La ronde des vœux communaux officiels présentés par les élus aux populations constitue un véritable révélateur de la réalité sociale. Le périple vaut tous els sondages et toutes les émissions de télé. J’ai déjà une douzaine de rencontres de ce type à mon actif en une semaine et le bilan est extrêmement significatif. D’abord il y a beaucoup plus de monde qu’antérieurement dans les manifestations et notamment une présence accrue des jeunes générations comme s’il y avait un renouveau incontestable de la volonté de partager à moins que ce soit un besoin grégaire de se retrouver.
Cette affluence nettement supérieure à celle des années passées porte un espoir de voir la vie des villages redevenir plus conviviale et surtout de voir renaître la notion fondamentale d’intérêt pour la proximité. On perçoit donc un réel plaisir pour les maires à s’exprimer devant des citoyennes et des citoyens attentifs car ils savent que ce sera rarement le cas au cours des prochains mois!
Les vœux constituent finalement une opportunité de renouer un dialogue distendu par une crise de méfiance vis à vis du « national ». Cette information en direct sans un filtre médiatique déformant devient en effet prépondérante tant il existe un décalage entre la perception des enjeux locaux et celle des annonces nationales. En tant que conseiller général je n’aurai probablement plus, par exemple, le loisir d’expliciter l’importance du Département dans ce que le Président de la République appelle le mille feuilles institutionnel. On annonce la disparition certaine de cette institution sans que jamais les élus aient l’occasion de défendre leur point de vue. Il est pourtant délicat un jour de fête de raser l’auditoire en argumentant sur la « compétence générale » mais, ne pas l’évoquer à l’aube de 2009, c’est tout simplement baisser les bras face à des fossoyeurs de la proximité ! Il est vrai aussi que, dans ces manifestations, dès que vous avancez une vision politique du contexte actuel vous constatez que les regards se baissent comme s’il s’agissait de « gros mots » décalés avec la présentation traditionnelle des « bons vœux ». La période de naissance des « bonnanés », sortes de créatures utopiques bienfaisantes, ne souffre pas la mesquinerie de propos brisant l’ambiance festive… Le parler vrai gâche l’atmosphère qui se veut avant tout rassurante. « Ne vous inuqiétez pas : tout va bien! »
Or il faut bien ne pas savoir dissimuler la difficulté des échéances de 2009 ! Tout le monde le prévoit mais personne ne veut trop le croire et vient chercher matière à se rassurer dans un groupe connu.
Il est donc de bon ton d’être optimiste, résolument optimiste, irréversiblement optimiste. La crise ? Quelle crise ? Rassurez-vous braves gens, nous lui tordrons le cou avec nos petits bras musclés ! Nous sommes là pour vous annoncer que demain ne sera pas pire qu’aujourd’hui ! La méthode Coué me paraît progresser comme devenant, dans le fond, la solution la plus appropriée aux maux de cette époque que tout le monde reconnaît comme incertaine mais dont on tente de se dissimuler les conséquences.
J’ai peur d’une forte désillusion quand je vois annoncer des « impôts stables », des « investissements multiples », des « aménagements divers » et l’annonce d’une politique municipale audacieuse. Pourvu que l’an prochain ces effets d’annonce n’aient pas été douchés par des mesures gouvernementales drastiques… On constaterait alors que le temps des vœux ressemble étrangement à celui qui voit les groupes d’autruches se mettre la tête dans le sable quand arrive le vent mauvais d’à travers le désert !
Cette semaine, de là-haut, loin de cette France angoissée, vont pleuvoir les promesses, les engagements solennels, les évidences érigées en certitudes, les mesures non suivies des faits… On appellera ça « les vœux aux corps constitués » ! Une manière comme une autre de vendre un élixir de jouvence dont on ne connaît l’inefficacité… mais dont on espère un effet placébo positif !
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