Etre ou ne pas être sur…les listes ?

Pour croire encore dans un sursaut du peuple, il ne faut pas assister aux commissions de révision des listes électorales. Le rituel est toujours le même, avec les réunions de fin d’année consistant à éplucher les noms officiellement inscrits sur les tablettes officielles, pour débusquer les personnes ne pouvant plus y figurer. D’abord il s’agit d’examiner des dizaines d’enveloppes revenues avec la mention « NPAI » (n’habite plus à l’adresse indiquée) lors des derniers envois, ce qui dénote de la part des intéressé(e)s un manque évident de volonté d’exercer leur droit de vote. Parfois, il aura fallu deux ou trois envois pour obtenir la même réponse, puisque personne ne connaît l’adresse nouvelle.
La carte d’électeur, probablement celle qui demeure la plus symbolique dans la vie sociale, a attendu, lors des scrutins antérieurs, que quelqu’un se présente pour la récupérer. C’est révélateur de ce phénomène croissant de désintérêt pour la politique, qui conduit, de fait, à perdre son statut d’électrice ou d’électeur par indifférence. A Créon, c’est plus d’une centaine de cas qui a été examinée. Ce sont des gens passés par la commune, mais dont plus personne ne connaît la destination ultérieure et dont on sait qu’ils ne pourront plus voter lors des présidentielles, sauf s’ils font l’effort de se présenter dans leur nouvelle ville ou village de résidence. Le système français, qui repose sur le « volontariat » de déclaration de domicile prend l’eau de toutes parts. Les disparus sans laisser d’adresse se multiplient, dans un contexte où l’on confond liberté individuelle d’exister ou de ne pas exister et disparition par calcul ou ignorance de l’importance du vote.
Il faudrait en effet, pour parer aux abus constatés, que toute personne domiciliée dans une commune obtienne de la Mairie, une attestation de domicile valable pour absolument toutes les démarches officielles. Ce document éviterait parfois des fraudes aux organismes sociaux, aux abonnements divers et permettrait simplement l’inscription en même temps sur les listes électorales. Cette démarche ne devrait pas être renouvelée tant qu’il n’y aurait pas de modification d’adresse, et ne serait à renouveler que dans l’hypothèse d’un changement. L’ignorance dans laquelle se trouvent notamment les jeunes sur le fonctionnement de la vie civique se traduit dans les piles de cartes non réclamées. La très grande majorité de celles et ceux qui ont été recensées lors de la commission de révision des listes électorales avait des années de naissance supérieures à 1985… ce qui devrait inquiéter tout le monde quand on sait que Créon est une ville dans laquelle le taux d’inscrits avoisine les 95 % !
A Colombes on vient d’ouvrir une brèche dans des méthodes habituelles consistant à fermer les yeux quand les textes et règlements sont bafoués. Et bien évidemment, comme le veut la tradition, par ignorance ou par connivence, certains hurlent à la conspiration. L’ex-secrétaire d’Etat Rama Yade pourrait être radiée des listes électorales, le maire estimant que l’élue d’opposition municipale a menti sur sa domiciliation.
« Comme chaque année, la commission de révision des listes électorales vérifie la régularité des inscriptions, et il semble que Rama Yade, conseillère municipale d’opposition dans la ville, n’est pas régulièrement inscrite », a affirmé le maire. D’après les documents dont il dispose, l’élue « ne réside pas à l’adresse fournie et ne dispose d’aucune propriété ni résidence lui permettant d’attester de son inscription au rôle de la taxe foncière ou d’habitation ».
Rama Yade ne « respecte donc pas le code électoral, et pourrait être radiée d’ici mi-décembre – comme 3.000 habitants de Colombes par an – par la commission de révision des listes électorales ». Il se défend cependant de lancer « une chasse anti-Rama Yade », ajoutant qu’une éventuelle radiation ne l’empêcherait pas forcément de se présenter aux législatives ni d’exercer son mandat de conseillère municipale ». Toutefois, des poursuites judiciaires pourraient être engagées « en fonction de la décision prise par la commission de révision électorale, du comportement de Rama Yade, et de sa réaction ».
Il faut se préparer à un envol des injures, des accusations, des contestations, même si en l’occurrence, si ces faits sont exacts, le dossier est irréfutable. Ce qui est le plus étonnant c’est que depuis… 2008, une élue municipale, ancien Ministre n’ait pas eu l’idée de « régulariser » sa situation. Comment peut-elle plaider dans les banlieues, son terrain d’exercice préféré, une inscription des jeunes sur les listes électorales ? Il est certain que dans le cas de certains « parachutages » on est peu regardant sur le lieu où l’arrivant pose légalement ses pieds. Et ce qui est le plus bizarre, c’est que le rappeler devient, dans notre démocratie des apparences, une « attaque intolérable ». « Ce sont des méthodes infectes », a déploré Rama Yade, qui a totalement oublié que faire respecter la loi, c’est le principal souci du Maire. Mais bien évidemment, comme dans bien d’autres cas, il s’agit de l’appliquer aux « gens ordinaires » et d’en exonérer les plus « influents ». C’est probablement pour ça que, hier soir, il y avait tellement de cartes d’électrices et d’électeurs non réclamés sur la table de la commission créonnaise de révision des listes électorales.

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Cet article a 7 commentaires

  1. Yann Burstein

    L’association « Agir pour Colombes » s’élève avec indignation des insinuations de Philippe Sarre, Maire de Colombes, sur la prétendue inactivité de Rama Yade, sa Présidente, sur la ville de Colombes.
    C’est autour d’elle que se sont réunis depuis plus de deux ans, des élus actuels et anciens ainsi que des centaines de citoyens qui veulent agir pour leur ville.
    Que ce soit pour la Défense du Stade, pour le combat du Métro Paris Express, pour le tracé du tramway T1 que pour tous les grands dossiers, Rama Yade et son équipe ont organisé des réunions publiques, plus de 40 réunions d’appartements et même dernièrement une dizaine de cafés-débat.
    Par son site internet, sa lettre d’information et ses rencontres multiples avec les associations et les citoyens de la ville, Rama Yade a montré qu’elle était celle qui pouvait rassembler demain les colombiens sur un projet ambitieux pour la ville.
    C’est un Maire aux « abois » qui, dépassé par les problèmes d’insécurité sur la ville et un bilan catastrophique de ses trois premières années de mandat, utilise les méthodes les plus viles de la politique politicienne.

    « Agir pour Colombes » veut faire de la Politique Autrement.

    Avec Rama Yade, elle a trouvé celle qui incarne le mieux cette nouvelle voie qui passe par le renouvellement du personnel politique issu du Passé.

    Yann Burstein – Vice-président et le Conseil d’administration

  2. Alexis Bachelay

    Ce qui est regrettable dans cette nouvelle affaire, c’est qu’elle est le symptomatique du comportement de cette élite arrogante à laquelle appartient madame Yade.
    Madame Yade se croit au-dessus des lois et ne peut fournir aucune preuve de sa domiciliation, car elle n’habite pas à Colombes. Jean-Marie Darmian est Maire et il connait bien son sujet. L’inscription sur les listes électorales doit être vérifiée par une commission locale pluraliste. S’il y a des irrégularités, le premier magistrat de la commune se doit de les signaler et de saisir la justice.
    Madame Yade a construit sa carrière dans la polémique permanente. Une de plus !
    Que ce soit au niveau local ou national, elle n’a jamais rien proposé de sérieux. Même ses livres sont des plagiats.
    Son association soi-disant « apolitique », ne sert qu’à dénigrer les élus de Colombes. Pas seulement leur travail, mais aussi à travers des attaques personnelles indignes du débat public. Voilà comment madame Yade et ses lieutenants font de la « politique autrement ».

  3. batistin

    Donc, un maire appliquant la loi, puisqu’il faut résider là où on vote, il me semble, et de l’autre une politicienne active résidant je ne sais où…

    Je propose que tous ceux qui n’ont pas de toit, pas de travail et pas de papiers,
    mais peuvent prouver qu’ils agissent chaque jour avec force pour ne pas crever,
    aient au moins une carte d’électeur.

    Puisque qu’il semblerai que l’action peut tenir lieu de résidence,

  4. facon jean françois

    Bonjour,
    « Plus d’un pauvre sur deux a moins de 35 ans », observe Christian Baudelot dans l’ouvrage de La République des idées Refaire société (Seuil). La jeunesse n’a connu que la crise et l’enchaînement des insécurités sociales, et cette crise a « constitué un obstacle de taille à la conquête de l’autonomie par les jeunes ». L’artefact consistant à inscrire mécaniquement depuis 1997 les jeunes de 18 ans ne résout pas le problème de fond. Comment faire confiance à une caste de politiciens privilégiés ( bonjour les somptueuses indemnités) qui a généré la désespérance des jeunes ? Comment agir sur une classe politique qui ignore les abstentionnistes et les votes blancs ? Comment faire admettre que la majorité ayant voté NON est méprisée par l’oligarchie en imposant le traité de Lisbonne ?
    Notre démocratie est malade, très malade, nos politiques sont autistes, tout cela ne peut conduire qu’a une destruction du tissu social.

  5. Alexandre Laignel

    @Yann Burstein
    L’analyse de Jean-Marie Darmian est claire et sans faute…

    D’autant que j’ai moi-même été concerné – à Colombes – par une décision de la commission de révision des listes électorales en même temps que Madame Yade, ayant déménagé au cours de l’année en cours d’une résidence à l’autre à Colombes… et ayant oublié de déclarer en mairie ce changement ! J’ai reçu un avertissement m’invitant à me réinscrire. Il me reste donc à régulariser ma situation. Le cas est encore différent que celui de Rama Yade, mais la logique de traitement de tous les administrés est la même.

    ll est fondamental que la loi électorale s’applique pour tous, élus et administrés, et qui plus est de s’assurer qu’un électeur « vit » bien dans sa commune pour prétendre s’impliquer dans la vie politique.

  6. J.J.

    «  » » »Mais bien évidemment, comme dans bien d’autres cas, il s’agit de l’appliquer aux « gens ordinaires » et d’en exonérer les plus « influents ». » » » » » » »

    Comme par exemple cette pauvre madame Bettencourt (encore elle !) qui sera dispensée de poursuites pénales pour une de ses « petites » fraudes fiscales de 100 millions !
    Il n’y a guère que Nanar qui a eu droit aux foudres de la justice (????). il est vrai que c’était un ancien socialiste .

    mais il est vrai que vu le résultat final, il vaut peut-être mieux dispenser madame Bettencourt de poursuites pénales, on se croirait ensuite obligés de lui verser des dommages et intérêts .

  7. ralph martin

    « la voix du peuple ne s’exprimera plus par les urnes que de façon symbolique elle s’exprimera par des actes individuels, malheureusement parfois désespérés et collectivement dans la rue, pas forcement de façon organisé et constructive, nous sommes au bord d’une deuxième révolution Française, espérons que les guillotines resteront virtuelles sinon ce sont d’abord les politique de tout bord qui risquent de perdre leur tête »

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