Deux visions de l'injustice se croisent à l'Elysée

Deux femmes sont passées successivement à l’Élysée au cours d’une soirée très éclectique pour l’occupant des lieux. En effet, François Hollande a accueilli, tour à tour, dans son bureau du premier étage du palais présidentiel, Florence Cassez et… Frigide Barjot. Un contraste saisissant et véritablement significatif du rôle que peuvent jouer les médias. Sur les praticables dressés sur la côté gauche du perron, des dizaines de photographes accrédités, des dizaines de caméras officielles et des dizaines de micros étaient en effet présents pour immortaliser ces montées des marches vers le siège du pouvoir républicain. Les deux « vedettes » du jour, accompagnées de délégations, se réclamaient de la « justice » et de la nécessité de la faire passer sur des décisions contraires à ce que l’on doit attendre des valeurs fondatrices du vivre ensemble.
Frigide Barjot veut « devenir une star ». C’est en ces termes que l’animateur Karl Zéro a commenté l’irrésistible ascension médiatique de sa belle-soeur, devenue en quelques semaines l’égérie du mouvement « anti-mariage pour tous ». Une star médiatique, qui use et abuse d’un système complaisant et ravi de trouver une « barjot » pour créer le buzz. Les objectifs de la visite ne sont pas du tout les mêmes que ceux de Florence Cassez. L’une ne cherche que de la reconnaissance portée par l’image et le verbe, alors que l’autre vient témoigner de sa reconnaissance par les mêmes moyens. En franchissant les grilles de l’Élysée, elle sait qu’elle franchit aussi un seuil symbolique. Celui du pouvoir auquel elle aspire à parvenir d’une manière ou d’une autre, avec un réseau d’extrême droite, surtout habile en termes de communication événementielle.
Frigide Barjot a mieux compris que Christine Boutin, Philippe De Villiers ou autres figures ringardisées de la politique française, comment fonctionnait le système médiatique. Elle se rapproche davantage, par sa gouaille et sa capacité à se forger un personnage, de figures comme Nadine Morano ou Marine Le Pen. Elle exploite celles et ceux qu’elle a pris en otage dans des manifestations fourre-tout où l’on trouvait au coude à coude le panel complet de la Droite réactionnaire. A ses côtés, Laurence Tcheng, représentante d’une pseudo aile gauche du collectif la Manif pour tous, et Jean-Pier Delaume-Myard, documentariste qui affiche son homosexualité. Le casting du trio n’a pas été une mince affaire, et le nom de ce dernier, sorte de « caution homo », est sorti in extremis du chapeau. Il s’agissait de remplacer Xavier Bongibault, un des porte-parole du collectif qui avait implicitement comparé Hollande à… Hitler. Bref, un exemple d’accession à la notoriété par l’intolérance et l’injustice… qui ne méritait vraiment pas une demi-heure du temps présidentiel !
Florence Cassez a été ensuite accueillie sur le perron de l’Élysée par la compagne du président, Valérie Trierweiler, qui l’a embrassée. Elle était suivie de plusieurs membres de sa famille, dont ses parents, de son avocat, Frank Berton, et du responsable de son comité de soutien Jean-Luc Roméro (ardent partisan du mariage pour tous). En fait des femmes et des hommes opiniâtres qui se sont battus sans défaillance, solidairement et avec un fort soutien pour une bonne cause des médias, afin que des erreurs manifestes de jugement soient réparées. Ils sont arrivés à ce que la Cour suprême du Mexique reconnaisse enfin « la violation de ses droits fondamentaux » dans la procédure ayant conduit à sa condamnation à 60 ans de prison pour enlèvements. Après plus de 7 ans et un mois d’emprisonnement, exactement 1603 jours, le cauchemar provoqué par le montage policier organisé par les autorités mexicaines à son encontre, le 9 décembre 2005, devant les caméras de télévision, a pris fin. Reçue pendant plus d’une heure, elle n’a fait qu’une brève déclaration : «Je l’ai remercié, bien sûr, et je lui ai expliqué le bonheur que je ressentais aujourd’hui à être ici en France dans mon pays avec mes parents, avec les miens, avec mes amis ».
Cette seconde visite à l’Élysée, beaucoup plus discrète, s’inscrivait dans la réparation d’une véritable injustice enfin réparée, alors que la première, plus caricaturale, contenait au contraire les germes d’une injustice à réparer ! En fait dans les médias, l’impact sera très différent, et surtout, l’exploitation qui sera faite de ces montées des marches élyséennes bien opposées !

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Cette publication a un commentaire

  1. J.J.

    « Frigide Barjot veut « devenir une star ». »

    C’est le genre de créature qui semble ne reculer devant rien et surtout pas le bon sens, la décence et l’honnêteté intellectuelle (enfin parler d’intellectuel à propos de ce personnage me semble être hors sujet…)

    Le tour de chant limite décent ne lui ayant pas semble-t-il pas apporté la notoriété, elle a imaginé ( et elle a fort bien réussi d’ailleurs ) de se recycler dans un rôle de grenouille de bénitier décomplexée, qui ne trompe que ceux qui veulent bien se laisser faire.
    Le trio des organisateurs de la fameuse manif, évoquent irrésistiblement le mariage à trois de la carpe, de la grenouille, et du lapin.
    Alliance patente du sabre et du goupillon, qui s’est adjoint sans être trop regardant un Auguste femelle.
    Mais on sait bien dans ce milieu fermer les yeux sur ce qui pourrait fâcher, à condition que ça rapporte.

    Tartuffe n’est pas mort !

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