Intervention à Medellin au nom de la France des villes cyclables

6° Rencontres de « Red de las ciclovias recreativas de las Americas »

Allocution prononcée aujourd’hui à Médellin comme
Président du Club des villes et territoires cyclables (France)

Monsieur le Maire de Medellin,
Mesdames, Messieurs les Maires et élus des villes d’Amérique du Sud, d’Amérique centrale et d’Amérique du Nord,
Monsieur le Maire de Séville,
Monsieur l’Ambassadeur de France,
Mesdames, Messieurs les ambassadeurs honorifiques du Réseau des CRA,
Mesdames, Messieurs les chercheurs,
Mesdames, Messieurs.

C’est un grand honneur pour le Président du réseau des villes et territoires cyclables français d’être parmi vous aujourd’hui et d’être convié au rang d’ambassadeur honorifique de votre réseau des Rues à vivre des Amériques ! C’est aussi un immense plaisir tant les présentations et des débats de ces 6èmes Rencontres du réseau CRA s’annoncent riches et, j’en suis convaincu, nourriront nos réflexions en France et en Europe en ouvrant des voies innovantes, en élargissant les horizons de nos actions et en tissant des liens forts et très stimulants. Nous avons toujours à apprendre des autres !

Assurément, il se passe quelque chose autour du vélo dans le monde !
Autour du vélo et de la marche !
Autour des modes doux de déplacement !
Des politiques publiques se structurent, au niveau national et au niveau local, en faveur de la mobilité active dans un grand nombre de pays et de villes.
Les entrées sont multiples : ici on privilégie la modération de la circulation motorisée afin de lutter contre la pollution atmosphérique, là on fait la promotion de l’activité physique. Ici on défend les alternatives au tout automobile et on encourage toutes les mobilités non motorisées, là on organise de vastes événements sur l’espace public où se retrouvent tous les usagers de la rue, de tous âges et pour toutes sortes d’activités…
Toutes ces politiques ont en commun de réaffirmer l’importance de l’espace public et du vivre-ensemble. La rue n’est plus un tuyau qui écoule des voitures mais un espace de vie collective où tous les modes de déplacement ont leur place. Et c’est le regard que nous portons sur la vie en ville qui se trouve ainsi modifié ! C’est le vivre ensemble qui s’en trouve impacté ! C’est la conception même de la vie sociale qui est repensée !
La tâche est délicate car il s’agit de composer avec beaucoup d’exigences parfois contradictoires, avec la vitesse et la lenteur, avec le mouvement et le séjour, avec le « sérieux » et le festif, avec la liberté et la sécurité…
L’espace public, ce bien commun, est en effet un élément intégrateur de plusieurs éléments : les déplacements, la vie locale, l’ambiance, les usages. C’est souvent une gageure que de prendre en compte tous ces attributs, sans primauté de l’un sur tous les autres.
Le vélo, la marche sont des vecteurs essentiels du renouvellement des politiques publiques d’aménagement urbain et de mobilité. Il s’agit – vraiment ! – d’inscrire nos espaces publics dans une perspective de développement urbain durable. De développement socialement durable ! Oui la mobilité est le ferment d’une révolution des mentalités.

La diversité des approches des aménageurs et des élus, qui s’inscrit dans l’histoire de chaque ville et dans la culture de chaque pays, est un atout. La dimension identitaire des projets et des politiques publiques est très forte mais nous avons aussi en commun des enjeux essentiels :
l’insertion sociale,
la lutte contre la sédentarité et l’épidémie d’obésité,
la préservation de l’environnement,
la qualité de la vie collective

Autre signe fort qu’on retrouve dans nos différents pays : l’opinion publique y est souvent en avance sur l’opinion des décideurs.
L’acceptabilité de ces politiques en faveur de la mobilité active et d’une réappropriation de l’espace public y est forte. En outre, l’avènement des technologies de l’information et de la communication a créé un imaginaire favorable pour l’encouragement de la mobilité active et de nouveaux usages de l’espace public. Profitons-en !
Au Club français des villes et territoires cyclables, nous sommes toutefois convaincus qu’avoir raison ne suffit pas. Autrement dit que le développement du vélo et de la mobilité active ne peut compter que sur leurs atouts évidents mais que nous devons chercher de nouvelles combinaisons, de nouveaux projets, des partenariats innovants pour assurer un fort déploiement des bonnes pratiques et un véritable changement d’échelle des projets.
De la même manière, nous sommes persuadés que c’est grâce à la coopération, l’échange et au partage d’expériences que nous progresserons et enrichirons nos actions..
Aussi avons-nous la grande satisfaction de constater que cette conviction est partagée puisque ces 6èmes Rencontres de votre réseau constituent l’occasion de sceller un accord de coopération entre notre réseau qui rassemble aujourd’hui plus de 1100 collectivités françaises – et quelques villes de Belgique et du Luxembourg – et le réseau des rues à vivre des Amériques.
Nos visions communes seront ainsi renforcées par la diversité des approches et des modalités de mises en œuvre des politiques publiques de partage de l’espace public et d’encouragement de la mobilité active.
Après l’accord de coopération que nous avons eu le plaisir de conclure en mars dernier, à Séville, à l’occasion de l’Assemblée générale du réseau des villes espagnoles pour la bicyclette, avec le réseau des Villes actives déployé par « Vélo Québec » (Canada – 16 régions qui regroupent une soixantaine de municipalités), le Bicycle Friendly Communities (programme coordonné par la League of American Bicyclists qui représente 450 villes américaines) et le Red de Ciudades por la Bicicleta (Espagne) qui rassemble plus de 100 municipalités, opérateurs de transport et circonscriptions espagnoles, nous sommes très heureux de la perspective de renforcer cette volonté commune de travailler solidairement pour la promotion de la mobilité active et le vivre ensemble !
En rejoignant un formidable mouvement qui réunit des villes d’Amérique du Sud, d’Amérique centrale et d’Amérique du Nord nous avons conscience d’avoir une chance unique de construire un monde meilleur pour les plus humbles.
Autant de porteurs d’énergie qui, inspirés de la mobilisation exemplaire des villes de Curitiba, de Bogota, de Medellin qui ont fait des politiques de mobilité le cœur du renouvellement urbain, et qui vont donc renforcer la conviction et la mobilisation des villes européennes.
A la mesure d’innovations emblématiques comme le fameux Bus Rapid Transit (BRT) de Curitiba, comme le Transmilenio de Bogota, qui ont inspiré il y a une vingtaine d’années les villes nord-américaines comme Los Angeles avec son « Orange line » puis les villes européennes (nous disons BHNS chez nous pour Bus à haut niveau de service), cet accord doit nous inciter à rebondir sur des changements de modèles et de nouvelles options comme autant de réponses à la crise économique mondiale. A faire de nécessité vertu !
Au Club des villes et territoires cyclables, nous pensons que l’intelligence collective est un carburant puissant. Et que plus que jamais l’avenir a besoin du vélo !
Cette coopération entre nos réseaux doit renforcer notre conviction que, malgré la conjoncture, les difficultés économiques croissantes, nous pouvons piloter notre développement. Ne pas subir mais agir ! Ne pas attendre mais avancer ! Ne pas nous résigner mais nous indigner pour ne pas laisser sur le bord de la route les plus fragiles, les plus vulnérables.
Les politiques en faveur de la mobilité active constituent une autre façon de pratiquer et de partager la ville. Parce que l’implication des citadins est le socle de ces réalisations.
Plus que jamais, l’avenir ne peut se passer de la mobilité active et de l’énergie des citoyens des villes !

Permettez-moi de citer ces vers de Pablo Neruda dont les maisons chiliennes m’ont conquis lors de deux voyages sur ses traces dans un pays qui m’est devenu très cher :

« Il meurt lentement
Celui qui devient l’esclave de l’habitude
(…)
Celui qui ne prend pas de risques
Pour réaliser ses rêves ».

Prenons le risque de développer une autre forme de la vie collective. Faisons le rêve d’une ville respectueuse, vivante, citoyenne et finalement redonnée aux hommes. Cassons les habitudes pour que tous les cyclistes du monde améliorent leur santé, préservent la santé des autres et cultivent un nouvel art du partage !
Nous aurons le plaisir de nombreux échanges et rencontres mais je prends d’ores et déjà date pour une réunion de nos réseaux l’an prochain à Paris à l’occasion du Salon européen de la mobilité où nous avons déjà eu l’occasion d’accueillir Ricardo Montezuma, mais aussi et surtout pour un grand rendez-vous auquel nous souhaitons donner dorénavant une forte dimension internationale : le prochain congrès des villes et territoires cyclables à Nice en 2013 !

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