A l’Elysée, on a mis sur la porte d’entrée une affichette que peu d’autres lieux peuvent installer en France : « ici on embauche ! » Rassurez-vous, le Chef de l’Etat français n’aura pas recours au Pôle emploi qui est actuellement totalement incapable de fournir une réponse favorable à une seul demandeur d’emploi. Il y a même fort à parier que début 2011 avec la coupe sombre dans les aides aux personnes au chômage depuis trop longtemps, le RSA va constituer (au frais des Conseils généraux) le seul recours pour des dizaines de milliers de personnes de tous les âges. Mais, dans le palais de la République chancelante, le « maître des lieux » recherche un « collaborateur ». Dans ce genre, il a déjà… Besson, « collabo » de première, mais ce n’est pas ce genre qui doit postuler puisque les prétendants sont nombreux pour occuper un strapontin. Il lui faut un véritable « collaborateur » au sens présidentiel du poste, c’est à dire un homme de paille, capable de se plier sans rompre aux diktats venus du château.
On tente de trouver une solution pour faire du neuf avec de l’usagé jusqu’au trognon. Plus d’argent dans les caisses, au point de ne plus pouvoir assumer ses fonctions régaliennes, un déficit dont tout le monde sait que, tant que l’on n’aura pas remis de l’ordre dans les recettes fiscales, il restera abyssal, un parti majoritaire qui se planque derrière tous les épouvantails possibles pour affoler l’opinion, des élus locaux qui se préparent à affronter les élections cantonales en dissimulant leur soutien à un Président impopulaire, et une France démantibulée par des réformes réactionnaires, néfastes pour le quotidien de gens désabusés. Le président hésite donc et tout le pays devrait s’extasier devant ce dilemme shakespearien alors qu’il n’intéresse que les médias qui vendent de la mauvaise soupe, préparée dans les mauvaises boîtes à informer gouvernementales.
Faut-il transformer Fillon en martyr du Sarkozisme, et le laisser dans la fosse aux lions afin qu’il obtienne un jour la sanctification des sondages, ou faut-il faire appel à un ex-avocat d’affaires, susceptible de ne sauver que les apparences ? Jean Louis Borloo, dont on oublie qu’il fut l’un des mieux payés au monde parmi les avocats des accords entre entreprises du CAC 40 (c’est vrai qu’il fut maoïste), a le profil idéal du mec pouvant faire prendre des vessies pour des lanternes, puisqu’il a été le pote de Bernard Tapie. Il fut même président d’un club de football professionnel, ce qui démontre un sens inné des transferts réussis et plus encore des matches perdus d’avance. Avouez que si vous aviez à opter pour une solution ou pour l’autre vous auriez un mauvais week-end devant vous…
L’un, c’est la mort du « Président », à petit feu, étouffé par les positions faussement rigoureuses d’un rival n’ayant jamais, antérieurement, constitué le moindre obstacle aux volontés idéologiques du clan sarkoziste. L’autre, c’est l’accentuation garantie du décalage entre un Président détesté et un homme habile en matière de communication (il a des potes dans tous les grands médias, sans forcément en connaître les patrons, amis intéressés de l’occupant de l’Elysée). C’est quasiment le fameux choix des rois entre la peste et le choléra ! En fait, il y aura aussi des dégâts collatéraux : maintenir Fillon, c’est renforcer la droite la plus rigide de cette UMP à laquelle plus personne ne veut appartenir lors d’une élection (vous verrez, en Gironde, aux cantonales, pas un seul candidat n’arborera le sigle de son cœur, et pas un seul candidat ne soutiendra la réforme des retraites) et valoriser les « racolés ». Maintenir Fillon, c’est se tirer une balle dans le pied, en accentuant cette dérive vers l’extrême droite qui risque de coûter cher en 2012, car Marine Le Pen n’aura qu’à tirer les marrons du feu… A l’Elysée, il est fort probable que le succès du « Tea party » aux élections américaines devrait donner à réfléchir, car les conditions seront réunies en 2012 pour que ce genre de « poujadisme » ressorte du ventre fécond du monstre de l’apolitisme organisé. Certes chez nous, les « apéros facebook » ont été réglementés, mais il est fort possible qu’émerge dans les prochains mois un mouvement hétéroclite regroupant toutes les oppositions à tout et n’importe quoi, prônant le retour aux fondamentaux d’une société basée sur la « croyance » sous toutes ses formes. Le sarkozisme s’appuie déjà sur l’idée fondamentale transversale et incontournable du « Tea Party » qui n’est que le parti du contre. Contre, comme « Je suis contre tout ce qui prélève des impôts ». En rejoignant le Tea Party, on veut protéger les libertés américaines de Washington, qui semble vouloir, comme en Europe, tout réglementer. Éclaté en plusieurs factions sur tout le territoire, mais dont la devise commune serait « Moins de taxes, moins de gouvernement », il constitue le fondement de la politique sarkoziste, destinée à privatiser toute la solidarité étatique républicaine.
Borloo n’ira pas si loin, mais laissera forcément la voie libre à cette contestation populiste incontrôlable, car reposant sur le concept d’opinion dominante non exprimée. Fillon, lui, va l’officialiser pour pouvoir la contrôler, mais en se mettant à dos une bonne part de l’électorat centriste, apeuré par cette destruction systématique des repères du fonctionnement social. 2012 pourrait voir le retour en tête d’un FN patchwork dont les idées auront été banalisées par une avalanche de certitudes prêtes à penser, livrées via la télé !
La responsabilité de ceux qui auront accrédité, à droite comme à gauche, que la confrontation idéologique pure était dépassée ont joué aux apprentis sorciers. La stigmatisation du militantisme politique, les attaques incessantes des élus du suffrage universel, le mépris ostentatoire à l’égard des politiques, les promesses électoralistes sans lendemain, la contradiction permanente entre les visions parisiennes et locales, la crise non résolue, feront que vous risquez bien de voir la démocratie intelligente et raisonnable boire la tasse. Avec Fillon de chêne ou avec Borloo primeur. Peu importe ! Le mal est fait.
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Franchement, Jean Marie, « Fillon vieilli, ou Borloo primeur », c’est tout à fait « bonnet blanc et blanc bonnet »…Comme l’aurait dit mon grand père, du fond de sa campagne » foutu l’un, foutu l’autre »….ou encore « dindon, cochon, c’est tout de la volaille…. ».Bref, il n’y en a pas un pour racheter l’autre, et la seule perspective envisageable, c’est de virer tout ce monde puant, et de trouver des dirigeants capables de nous redonner l’espoir.
Tu as raison, Jean-Marie, la confrontation idéologique n’est pas dépassée. Au contraire, elle doit redevenir d’actualité. Compte-tenu des enjeux politiques, économiques et sociaux, nous devons à nouveau cliver: les français doivent comprendre qu’il y a de vrais choix à faire pour de véritables alternatives (et pas simplement alternances).