Il vaut mieux éviter de parler de canicule par les temps qui courent et alors que le Président de la République est en vacances. Il n’aura pas l’Océan à traverser pour revenir prendre les mesures face à un accroissement exceptionnel et durable de la température. On sait désormais, depuis 2003, que l’été peut être meurtrier ! Dès que tombe la chape oppressante d’un soleil voulant montrer qu’il n’y a que lui qui mérite le titre de roi de l’univers, la liberté d’aller et venir disparaît. Le paradoxe c’est que la chaleur tant désirée conduit la majorité des gens à la fuir, pour chercher refuge dans les endroits où elle n’exerce pas son diktat. Marcher à l’ombre ne relève pas de la fiction… et prendre le frais ne constitue pas un acte délictueux. Personne cependant n’ose affirmer durant les vacances qu’il s’agit d’un temps de chien.
Sur les plaques chauffantes des plages, les peaux rouges ou blanches se dorent avec la délectation d’affronter les extrêmes. Enduits de crème, nus comme des vers reluisants, transformés en bêtes de somme forcées, les adeptes du bronzer costaud vont au bout de leur logique. Ils doivent ramener de leur combat contre les rayons les preuves de leur courage. En fait, de leur dorure estivale, ils tireront gloire face aux malheureux qui n’ont pas eu le courage ou l’inconscience de s’exposer à la morsure de ce Dieu vénéré par les Égyptiens. En cette période où les cours de l’or s’envolent, la canicule redonne le moral à celles et ceux qui investissent dans la bonne mine de rentrée.
Le bronzage ostentatoire constitue à cet égard un signe extérieur de richesse, particulièrement apprécié dans les pays « avec un ciel si bas qu’un canal s’est perdu, avec un ciel si bas qu’il fait l’humilité, avec un ciel si gris qu’un canal s’est pendu »…. Souvent d’ailleurs, il s’efface aussi vite qu’il a été créé, sauf si l’on utilise des subterfuges destinés à masquer ce qui devient une tenue de deuil hivernale. Ces gens là ont besoin de la canicule pour exister et leur moral se lézarde quand elle ne croise pas leur route des vacances. C’est vrai aussi que beaucoup d’autres perdent leur joie de vivre quand le thermomètre s’affole.
Sur les chantiers, dans les champs ou au sommet des toits, ils cherchent les brûlures de « Monseigneur l’astre solaire ». Pour eux, les bulletins météo ne riment pas toujours avec plaisir annoncé. C’est tout le paradoxe de ces astres miniatures, éclaboussant une carte sur laquelle chacun cherche une raison d’espérer. La canicule ronge le monde, mais nous continuons à espérer qu’elle s’installe durablement sur nos têtes. Nous avons pris l’habitude de considérer que l’essentiel, c’est de pouvoir échapper à la grisaille du quotidien, alors qu’il se situe ailleurs. Les récoltes halètent. Les ressources en eau potable s’amenuisent. Les morts s’accumulent sur la planète. Le monde s’appauvrit de jour en jour. Les céréales deviennent, au cœur de cet été, un enjeu majeur dans la guerre économique qui s’annonce. Et alors, on se foutra pas mal du bronzage des gens vivant sur les apparences, car la réalité deviendra tellement prégnante qu’elle deviendra angoissante.
La chaleur écrasante étouffe inexorablement la planète. Les hommes ouvrent la porte de leurs cimetières au soleil assassin, vénérant justement les effets qui causent leur perte. Toutes les civilisations qui ont adoré inconsciemment l’astre divin et qui ont tenté de lui substituer l’or, ont sombré dans la cupidité et l’irrationnel. Elles ont plongé dans l’obscurité de l’histoire de l’Humanité après avoir cru leur rayonnement éternel. Chaque jour de canicule, nous revenons à cette réalité, en appréciant particulièrement la fraîcheur quand la lune est venue. Je me demande souvent si, dans la canicule, le meilleur n’est pas justement le moment où elle n’est plus là… Ayant parfois cherché à la fuir durant toute la journée après l’avoir espéré, les « estivants » cherchent à se rassurer en écoutant les météorologues leur annoncer que l’anticyclone des Açores leur fait la bonté de venir camper au-dessus de leurs têtes. La rentabilisation des efforts financiers consentis pour que les vacances soient réussies a pris le pas sur toute autre considération : la canicule est un dû !
« Monseigneur l’astre solaire
Comm’ je n’l’admir’ pas beaucoup
M’enlèv’ son feu, oui mais, d’son feu, moi j’m’en fous… »
J’ai simplement rendez-vous avec… le plaisir de passer plutôt une nuit de paradis à la belle étoile que de rôtir dans l’enfer surchauffé d’une journée. Vivre dans l’ombre d’un tilleul ou sur les rives verdoyantes d’un ruisseau quand tout « brûle » autour de vous, c’est probablement la recette du bonheur estival ! Savourez…
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Le jardin a soif, même les arbres commencent à avoir soif…
Alors j’arrose, tous les soirs, mais ça ne remplacera jamais la pluie bienfaisante…
Les « Monsieur Météo », tout contents de nous annoncer « le retour, enfin, de l’anticyclone des Açores », ne s’occupent que des vacanciers!!! Nous et nos récoltes, on peut crever…
Mais les mêmes qui célèbrent aujourd’hui ce Dieu-soleil sur les plages feront la gueule à la rentrée quand les prix du pain et de la viande vont augmenter, vu que les céréales ont grillées sur pied!!!!
« Je veux tout! » est le mot d’ordre de notre époque….
C’est vrai, tous les soirs j’enrage (j’ai bien tort, j’ ai qu’à ne pas regarder la télé !) en entendant le présentateur de la météo, soit se réjouir du soleil venir, soit en se lamentant sur la venue (problématique) d’une averse, bref du mauvais temps!
Il nous faudrait bien sûr tout le contraire.
Ils ont oublié la chanson :
« Le jour où la pluie viendra
Nous serons, toi et moi
Les plus riches du monde … »
De te toutes façon , moi je m’en fous (comme Georges), comble du mauvais goût, au jardin je bronze « Marcel » !
Oui, un temps de chien,
doublement subi par qques uns d’entre nous qui ne peuvent y échapper,
dont les hospitalisés, les SDF, les prisonniers