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Doit-on regretter toutes ses rencontres ?

L’ancien président du Burkina Faso, Blaise Compaoré, a été condamné par contumace à la prison à perpétuité pour sa participation à l’assassinat de son prédécesseur Thomas Sankara. Le commandant de sa garde Hyacinthe Kafando et le général Gilbert Diendéré, un des chefs de l’armée lors du putsch de 1987, ont également écopé de la prison à vie. Il aura fallu plusieurs années d’instruction, l’audition de plus de 110 témoins et 6 mois d’audience pour en arriver à ce jour…34 ans après les faits. Aucune circonstance atténuante n’a été retenue pour ces trois accusés, reconnus coupables d’« atteinte à la sécurité de l’État », de « complicité d’assassinat » et de « recel de cadavre ». Ils perdent également toutes leurs distinctions militaires. Les hasards de la vie ont fait que j’ai pu échangeren 1997 avec celui qui fut un chef craint du « pays des hommes intègres » mais qui n’avait pas la conscience tranquille.  Les circonstances de cette rencontre furent rocambolesques. Et nonobstant sa condamnation dans un acte qui lui a permis en trahissant son compagnon d’armes d’accéder au pouvoir, elles illustrent le contexte des pouvoirs africains.

Élu à la mairie de Créon depuis un peu plus de deux ans, je n’avais pas en effet le recul suffisant pour apprécier le contexte d’une visite protocolaire. J’ignorais tout en effet de la venue de Compaoré en France. Pas une ligne dans la presse et pas une image à la télévision. Un coup de fil de la personne ayant en charge la coopération internationale au conseil départemental m’apprit donc que le Chef d’État était pour quelques jours en voyage strictement privé et qu’il serait utile que je puisse le rencontrer.

Tout l’hôtel quatre étoiles de Camiac à trois kilomètres du centre de Créon avait été loué pour la circonstance. Isolé dans la nature, éloigné des routes fréquentées, confortable et discret il accueillait le couple présidentiel avec une grande partie de l’équipe du Palais de Kosyam. Pas une information officielle n’était parvenue en Mairie. Aucun signe d’une agitation particulière. Il me fut demandé le secret absolu. Créon ayant un jumelage historique avec Saponé, gros village assez proche d’Ouagadougou il me fut fortement conseillé de ne pas refuser une invitation qui m’impressionnait.

Quelques heures plus tard une nouvelle communication téléphonique m’indiqua que je serai attendu au château Camaic, seul le dimanche à midi. Encore une fois la confidentialité la plus stricte me fut demandée. En effet la raison de la présence de Blaise Campaoré -en 1997- n’avait rien à voir avec les relations internationales. J’appris en effet que son épouse ivoirienne était à l’origine du déplacement. Elle voulait se rendre en effet en pèlerinage à… Lourdes. Pour des raisons de politiques intérieures (ne pas froisser les musulmans déjà !) il lui avait été interdit d’effectuer le voyage de manière ostentatoire . Pas question d’être hébergée dans la ville mariale et même dans les environs. Le choix s’était porté sur le Créonnais, hors de Bordeaux de telle manière que le déplacement ultra-confidentiel puisse se construire aisément. Rétrospectivement je mesure combien ces précautions étaient révélatrices d’une analyse d’un équilibre religieux fragile.

En me rendant au Burkina quelques années plus tard (2005) j’ai pu constater la montée indéniable des tensions avec un islam porté par des imams venus de Libye. Jamais on ne sut le motif de ce déplacement protégé par la seule sécurité du Président burkinabé. Comment pouvais-je savoir que cet épisode serait révélateur des problèmes qui guettaient déà l’Afrique? J’avoue ne pas avoir eu une réticence à accepter cette visite en raison de l’assassinat de Sankara dont je ne possédais pas toutes les données. 

J’arrivais à l’heure. Je fus accueilli par l’aide de camp qui m’indiqua que « le Président allait me recevoir ». Son épouse étant parti à l’aube… il prit son temps puisque je ne fus reçu en tête à tête dans un salon de l’hôtel privatisé par un « marchand de bière », que vers quatorze heures. Je n’en menais pas large. Le dialogue se noua très vite. Dès que je lui eus précisé que je touchais au journalisme sportif et notamment au football, la convivialité s’installa. Il était intarissable (il avait été international universitaire et militaire de football, de volley-ball et de basket) comme si le fait de sortir des conversations officielles le soulageait.

L’organisation par son pays quelques mois plus tard de la Coupe d’Afrique des Nations le préoccupait. Il espérait que son équipe nationale ferait des étincelles pour justement fédérer le Burkina qui était composé d’ethnies différentes encore très puissantes et surtout de tenter de faire oublier les circonstances de son accession au pouvoir. Lors de la discussion je lui avais fait part de l’isolement de Saponé seulement desservi par une piste en très mauvais. Il me promit de s’y intéresser. Parole en l’air ? 

En 2005 en arrivant dans ce village par une route goudronnée qui avait été construite jusqu’à l’entrée du bourg et s’arrêtait net sans le traverser, je fus accueilli avec grand respect car tout le monde se demandait par quel miracle j’avais obtenu ce ruban de goudron. J’eus du mal à expliquer que le football y était probablement pour beaucoup. Du coup le chef mossi de Saponé me sollicita pour savoir si je pouvais solliciter l’arrivée de l’électricité… Vingt-cinq ans plus tard je ne sais que penser.

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Cet article a 4 commentaires

  1. Jouvet Fabienne

    Peut être que si ont acte une part d’ombre en chaque gens « bien »…
    Peut être que l’inverse est vrai?… qu’il n’est pas possible d’être que « mauvais », que même chez les plus mauvais, il existe un petit bout de « bien » qui fait de la résistance…

  2. facon jf

    Ma précédente réponse s’est perdue dans les tuyaux du site et je ne peux pas la reposter pour cause de doublon… Pas grave ça fera des vacances!

  3. Bernie

    Bonjour Fabienne,
    Je ne regrette pas de t’avoir rencontré
    à Bordeaux, il y a plus de 10 ans déjà.
    Je t’avais payé le restaurant d’entreprise et ensuite nous sommes
    s allées faire un petit tour en ville.

    Je trouve tout de même anormal que le petit enfant paie l’ehpad pour la grand-mère pauvre. Le petit enfant classé salarié pauvre.

  4. Bernie

    Suite de mon précédent message perdu dans les tuyau du site.
    Ce petit enfant pauvre est le père d’une fillette âgée de 9 ans. Il m’a toujours dit qu’il voulait réussir pour sa fille.

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