Louise Michel a plus que jamais sa place au Panthéon

Faut-il une journée de la femme pour qu’on lui donne la place qui lui revient dans notre société de plus en plus machiste ? En fait, je suis de ceux qui pensent (à tort certainement) que ce n’est qu’un alibi pour discourir benoitement sur les mesures à prendre, et qu’on ne prend jamais, car elles se heurtent à des siècles de soumission. Ce que les femmes ont gagné, elles ont toujours été contraintes de l’obtenir par la lutte et surtout par la plus belle des armes : l’exemple ! Actuellement, il existerait un débat pour savoir laquelle parmi les plus célèbres des représentantes du sexe réputé faible doit être admise au Panthéon. Encore une fois, pour ne pas avoir reconnu, en leur temps, la valeur de l’action féminine, les hommes tentent de se rattraper en récupérant une image symbolique des siècles passés. Une manière comme une autre de pas avoir à se prononcer, le moment venu, sur le rôle et la place d’une « admissible » dans le cénacle des « grands hommes » souvent loués pour leurs victoires militaires plus que pour leur humanisme conquérant.
Pour ma part je n’aurais pas l’ombre d’un doute, puisque Louise Michel mérite plus que toute autre sa place dans ce Panthéon où l’on n’a pas toujours envoyé des parangons républicains. Bien au contraire… En consultant la liste, vous découvrirez que les généraux d’Empire bardés de titres nobiliaires ronflants côtoient des ecclésiastiques inconnus : la sabre et le goupillon ont leurs places réservées dans une enceinte où l’on trouve Jean Moulin, André Malraux, René Cassin, Jean Monnet, Pierre et Marie Curie ou Victor Hugo, Émile Zola, Paul Langevin, Jean Jaurés, Félix Eboué ou Victor Schoelcher, autant de gens qui se sont à un moment dressés contre le pouvoir établi et les idées reçues ! Tous, d’une manière où d’une autre, n’ont pas servi et ne se sont pas servis, mais ils se sont mis en danger par leur « indignation » ravageuse. Louise Michel, en cette année où nous devrions sans cesse rappeler que la période la plus révolutionnaire de l’Histoire de France fut la « Commune de Paris », puisque au-delà de la résistance, il y avait une volonté collective de créer un système social véritablement libre, fraternel et égalitaire !
Fille d’une servante et certainement du fils de ses employeurs, elle a mené un vrai combat, en une période où les femmes subissaient, et où tout prosélytisme libertaire ne pouvait que condamner tôt ou tard aux foudres des pouvoirs établis. Elle avait un courage exceptionnel et une force de caractère à nulle autre pareille. Faire entrer au milieu de tous ces ducs, ces contes, ces excellences, ces nantis, ces couverts de titres, une digne compagne des contestataires les plus célèbres de notre Histoire ne serait que justice. Avec elle entrerait le Peuple, mais aussi le vrai métier dont a besoin le Peuple pour chasser du Panthéon tous les « héros » qui le squattent : institutrice ! Elle ne fut pas que citoyenne, mais elle demeura jusqu’à son dernier souffle, une militante au sens noble de ce mot. Toujours minoritaire mais toujours présente pour défier le prêt à penser idéologique. Elle devint « institutrice » des esprits et des cœurs quand beaucoup se contentaient d’être des « instructeurs » de ces mêmes esprits selon des principes officiels !
Il faudrait simplement graver sur la stèle le splendide poème des œillets rouges (1) offert à son ami Théophile Ferré avant son exécution par les sbires d’Adolphe Thiers, dont les plus grandes avenues du pays vantent le nom. Il résume ce qui a fait la splendeur d’une vie qui l’a conduite devant un tribunal qui prétendait juger les actes contraires à la République d’une femme n’aspirant qu’à changer un monde d’oppression et de profits. Elle réclame la mort au tribunal, et c’est sans doute en l’apprenant que Hugo prend sa défense. Entre 1871 et 1873, elle passe… vingt mois en détention et se voit condamnée à la déportation en Nouvelle Calédonie. C’est le temps où la presse versaillaise la nomme la Louve avide de sang… ce qui démontre que la Droite dans notre beau pays n’a jamais varié d’un pouce et qu’elle a toujours le même talent pour qualifier les femmes qui la dérangent ! En Nouvelle Calédonie, elle cherche à instruire les Kanaks et prend leur défense lors de leur révolte, en 1878. Elle obtient, l’année suivante, l’autorisation de reprendre son métier d’institutrice, d’abord auprès des enfants de déportés, puis dans les écoles de filles. Elle ne survit que grâce à des mandats de Georges Clémenceau.
Il y aurait donc un vrai bonheur, par les temps qui courent, à placer son lieu de repos en face ou en vue de celui d’un certain Jean Frédéric Perregeaux, financier et premier dirigeant de la Banque de France. Les femmes auraient enfin la place qu’elles méritent au pays de Marianne, symbole d’une république, ne sachant jamais choisir les bons combats !
(1) Les Œillets rouges
Si j’allais au noir cimetière,
Frère, jetez sur votre sœur,
Comme une espérance dernière,
De rouges œillets tout en fleurs.
Dans les derniers temps de l’Empire,
Lorsque le peuple s’éveillait,
Rouge œillet, ce fut ton sourire
Qui nous dit que tout renaissait.
Aujourd’hui, va fleurir dans l’ombre
Des noires et tristes prisons.
Va fleurir près du captif sombre,
Et dis-lui bien que nous l’aimons.
Dis-lui que par le temps rapide
Tout appartient à l’avenir
Que le vainqueur au front livide
Plus que le vaincu peut mourir.

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Cet article a 2 commentaires

  1. suzanne

    hier soir jeudi 7 mars .il yavait un film sur france ô avec SYLVIE TESTUD dans le rôle de Louise MIchel………une grande dame qui c’est certain a sa place au Panthéon……

  2. J.J.

    Lorsque je rendais visite au Lycée professionnel de Ruffec, en Charente, qui porte le nom de Louise Michel, je ressentais toujours beaucoup d’émotion et de respect.

    C’est peut-être à tort, certes, mais tu n’est pas le seul Jean Marie à penser que cette journée de la femme est un alibi.

    Que feraient -elles donc les 364 autres jours ?
    Et que fait-on pour elles ?

    Imposture !

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