Les Etats-Unis d’Amérique, leaders économiques, politiques, militaires, culturels dans le monde a construit sa place grâce à un habitant sur trois ayant une origine étrangère de la première ou seconde génération de l’immigration. Ce pays où l’on a prétendu durant des décennies que n’importe qui, pourvu qu’il ait du talent et de l’énergie pouvait faire fortune tourne le dos à sa légende. On s’y évertue à dominer le monde grâce à une monnaie étalon surévaluée et à l’imposition massive d’un système de pensée (ultra libéralisme) et le déferlement d’une emprise financière et économique. Cette supériorité feinte ou ouverte est omniprésente sur le territoire US. Elle se manifeste par la présence massive devant les maisons, devant les commerces, devant les édifices publics du drapeau comme symbole d’une affirmation d’appartenance à une nation forte. Partout ou presque depuis quelques années certaines classes sociales affichent ostensiblement leur soutien aux règles de vie de ces USA pourtant tellement divers. En franchissant une frontière terrestre (on n’a pas le même sentiment dans un aéroport) on vérifie, si on est étranger que désormais on ne met pas le pied aisément sur le territoire des USA. Il n’y a absolument pas que des visées sécuritaires dans un processus administratif long et stressant. On cherche d’une manière systématique à placer l’arrivant en position de demandeur fragile et de démontrer ainsi la main mise de l’Oncle Sam sur le reste du monde. Personne n’échappe à ce qui relève du fichage systématique.
La saisie des passeports dès l’arrivée sur le poste frontière participe à cette fragilisation du demandeur de visa. Il lui faudra être patient pour moyennant 6 $ obtenir la fameuse « carte verte » constituant un sésame indispensable pour la suite du voyage. Stationnement de l’automobile et entrée dans le bureau de l’immigration au milieu de dizaines de personnes anxieuses : les étapes suivantes rassemblent sous l’œil des policiers aux frontières une mosaïque de nationalités plus « à risques » les unes que les autres. L’attente débute. A l’appel de son nom il faut aller d’abord remplir la fiche verte espérée avec les fameuses questions relatives au «port d’armes » ou au « terrorisme ». Après de longues minutes d’attente nouvel appel devant un officier du « US borders and customs protection ». Questions anodines mais néanmoins ciblées selon l’origine du passeport… et un fichage en règle. Quatre doigts de chaque main puis chaque pouce en réserve et une photo vite faite qui entrent dans les archives de la NSA ! Terminé ou presque après une bonne heure de patience. Le bout de « carte » verte détaché de l’imprimé plus grand est agrafé à une page de votre passeport qui a été soigneusement enregistré. Un tampon et l’affaire est faite : il est permis de reprendre la route vers les grands espace américains.
Impossible de ne pas imaginer ce que doit représenter la même démarche à la frontière avec le Mexique ou surtout ce qu’elle a été du temps où les immigrants fuyant la crise débarquaient dans le port de New-York. Avant 1892 pour aller au centre de réception des immigrés, le débarquement des voyageurs se faisait à Fort Clinton (sic) au grand désespoir « des habitants qui se plaignaient de la situation, imputant nombre de maux aux nouveaux arrivants », comme c’est le cas partout et tout le temps. Ellis Island en référence à Samuel Ellis, colon venant probablement d’Écosse, qui en fut son propriétaire dans les années 1770, allait devenir le lieu mythique où durant des jours et des jours il fallait attendre le droit de rêver à des jours meilleurs. Un centre de rétention qui allait fonctionner jusqu’en 1954 après le passage et l’inspection de plus de… 12 millions d’immigrants par le bureau d’immigration des États-Unis. Durant les 62 années d’activité, seulement 8 millions d’immigrations ont été enregistrées localement par l’administration de l’État de New York car les faibles, les gens présentant des signes de maladies étaient renvoyés dans leur pays ou mis en quarantaine sur l’île pour une très longue période.
Par la suite, les immigrants se virent poser une série de… 29 questions (il y en a plus que 7!) incluant leur nom, leur métier et la quantité d’argent qu’ils avaient sur eux. Généralement, ces immigrants étaient acceptés immédiatement et ne passaient que 3 à 5 heures sur l’île comme maintenant aux frontières. Certaines personnes furent également refoulées, car on considérait qu’elles risquaient de rester chômeurs. Environ 2 % des arrivants virent ainsi leur admission aux États-Unis rejetée et furent renvoyés dans leur pays d’origine pour diverses raisons telles que leur passé criminel. Ellis Island était souvent surnommée « l’île des pleurs » ou « l’île des cœurs brisés » par celles et ceux qui ne pouvaient plus rêver d’un monde qu’ils espéraient meilleur !
Triomphant, soulagé, muni de ma « green card » je savoure soulagé les paysages verdoyants, doux, lénifiants du Vermont… Quel bonheur de n’être qu’un touriste libre immigrant très ponctuel, aux USA mais l’expérience réveille bien des démons : ceux des postes frontières en Europe !
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Sur une route, un peu oubliée, vers Tarbes, pour ainsi dire au pied des Pyrénées, subsistent tous les dix ou vingt kilomètres des baraquements de béton…
Ce furent en leur temps des bordels pour soldats américains, venus mettre fin à la guerre.
Le dernier « coup tiré », fut celui dont nous parle encore un ami à peine plus âgé que moi, qui laissa dans un des ces baraquements une bonne partie de ses rêves d’enfant.
Et oui, une fois en place, le peuple libérateur s’organise.
Ah, et puis, bonne fête à nos mamans de Tarbes !