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Ils ne fument pas, ils ne draguent plus mais ils boivent et ils causent

Chaque mercredi le cercle des rumeurs démenties s’élargit davantage au fil de la matinée au Bistrot des Copains. D’un trio il peut finir au moment de la dislocation des membres fondateurs à une bonne dizaine de membres de l’assistance. Des décennies de partage de la vie locale se conjuguent, s’ajoutent, se révèlent. Une sorte d’auberge espagnole où chacun vient avec ses informations, ses convictions et ses préoccupations. Vu l’âge moyen de l’assistance la santé des uns et des autres constitue la priorité. Un retard, une absence nécessitent un mot d’excuse présenté par celui qui possède les raisons de ce manquement à la réunion devenu depuis quelques années, statutaire.

Lentement se construit la pyramide des échanges autour d’une actualité mondiale, nationale et surtout locale. Les confidences se font à voix basse tant que sur la table ne sont alignées que les tasses à café. Elles ne gardent leur statut que peu de temps lorsque les tournées kir-blanc-rosé se succèden selon un rituel bien établi. Il faut dire que certains des participants ne viennent que pour recueillir quelques bribes de nouvelles inédites afin d’alimenter leur stock nécessaire pour tenir une semaine dans leur milieu familial ou professionnel quand d’autres tiennent séance avec assiduité.

En fait l’agrégat des participants est à géométrie variable. Autour du noyau originel de la « coopérative du PMU (Paris Modérément Utilitaire) », institution réellement à but non-lucratif, les copains des uns et des autres s’installent pour picorer quelques le contenu des conversations. Les apports sont variés mais toujours empreints de ce souci d’échanger avec les autres. La découverte d’un restaurant, une escapade familiale, les soucis professionnels, les commentaires sur les clubs sportifs phares, l’élagage des arbres de la voisine, la détérioration de la chaussée en tel ou tel point de la commune, les incidents de la vie quotidienne familiale, les arrivées éventuelle de pétrole en solde au supermarché, les décisions municpales, le prix du gazole, le nombre de palombes prélevées, évolution de la politique nationale selon CNews les nouvelles du Blayais…  : il n’y aucun répit et aucun interdit ! Malgré le vin de « messe » rien n’est parole d’évangile! 

Les langues se délient et le ton monte à l’approche de midi et si l’amitié prend le quart il arrive parfois que le modérateur ait bien de la peine à maîtriser la situation. Presque autant que le patron qui tente de savoir qui paye les verres qui se succèdent ou qui s’accumulent avec l’arrivée de nouveaux débatteurs. Il lui faut ajuster sans cesse le montant de la note et s’illustrer dans un sketch de la note du restaurant de Muriel Robin. C’est la rançon de la mise en œuvre de « tournées » beaucoup plus nombreuses que celles effectuées par La Poste sur certaine secteurs du Créonnais.

Au passage les saluts le plus souvent républicains permettent de vérifier que tout le monde est au rendez-vous même si tous ne participent pas à l’assemblée populaire et parfois aussi, il n’est pas inutile de le signaler, un tantinet populiste. La solidarité joue à plein. Un commerçant réfugié climatique en ce mercredi pluvieux dépose sur la table du cercle en migrant vers le comptoir, une série réconfortante de tranches de saucisse seiche. Elles ne tiennent pas plus longtemps que les grains de blé lancés à la volée dans un poulailler. Leur « sécheresse » louée par tout le monde justifie une rasade plus rapide que les autres.

La matinée s’écoule dans une bulle hors du temps. Après avoir été rassurés sur la qualité et la quantité de la récolte en cours de vinification au château Landereau fournisseur exclusif de ce rassemblement, les leveurs de coude de la table rectangulaire prévoient les « tournois » ultérieurs. Ils n’y partiront pas sans vivres. Chaque mercredi, l’annonce du tableau de chasse de l’un d’entre eux spécialiste de la régulation de la population pléthorique de sangliers permet en effet de s’assurer que les rôtis, les cuissots, les longes de sangliers ne manqueront pas. Les congélateurs affichent complet. Les promesses de « brunch » à la Créonnaise ravissent le cercle qui a son cuisinier attitré fin connaisseur du monde des poulets.

Aucun angélisme pour autant dans cette docte assemblée ayant fixé ses propres lois du marché. Nul n’ignore que l’avenir n’appartient plus à chacun d’entre eux puisqu’un seul des invités est actif et que les autres émargent à une pension. J’avoue cependant que « des bateaux j’en ai pris beaucoup,mais le seul qu’ait tenu le coup, qui n’ai jamais viré de bord (…) navigue en père peinard sur la grand-mare des canards (…) s’appelle les copains d’abord ». Certes le terme générique « copains » n’est plus de leur âge mais il convient à leur bande s’offrant une cure de jouvence hebdomadaire. Ils ne fument pas, ils ne draguent plus, mais… ils causent  ! D’aucuns diraient qu’ils boivent. Mais c’est toujours avec modération. Enfin selon eux ! 

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Cet article a 6 commentaires

  1. christian grené

    Bonjour à tou(te)s!
    Et si vous avez trouvé le p’tit dèj’ un peu court, procurez-vous le petit livre intitulé « Si le Bistrot des Copains m’étair coné ». Textes et photos de la collection Jean-Marie Darmian.
    Ad’taleur

    1. christian grené

      Muchas gracias, Laura mia. Es un error de bulto. La subsana por favor y buenas dias!

  2. Laure Garralaga Lataste

    @ à Christian

    … ne serait ce pas « … m’était conté  » ?

  3. Laure Garralaga Lataste

    Inviter notre ami Georges de bon matin est promesse d’une belle et bonne journée…

  4. Bernie

    Oh merci pour votre intrusion.
    Le retour sur le passé n’est qu’un souvenir.
    Nous sommes en novembre 2021 et nous avons besoin d’informations sur la forêt landaise qui selon mes lectures seraient la plus grande d’Europe. Le tourisme me fait basculer à l’envers.

  5. Pierre Lascourreges

    Pour les nouvelles du Blayais, n’hésitez pas, vous pourrez compter sur moi

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