Ce qu’il y a de formidable dans les sondages c’est que selon les questions on peut leur faire dire n’importe quoi… surtout sur des sujets qui ne concernent absolument pas les personnes devant répondre. Ainsi comment peut-on espérer avoir une idée exacte de ce que pensent les électrices et les électeurs du chômage quand on questionne des retraités, des patrons ou des fonctionnaires ? C’est une catastrophe que de pervertir le jugement des gens en induisant des réponses qui faussent l’opinion ! C’est ainsi que le racisme, la haine de l’autre montent dans les zones rurales. On devient « raciste » pour être comme tout le monde en s’imprégnant d’un prêt à porter idéologique fourni par ces enquêtes adaptées aux objectifs que l’on veut atteindre. La généralisation constante de faits isolés pour les transformer en vérités réputées incontestables porte le germe de la dictature de la pensée unique ou au minimum dominante. Heureusement que les sondages n’existaient pas en 1942 car ils auraient vanté la popularité de Pétain, approuvé la déportation des résistants terroristes et qui sait soutenu les exactions des nazis! Épouvantable au pays des lumières.
Par exemple une majorité de Français se dit favorable à certaines propositions-chocs pour réformer l’assurance chômage, selon un sondage BVA pour i>Télé et Le Parisien. Ils sont d’autant plus d’accord qu’ils n’ont plus aucun risque de basculer dans cette situation sociale angoissante ! Et bien évidemment ces citoyens connaisseurs approuvent quatre des cinq mesures proposées lundi dernier par la CGPME (la Confédération générale des petites et moyennes entreprises)… Il suffit de préciser que c’est le plus grand des hasards et que toutes celles et tous ceux qui ont répondu, connaissaient les conséquences de leur choix pour les actifs actuels !
Ainsi, 82% des personnes interrogées se disent favorables à ce que l’on donne la possibilité aux salariés qui le souhaitent de cotiser moins, en échange d’un plafonnement futur de leur indemnisation chômage, si un jour ils étaient amenés à connaître une période sans emploi. C’est à dire de parier sur leur avenir comme l’ont fait des générations d’employés, de salariés, de travailleurs acceptant de ne pas être « déclarés » ou de travailler au noir sans se soucier de leur retraite ! Tout le monde en connaît ! Ils réclament après une solidarité à laquelle ils n’ont pas contribué. Acceptez cette proposition c’est simplement se préparer à se faire piéger à plus ou moins long terme.
De même, 64% des personnes interrogées se disent « favorables » à une radiation automatique des chômeurs qui refusent plus de deux offres « raisonnables » d’emploi, 61% souhaiteraient « exclure du régime spécifique des intermittents les techniciens du spectacle, qui pourraient être soumis au droit commun ». Qui peut définir ce que sera « deux offres raisonnables » ? Il est certain que d’abord il faudrait qu’il y ait des… offres et ensuite qu’elles permettent à celle ou celui qui y répond de pouvoir y répondre. Un électricien sera-t-il radié s’il refuse d’être maçon ou peintre au prétexte que ce sont des métiers du bâtiment ? Une secrétaire médicale sera-t-elle radiés si on lui propose d’être aide-soignante ou auxiliaire de vie ? Totalement absurde et surtout totalement subjectif. Si on applique pour la solidarité des critères de ce genre on va droit dans un accroissement considérable du RSA et de la pauvreté ! L’efficacité de Pôle emploi n’est jamais mise en cause… et surtout on n’ose pas parler des dégâts réels de toute mesure restrictive dans un système social reposant pour sa croissance toujours plus sur la consommation !
Enfin, 59% prônent la mise en place d’une dégressivité des allocations à partir d’un an. La dernière mesure testée – « faire passer de 4 à 8 mois la durée de travail nécessaire pour être indemnisé », sans être aussi soutenue, serait tout de même approuvée par un Français sur deux (50%). Une nouvelle porte ouverte enfoncée car si au bout d’un an le chômeur ou la chômeuse n’a pas trouvé de boulot il faut aussi indiquer combien lui en a proposé Pôle emploi ! Chaque situation est différente…aucun parcours ne ressemble à un autre… et l’aide de la collectivité consiste justement à répondre individuellement à chaque cas et à ne pas généraliser ce qui ne l’est pas.
Les mesures patronales sont toujours à sens unique : tailler dans les dépenses en appauvrissant celles et ceux qui sont déjà en situation de faiblesse. C’est l’éternelle sinécure voulant que les coupes sombres permettent de redonner vie à un arbre mort ! Alors pour faire avaler une placebo amer et inefficace on commande un sondage du genre : « êtes vous d’accord pour affaiblir les autres sans que l’on touche à vos avantages ? » et on s’extasie sur le courage de ceux qui répondent qu’ils sont d’accord pour purger les autres ! Société égoïste, mal éduquée, mal informée : nous approchons du fond !
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L’abolition de la peine de mort, chère à monsieur Mitterrand, pourrait faire l’objet d’un sondage.
Si comme chacun sait, défendre l’abolition aura permis à cet homme d’affirmer sa force au-delà de l’opportunisme politique, par calcul ou par conviction, personne pourtant n’a depuis osé lancer un sondage auprès des grands criminels,
ni d’ailleurs auprès des policiers en charge de les combattre.
Oui, l’efficacité sociale de l’abolition de la peine de mort, cela est un sujet tabou, aucun sondage à ce propos. L’efficacité…!
L’abolition de la peine de mort est un discours moral, une grande bataille philosophique.
Mais un sondage froid et dépassionné, lancé auprès des personnes les plus concernées directement par cette loi, un sondage sur l’efficacité sociale donnerait ceci:
la peine de mort n’a en fait que peu de chance d’être le spectre d’une punition rédhibitoire quand nous avons à faire à de grands criminels (assassins, terroristes).
En effet ces individus appliquant avec joie la devise « vaincre ou mourir », il semblerait que la peine de mort remplacée par une très longue peine d’emprisonnement soit plus apte à les décourager .
L’abolition de la peine de mort est donc une mesure efficace, avant que d’être une loi morale.
Ce qui est, vous en conviendrez, fort triste et froid, surtout pour celles et ceux qui rêvent encore d’un Etat pétri d’humanisme .
Bien évidemment, sonder une personne sur l’abolition de la peine de mort, juste après qu’un membre de sa famille ait été malmené ou pire par un monstre donnera un résultat en pourcentage prévu d’avance.
Mais la haine et la revanche, la justice au sens commun du terme, tout cela n’a rien à voir avec la réalité des décisions politiques.
L’Etat est en charge, n’est-ce pas, d’un ordre moral, et il est interdit de faire justice soi-même.
A moins que l’Etat ne soit juste en charge d’un ordre tout court, question de point de vue, selon si l’on juge de la beauté ou de l’efficacité d’une loi.
Et c’est bien ici que les sondages sont un instrument vicieux:
lorsque une question est posée, parlons-nous de morale ou d’efficacité ?
Un pauvre nourrit par la communauté, est-ce moral ou efficace, et qu’est-ce que cela peut engager comme bienfait pour toute la communauté?
A moins que la morale soit le ferment de l’efficacité…
Ce qui serait merveilleux !
D’autres y ont cru: Liberté, Egalité, Fraternité !
Si l’on m’interroge dans un sondage (ce qui ne m’est jamais arrivé)en me demandant si je suis d’accord pour que l’on impose les grandes fortunes à 75 0/0, que l’on envahisse militairement les paradis fiscaux pour redistribuer d’une manière égalitaire les sommes colossales qui y sont planquées, que l’on saisisse les fortunes de l’église orthodoxe, du Vatican et autres institutions dont les membres ont fait vœu de pauvreté, que l’on procède à la dissolution du MEDEF comme entreprise terroriste, je répondrai :
OUI, OUI, OUI, OUI.