que si les impôts nationaux baissent à la marge, les élus locaux seront bien contraints d’assumer des hausses inimaginables de leur fiscalité ! Encore une fois c’est probable que la Gauche soit condamnée à des jours sombres !

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Cette publication a un commentaire

  1. FOURNY

    je partage totalement cette analyse elle se base sur le débat fondamental qui secoue le parti socialiste, la gauche et même notre pays au delà de la grave décision technocratique de saigner les collectivités territoriales, qui est la continuité d’une pratique déjà commencée il y a plusieurs années.
    Aujourd’hui, c’est un débat économique qui s’offre à nous et le gouvernement a tranché, ce sera la politique de l’offre.
    cette politique est bien loin des politiques traditionnelles de la gauche car on peut s’interroger si elle est de gauche, car pour moi être de gauche c’est la politique de la redistribution, du revenu secondaire, pas d’offrir le plus de biens ou de services au moindre coût, car cette politique de l’offre profite en premier lieu à ceux qui ont les moyens donc par définition les plus aisés les plus riches.
    hormis que la politique actuelle fiscale et économique impacte plus les catégories défavorisées à titre d’exemple la TVA est la même que vous soyez riche ou pauvre, pourtant l’orientation est de réduire la fiscalité visible en diminuant l’impôt sur le revenu.
    l’impôt de nos jours est de plus en plus mal accepté car son augmentation semble le corolaire d’une diminution de l’action publique, une dégradation perceptible des services publics. Nous n’avons jamais payé autant d’impôts, mais nous n’avons jamais été autant endettés avec des services publics qui fondent comme neige au soleil.
    C’est pour cela que je crois qu’il faut rétablir le lien entre l’impôt et l’action publique concrète que nous ayons l’impression que ce que nous payons nous servent directement et pas au versement d’intérêts ou de soutien aux banques.
    il faut plutôt que de faire des mesurettes de réduction d’impôt sur le revenu montrer ce qu’est l’action publique avec une politique keynesienne de grands travaux, notre pays s’enrichirait de grandes infrastructures, de modernisation par exemple de ses ressources en énergie etc et que voit on? des effets d’annonce jamais suivi d’effet!
    Parfois je me demande si l’Etat et ses technocrates ne cherchent pas à punir les collectivités locales qui ont su depuis maintenant une génération malgré le grand nombre de coups bas portés chaque année lors des lois de finances et à travers tous les transferts merdeux (les dépenses notamment sociales dont Bercy sait qu’elles vont exploser), démontrer leur efficacité au service quotidien de nos concitoyens.

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