L’ouverture c’est l’ouverture ! La plus joliment décrite reste pour moi celle de « la Gloire de mon père » avec les préparatifs méticuleux du père de Marcel afin de partir réaliser son fait d’armes exceptionnel du doublé de bartavelles. Durant les vacances la chasse n’a pas encore débuté mais on parle beaucoup « d’ouverture ». Elle est même prévue pour ce soir. Toutes les tenues ont été renouvelées, les grands espaces ont été soigneusement entretenus, le matériel a été révisé et l’espoir d’un retour glorieux anime tous les cœurs vaillants.
En bandes organisées ou spontanées on va voir déambuler aux abords des stades, le supporteur estival. Casquette plus ou moins actualisée selon le fétichisme de celle ou celui qui la porte, maillot dernier cri ou « historique », corne de brume au cas où le soleil disparaîtrait, drapeaux en bandoulière et parfois un verre de bière échantillon en mains, le fan de football retrouve le chemin de sa passion. Comme le campeur impénitent il a sa place réservée parfois depuis plusieurs années et ses voisins attitrés avec lesquels ils commentera les réussites ou les échecs de ses favoris. Il a interrompu ses vacances afin de ne pas manquer l’ouverture surtout quand elle a lieu près de chez lui. Il a abandonné les potes ou la famille ou les apéros (ou les trois) pour hurler son soutien ou sa désapprobation dans une enceinte fleurant la crème solaire. Ces fans à tics au visage parfois peints comme celui des indiens sur le sentier de la guerre gèrent leurs congés en fonction du calendrier défini par un ordinateur tributaire des desiderata des télévisions canal historique ou qatarienne conquérante. Il ne saurait y a avoir pour eux d’été sans football et des premières sensations sur les saisons qui vont suivre. Une mauvaise impression ne pardonne guère pour la suite puisque souvent le passé de l’inconditionnel se conjugue avec les infidélités qu’il a faites ses idoles. Mais l’ouverture ne se manque sous aucun prétexte. Elle se prépare avec la lecture du manuel France Football ou du bréviaire quotidien « L’Equipe ». On ne songe qu’aux filets garnis pour l’adversaire dans cette catégorie de tireurs des litres qui attendent des prouesses de la part des tireurs d’élite enrégimentés au cours de l’été !
Le supporter appellation d’origine contrôlée a ses critères en matière de stratégie et d’agencement des ingrédients mis à la disposition du chargé de la tambouille quotidienne (nommé staff technique dans le jargon) par un riche producteur. Il ne vit que pour le foot, par le foot et avec le foot qu’il s’injecte devant le petit écran quand il est en manque de spectacle particulier. Il lui arrive de voyager pour découvrir des villes dont l’attrait touristique est limité à un rectangle vert grillagé entouré de gradins dans lesquels il sera installé selon ses moyens financiers. Il ira alors, se considérant comme privilégié, soutenir de la voix et du geste des millionnaires voire des multi-millionnaires s’affrontant entre eux ou prêts à se jouer d’équipes de morts de faim dans une Europe de la concurrence réputée libre et non faussée.
Cette ouverture c’est aussi celle des occasionnels bénéficiant d’une carte provisoire pour invités à une soirée de gala. Ils arrivent indifférents de la plage, descendent de la montagne ou fuient le gîte de campagne pour venir découvrir un stade neuf. Dans le fond pour eux le flacon a plus d’importance que l’ivresse de la victoire dont ils se moquent pas mal. Ces intermittents du spectacle sportif sont aisément reconnaissables à leur tenue estivale très décontractée et l’absence de signes distinctifs. Attention il se glisse parmi eux des espions ou des traîtres qui de retour au pays porteront les signes de leur appartenance à un clan ennemi. Ils se déplacent avec les enfants afin de les former à la culture du football. Celle de plus en plus fréquente, un tantinet raciste, un zeste grossière et surtout dissimulant sa médiocrité dans des slogans collectifs présentés comme solidaires. N’empêche que les gamins se mettent vite au diapason et apprennent en quelques minutes que rien n’est interdit quand la foule se laisse mener par une minorité agissante.
Le ballon ne tourne plus rond en France. Il va de trous financiers en trous financiers. Il se fractionne sous l’influence du fric sentant le pétrole, emplissant la bourse ou puant la sueur des exploités de la terre. Il va encore faire illusion avec les lampions de l’ouverture. A Lille ce soir la France oubliera l’aile du Boeing pour se pencher sur les cuisses des vedettes du dribble… Demain matin il restera encore d’autres rendez-vous sous les projecteurs permettant de rêver l’espace d’un soir, que le modeste ouvrier de la balle ronde a toutes ses chances de devancer le capital orgueilleux. Sauf à ne pas être supporteur on peut y croire. Seulement le soir de l’ouverture !
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….A Lille ce soir la France oubliera l’aile du Boeing pour se pencher sur les cuisses des vedettes du dribble…
Cependant que les étranges lucarnes n’ont pas encore fini de nous gaver avec une exploitation démesurée des résultats de natation, et que dans la Méditerranée se noient bien plus discrètement des êtres fuyant un sort inhumain.
Tiens donc, ne dirait-on pas des drapeaux fascistes ?
Quel est donc ce groupuscule ?