Bâtissons vite une pacte social, citoyen et durable… prioritaire

Il existe des mots que la société actuelle ne connaît pas et ne veut surtout pas connaître. Il est vrai que les leçons de vocabulaire n’ont plus cours dans les écoles élémentaires. Par exemple, depuis trois décennies, plus personne ne sait ce que « priorité » veut dire. La consommation outrancière a conduit à justement ne plus utiliser ce qui nécessite une analyse, un raisonnement et un choix ! On sait justement que depuis un demi-siècle, la publicité consiste à séduire pour transformer le superflu en… essentiel, et donc à tout mettre au même niveau. La période que nous traversons a longtemps été présentée comme une « crise » alors que lentement nous entrons dans un changement obligatoire de monde. Et quand nous demandons au politique de répondre à des besoins immédiats, ou à la préservation d’acquis dépassés, nous évitons une remise en cause essentielle : choisir quand tout n’est plus possible. Nous jouons hypocritement les uns et les autres à espérer revenir sur des années fastes du « toujours plus », alors que nous devrions travailler à inventer ce que Chaban-Delmas avait appelé, sous l’influence de Delors, Nora et bien d’autres figures, la « nouvelle société » des priorités. Bien entendu, celle que la Gauche doit bâtir n’aura aucun rapport avec la vision gaulliste des années 70, mais il faut absolument qu’elle s’attelle à reconstruire une nouvelle donne ! Actuellement, le gouvernement se contente d’enfiler les réformes comme autant de perles plus ou moins parfaites, n’ayant aucun lien commun, pour finir par faire un ensemble cohérent. Chaque ministre se lève un matin, et en se rasant, a l’ambition de coller son nom à un projet de loi. Dans le pays, personne n’admet que dans les prochaines années, il sera totalement impossible de retrouver les repères antérieurs. Tout le cycle de la vie va être infléchi, modifié, bouleversé par des contraintes inédites, découlant des erreurs antérieures. Nous abordons de nouveaux rivages !
Le massacre environnemental, la mutation des citoyens informés en consommateurs assoiffés, la prééminence de l’économie financière virtuelle sur l’économie réelle, l’irresponsabilité individuelle avec transfert sur la collectivité, la recherche de l’immédiateté au détriment de la réflexion… vont lourdement freiner toute transformation sociale. Les résistances sont nombreuses, et la Gauche arrivée au pouvoir avec un vague programme ressemblant au catalogue idéologique de Manufrance, n’a pas dans ses tiroirs un projet global de « nouvelle société ». Elle devrait d’urgence remettre son ouvrage sur le métier, et tisser la trame d’un « pacte social, citoyen et solidaire » devant être négocié avec toutes les forces vives du pays. Bien évidemment, il devra être admis par tout le monde qu’une telle construction suppose, dans le contexte mondial actuel, des… priorités et comme, en France, chaque corporation, chaque secteur d’activités, chaque individu s’affirme essentiel et incontournable, la mise en place d’un tel pacte relève des travaux d’Hercule. Toute « priorisation » entraîne en effet de vifs mécontentements dans ce pays, où même sur la route, grâce aux giratoires, on a supprimé le principe du respect d’un avantage accordé à l’un et refusé à l’autre !
Il faut revenir aux principes édictés par Mendès-France, même si leur mise en œuvre reste problématique. Au plus bas dans les fameux sondages, François Hollande ne risque rien, si ce n’est une image différente de son action. Un Grenelle de la gouvernance de la France s’impose avec les partis qui le veulent, avec les structures sociales qui en auront la volonté, avec les philosophes, les sociologues, les référents susceptibles d’enrichir le débat. Une révolution culturelle doit être lancée de toute urgence, pour prendre de cours le « populisme » galopant qui prétend satisfaire tout le monde en transférant la responsabilité des échecs sur « les autres » !
Les cabinets ministériels sont peuplés de blancs-becs qui ont cru que le fait d’avoir participé de loin aux grandes batailles de « Solférino » leur donne le droit de mépriser les troupes venues du terrain. Ils s’affirment tacticiens hors pair, mais laissent à des cadres infiltrés ou demeurés le soin de traduire dans les faits les mesures annoncées par le Président, acculé dans les cordes d’une pseudo impopularité. Un pacte « social, citoyen et durable » comme base de l’action gouvernementale ne sera jamais facile à rédiger, facile à transposer ou facile à transformer en réalités, mais comme la France entre aux urgences, le risque d’échec est très limité.
« Les réformes actuellement indispensables ne se réalisent pas à coups de baguette magique ou seulement par un scrutin heureux, et leurs fruits ne mûrissent pas aussi vite qu’on le souhaiterait. L’essentiel, c’est que le pays ne soit pas dupé une fois de plus. Pour cela, il faut, avant tout, informer loyalement » avait écrit de manière prémonitoire dans son livre « choisir » Pierre Mendès-France. Il serait temps de mettre ce propos sur la place politique et de le décliner dans les actes. Mais ce que j’en dis !

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Cet article a 3 commentaires

  1. gedur33

    Il est vraiment temps mais je pense qu’il est trop tard pour inverser la tendance à la baisse !

  2. Bonjour,
    http://www.pauljorion.com/blog/?p=51053 extrait:
    « Les 15.000 manifestants qui hier ( 14/3) scandaient à Bruxelles « Habemus austeritate » se sont en quelque sorte invités au sommet européen. Réunis à l’initiative de la confédération européenne des syndicats (CES), ils ont symbolisé une contestation montante de la politique d’austérité que les dirigeants n’ont pas ignorée et qui a donné le ton à leurs discussions, immanquablement « sereines et intenses », d’après Herman Van Rompuy, le président de l’Union européenne.

    Jean-Claude Juncker, le premier ministre luxembourgeois, a le plus clairement exprimé l’inquiétude ambiante en déclarant : « Je n’exclurais pas que nous courons le risque de voir une révolution sociale, une rébellion sociale », n’ayant à ajouter que « il faudra que nous expliquons mieux notre politique ». Les uns parlaient « d’urgence sociale », les autres du « niveau inacceptable » atteint par le chômage. Herman Van Rompuy expliquant « nous sommes pleinement conscients du débat qui monte et même du désespoir de certains ». »

    Si le doute envahit maintenant le sommet Européen, force est de constater qu’il n’en sort RIEN. Madame Merkel reste de marbre devant les malheurs des pays du sud de l’Europe, à peine attristée des déconvenues de Super Mario (Monti). La ligne de défense des jusqu’auboutistes de l’austérité consiste en un seul mot « populisme ». L’anti-européanisme atteint aujourd’hui des sommets à peine comparables à la défiance envers les politiciens locaux et nationaux de tous bords.

    Le pacte « social, citoyen et durable » comme base de l’action, OUI mais pas seulement au niveau Français. Il faudrait le même type de pacte au niveau Européen et pour cela commencer par détruire la constitution eurocratique des banksters signée à Lisbonne.

    On peut toujours rêver!!
    Bonne journée

  3. BONNEAU

    Je me contenterai d’illustrer, de façon personnelle mais dans l’espoir d’une vision sociétale – la recherche de l’immédiateté au détriment de la réflexion -, quelques phrases issues de l’article et des commentaires :

    1- « Actuellement, le gouvernement se contente d’enfiler les réformes comme autant de perles plus ou moins parfaites, n’ayant aucun lien commun, pour finir par faire un ensemble cohérent. » et « la Gauche arrivée au pouvoir avec un vague programme ressemblant au catalogue idéologique de Manufrance, n’a pas dans ses tiroirs un projet global de « nouvelle société » »
    En effet, pas de projet global de société solidaire cohérente en vue :
    un exemple avec des positions publiques contradictoires :
    Pour M. Valls, les Roms qui occupent des campements « ne souhaitent pas s’intégrer »
    Le Monde.fr avec AFP | 15.03.2013 à 12h11 • Mis à jour le 15.03.2013 à 13h36
    http://www.lemonde.fr/societe/article/2013/03/15/pour-m-valls-les-roms-ne-souhaitent-pas-s-integrer_1849054_3224.html
    qui a appelé la réaction immédiate de nombreux commentateurs dont :
    Allô ? Non mais allô, quoi. T’es ministre de l’intérieur et tu connais pas la loi ?
    http://blogs.mediapart.fr/blog/philippe-alain/150313/allo-non-mais-allo-quoi-t-es-ministre-de-l-interieur-et-tu-connais-pas-la-loi
    extrait : En mars 2011, le Conseil d’État avait en effet annulé la circulaire du 5 août 2010 qui ordonnait aux préfets d’engager une « démarche systématique de démantèlements des campements, en priorité ceux des Roms ».

    A l’époque de la circulaire ethnique contre les Roms, un candidat socialiste à la Présidence de la République nommé François Hollande déclarait dans l’émission C politique sur France 5 qu’elle était « à la fois immorale et illégale ». « Elle est immorale parce qu’une communauté est stigmatisée en tant que telle » et elle « est illégale parce que c’est une discrimination » en infraction avec la Convention européenne des droits de l’Homme.

    2- « Elle devrait d’urgence remettre son ouvrage sur le métier, et tisser la trame d’un « pacte social, citoyen et solidaire » devant être négocié avec toutes les forces vives du pays. »
    Voir à ce propos qui, si l’information était diffusée massivement, à part RESF serait d’accord avec de telles pratiques illégales et de l’ordre de la violence institutionnelle :

    Florina, bébé de 7 mois arraché brutalement au sein maternel, (le 8 mars 2013) Valls récidive !
    Libérée sur décision préfectorale le 12 mars 2013
    http://www.educationsansfrontieres.org/article46301.html

    3- « Un Grenelle de la gouvernance de la France s’impose avec les partis qui le veulent, avec les structures sociales qui en auront la volonté, avec les philosophes, les sociologues, les référents susceptibles d’enrichir le débat. Une révolution culturelle doit être lancée de toute urgence, pour prendre de cours le « populisme » galopant qui prétend satisfaire tout le monde en transférant la responsabilité des échecs sur « les autres » ! »

    CHERCHE FAMILLE MAXHURAJ DESESPEREMENT
    (disparition de Klévis dans le Morbihan suite à arrestation : communiqué publié par le personnel du collège Charles Langlais de Pontivy)
    http://www.educationsansfrontieres.org/article46368.html
    Je partage cette nécessité donc d’éviter le populisme, lequel cherche toujours ses boucs émissaires.

    4- « Les réformes actuellement indispensables ne se réalisent pas à coups de baguette magique ou seulement par un scrutin heureux, et leurs fruits ne mûrissent pas aussi vite qu’on le souhaiterait. L’essentiel, c’est que le pays ne soit pas dupé une fois de plus. Pour cela, il faut, avant tout, informer loyalement … »
    Certes les ONG s’y emploient :
    France. Les autorités doivent veiller à ce que les enfants roms ne subissent aucune ségrégation scolaire
    http://www.amnesty.org/fr/library/info/EUR21/002/2013/fr
    14 février 2013
    « Amnesty International craint que les autorités françaises ne fassent pas le nécessaire pour que les enfants roms exercent leur droit à l’éducation sans subir de discrimination.
    Le 6 février 2013, Amnesty International a envoyé une lettre au maire de Ris-Orangis …
    »
    http://www.unicef.fr/search/custom_search/roms
    Extrait:
    L’UNICEF France salue les mesures concernant spécifiquement les enfants contenues dans le plan pluriannuel contre la pauvreté et pour l’inclusion sociale adopté lors du Comité interministériel de lutte contre les exclusions du 21 janvier 2013. Les principes d’objectivité, de non stigmatisation, de participation ou encore de décloisonnement qui l’animent sont des éléments positifs qui vont dans le sens des recommandations de l’UNICEF. (…) L’UNICEF France reste mobilisé et poursuit son travail de fond en lien avec les différents ministères engagés pour accompagner la mise en œuvre effective et le déploiement des mesures annoncées.

    Dans un domaine proche :
    http://www.hrw.org/fr/news/2012/12/18/france-huit-organisations-appellent-une-vraie-concertation-concernant-les-controles-

    5- « Jean-Claude Juncker, le premier ministre luxembourgeois, a le plus clairement exprimé l’inquiétude ambiante en déclarant : « Je n’exclurais pas que nous courons le risque de voir une révolution sociale, une rébellion sociale », n’ayant à ajouter que « il faudra que nous expliquons mieux notre politique ». »
    Mais les solutions à proposer doivent être également concertées dans l’Europe entière :
    http://www.amnesty.org/fr/roma
    Il est à craindre, comme toujours, que l’exacerbation des foules ne mène à une catastrophe préparée par une politique à court terme, sans vue sociétale .

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