Chacun a son idée des vacances, et il arrive d’ailleurs qu’elles ne coïncident pas du tout avec la réalité. Souvent, il faut une période d’adaptation pour passer de la suractivité addictive au calme plat. Et contrairement à ce que l’on pense généralement, c’est une vraie souffrance que celle qui envahit lorsque l’on éprouve l’étrange sensation de ne pas remplir sa mission. Une journée entière, sans aucun rendez-vous inscrit sur son agenda électronique ou papier, met les nerfs à vif, car on a du mal à se rassurer. Pas de contraintes horaires ? Impossible ! C’est un oubli. On doute qu’il n’y ait pas une erreur, un imprévu qui meubleraient le vide que l’on a espéré mais que l’on ne sait plus maîtriser. Une cure de désintoxication à la pression quotidienne peut ainsi durer plusieurs jours. Elle n’est que progressive et non durable, car elle dépend du pouvoir que l’on exerce.
Elle débute à l’heure où l’on se réveille habituellement. On ouvre un œil et on le jette discrètement sur le radio réveil pour s’apercevoir avec étonnement que l’on n’a pas besoin de lui puisque on se réveille sans lui au moment exact où on lui demande d’habitude de nous contraindre à nous lever ! L’avantage principal c’est que l’on tente ensuite de se persuader que justement on n’a pas à le faire ! Se rendormir revêt alors un plaisir particulier et le lit devient le berceau de rêves plus ou moins agréables. Le plus dur arrive dès que l’on a mis le pied droit au sol (le gauche je ne sais pas pourquoi porte malheur dit-on!). A-t-on le droit exceptionnellement de traîner en pyjama ou en peignoir sans se raser ? Cruel dilemme ! Se laisser aller constitue un véritable défi qui ne correspond pas à l’image que l’on tente de donner aux autres chaque jour. Alors, souvent, on se résout souvent à passer par la salle de bains avec un décalage horaire, comme pour confirmer que le temps n’a plus aucune valeur. Tout prend alors, à partir de ce moment là, une autre dimension. Le café, même très tiède, s’avale avec une délectation particulière, car on a la possibilité de le faire durer. S’attarder sur son petit-déjeuner, alors qu’il est devenu au fil des jours un obstacle à l’exactitude qui serait soit-disant la politesse des rois, permet de se sentir encore plus libre. Le premier jour des vacances, on n’arrive pas justement à « donner du temps au temps » car ce serait du gaspillage, alors que ce n’est qu’un vrai plaisir de « riche ! »
Et puis, il arrive le moment fatal : celui où on espère que le téléphone mobile va sonner ou que sur la messagerie mail va arriver le message ! Aussi bizarre que ça puisse paraître, on guette l’appel qui empêchera de faire la faute habituelle : appeler les personnes que l’on voit chaque jour pour leur demander si tout va bien ! On connaît tous des gens qui ne peuvent pas se désaccoutumer de ce cordon ombilical qui les relie à leur existence publique ou professionnelle, quel que soit le lieu où l’on se trouve et la distance qui sépare. Ils appellent pour une futilité ou scrutent en permanence leur écran tactile pour une bonne pioche ! Ils font semblant de donner des nouvelles d’eux-mêmes pour en fait en avoir des autres et se persuader qu’ils leur sont indispensables. Mais lentement, on finit par les oublier autant qu’eux vous oublient. La désintoxication n’est pas facile et doit s’opérer progressivement ce qui suppose une durée suffisante des vacances.
En définitive, la diminution de la pression suffit à donner une vraie valeur au temps. Retrouver un tant soit peu la liberté suffit parfois à combler de plaisir. Refuser, esquiver, faire ce que l’on veut, où l’on veut, comme l’on veut, ne rien faire, ne pas tenir compte des autres, relève vraiment de la véritable satisfaction des vacances. Parfois, c’est très simple : entrer dans un café, s’asseoir, prendre un café et écouter simplement les conversations matinales devient un privilège ! Accepter de consacrer son temps à des futilités devient un luxe ! Regarder tout ce qu’on ne voit plus habituellement tellement on pense que l’essentiel est ailleurs ressemble à un exploit. Et dans le fond, trouver le temps long, sans avoir à regarder sa montre à tout instant pour le découper en tranches utiles, constitue le gage de vacances réussies.
On ne mesure cette réussite que quand la journée est finie, et que l’on éprouve le délicieux sentiment d’avoir été inutile. La durée n’a pas d’importance car l’intensité de ce ressenti suffit à laver le cerveau du pire des ennemis des vacances : l’exigence des autres ! L’évasion de cette prison virtuelle reste un plaisir immense.
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Quelle belle description de ce moment si particulier ou l’on s’extrait pour quelques jours des responsabilités ! J’ai trouvé ce billet et découvert le blog par hasard. Je suis vraiment enchantée par le style et la justesse du propos. Ce blog va devenir ma ré-création du soir. Je ne l’aurais pas imaginé.
Merci à vous pour le bonheur de cette découverte.
Le fou va chercher le bonheur au loin, le sage le cultive à ses pieds. Les cimetières sont remplis de gens indispensables.
Bonsoir Monsieur Darmian,
Girondine depuis peu, j’ai rejoint très vote ma famille PS par laquelle j’ai rencontré avec plaisir votre fille, Marie-Christine. C’est elle qui m’a conseillée de prendre votre attache pour envisager un RDV au cours duquel j’aurais l’occasion de mieux vous présenter mon profil et également vous permettre de mieux me présenter l’échiquier territorio-politico-economico de ce qui est aujourd’hui, après Paris et l’Ile de France, ma métropole.
J’espère que les fêtes se sont passées au mieux pour vous et ceux que vous aimez et j’espère que 2013 sera pour vous une douce année en même temps que d’être le cadre de notre rencontre.
Bien cordialement
Corinne Guillemot