Les Pussy Riot ont un "sacré" courage !

535143-trois-membres-formation-pussy-riotEt si une émule de Nelson Mandela était installée en Russie… Le courage dont a fait preuve l’une des Pussy Riot mériterait en effet un peu plus d’audience que celle que lui accordent prudemment les médias occidentaux. Le silence est même étourdissant comme ce fut le cas quand Madiba, enfermé dans les géoles des racistes sud-africains, s’efforçait de dénoncer le pouvoir qui confisquait le pouvoir. Nadejda Tolokonnikova, l’une des deux jeunes femmes du groupe contestataire libérées le 23 décembre, a dit vouloir « chasser » le président Vladimir Poutine du pouvoir, lors d’une conférence de presse donnée à Moscou. Quand on vient de passer de longs mois dans un camp sordide et d’une autre époque pour avoir chanté une prière« anti-Poutine » dans la cathédrale Saint-Sauveur de Moscou, il faut avoir un sacré courage pour s’afficher en public et tenir de tels propos. Ces femmes là mériteraient vraiment un autre soutien de la part de gouvernements prompts à dénoncer, dans d’autres pays, les manquements à la démocratie.

Tous deux ont été remises en liberté après avoir été amnistiées en vertu d’une loi approuvée par le Parlement russe la semaine dernière. Elles devaient initialement sortir de détention en mars 2014… et à peine dehors elles ont maintenu leurs accusations. Dès leur libération, les deux jeunes femmes, devenues le symbole de l’opposition à Vladimir Poutine, avaient dénoncé une « opération de communication ». « La Russie est construite sur le modèle d’une colonie pénitentiaire », aconfié Nadejda Tolokonnikova, ajoutant avoir « vu cette petite machine totalitaire de l’intérieur ».

Dans des circonstances similaires et sur la même base Mikhaïl Khodorkovski, l’ancien homme le plus riche de Russie, libéré le 20 décembre d’une colonie pénitentiaire en Carélie, dans le Grand Nord russe, à la suite d’une grâce accordée par Vladimir Poutine avait vite pris le large. L’ancien patron du groupe pétrolier Ioukos avait été incarcéré pendant dix ans pour « fraude fiscale » puis pour « détournement  ». Il a assuré, à Berlin, ne pas vouloir s’impliquer dans « la bataille pour le pouvoir » et se consacrer à une nouvelle vie loin de son pays. Les Pussy Riot n’ont pas hésité à replonger dans le combat contre un régime qu’elles décrivent sans ambages : « en ce qui concerne Vladimir Poutine, nous n’avons pas changé de position. Nous voudrions continuer à faire ce pour quoi on nous a mises en prison », a-t-elle précisé. « Je suis solidaire de cela », a assuré Maria Alekhina aux côtés de son ancienne compagne de lutte. « Poutine est un tchékiste [un terme de l’époque soviétique pour évoquer des membres des services de sécurité, la Tcheka étant l’ancêtre du KGB] fermé, opaque, avec une multitude de craintes, il a vraiment peur de beaucoup de choses », a précisé l’une des nouvelles libérées. Pour M. Poutine, « il y a en permanence des conspirations, des soupçons » a-t-elle ajouté selon le Monde.fr

Certes elles peuvent en vouloir à Poutine mais en rappelant les conditions dans lesquelles elles ont été condamnées on retrouve d’autres paramètres qu’ils seraient malsain d’oublier. L’affaire des Pussy Riot a en effet profondément divisé la société en Russie, de nombreux prêtres et fidèles dénonçant la profanation de la cathédrale et une attaque en règle contre l’Église. Mais d’autres, y compris au sein de l’Église, ont jugé les poursuites à leur encontre et leur maintien en détention disproportionnés. Encore une fois les intégristes avaient obtenu satisfaction. Des manifestants ultra-nationalistes et orthodoxes avaient fait entendre leur voix devant le tribunal. « Je veux que les Pussy et ceux qui les soutiennent brûlent en enfer », avait déclaré l’un d’entre eux transmettant un message de cette haine qui parcourt la Russie à l’égard de tout ce qui peut mettre en doute les dogmes en vigueur. Après l’annonce du verdict, le Haut conseil de l’Église orthodoxe avait demandé « aux autorités de l’Etat de faire preuve de clémence envers les condamnées dans l’espoir qu’elles renonceront à toute répétition de ce genre de sacrilège ». Ce dernier mot, employé en d’autres époques, leur avait valu de connaître l’enfer des camps de travail.

L’une d’entre elles avait ainsi passé ses premiers jours en quarantaine, un quartier de la « zone », comme on appelle les camps en Russie depuis l’époque soviétique. Au programme de ses premiers jours de détention: lever à 5h30, lecture quotidienne du règlement intérieur de la prison, passage conseillé par la salle de prière. La quarantaine de détenues doivent se partager trois lavabos et deux toilettes.  Pour espérer une libération anticipée, la Pussy Riot a dû « coudre 12 heures par jour pour 25 euros par mois, ne pas se plaindre, dénoncer et piéger les autres condamnées, renoncer à ses derniers principes, se taire et endurer, s’habituer à une « anti-vie » selon ses propres termes. A peine sortie elle reprend son combat avec comme seule certitude qu’elle risque de reprendre le chemin de ce qu’il faut bien encore appeler le goulag ! Mais dans le fond elle a un espoir, c’est que pour ne pas détruire les rentrées financières des partenaires des Jeux Olympiques de Sotchi on leur laissera quelques semaines de liberté surveillée. Les télévisions occidentales ont besoin du spectacle des neiges ! Tiens donc rappelez vous Berlin en 1936 !

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Cet article a 3 commentaires

  1. Eric Batistin

    La peur est bel et bien ce qui encourage l’acceptation.
    Combien d’entre nous, indignés aux mots puissamment contestataires,
    mots lancés sans fin sur les réseaux sociaux,
    sont prêts à mettre en péril de leur vie ?
    D’un autre coté le silence et la discrétion
    ont toujours été les maîtres-mots d’une résistance efficace.
    Pourtant, les idées et les points de vue contestataires
    ont besoin d’un vecteur de transmission,
    les journaux édités clandestinement dans des caves
    en sont historiquement la preuve.
    Mais les idées et point de vue contestataires ont aussi besoin d’action.

    Si la liberté de communication entre les individus,
    par les réseaux sociaux est une arme, une nouvelle arme de résistance,
    son efficacité est toute relative.

    En effet, selon les pays, soit le gouvernement,
    Chine Russie pour exemple,
    est très regardant sur les messages partagés,
    soit il est assez libertaire, comme en Europe.
    Dans le premier cas, la privation de liberté de parole
    encourage une résistance violente et active
    mais les individus sont violemment muselés,
    les résistants peu nombreux,
    et les changements politiques fort lents.
    Dans le deuxième cas, la parole libre
    n’a pour effet que de donner bonne conscience aux indignés,
    fort nombreux (!)
    et la résistance n’étant plus que dans le discours,
    et aucun changement notable n’est obtenu.

    Il semblerait donc que tous les systèmes gouvernementaux ont,
    chacun à sa façon, bien assimilé
    les changements technologiques de partage de l’information.
    Que ce soit par la privation du droit de parole
    ou par l’encouragement à une liberté apparente,
    de toutes les façons le résultat est le même au bout du compte:
    la véritable action résistante n’est engagée
    que par un tout petit nombre d’individu.
    Pourquoi ?
    Si la peur de la répression physique
    a été et est toujours surement le principal obstacle au courage d’opinion,
    aujourd’hui un fait nouveau est à prendre en compte:
    tous les gouvernements du monde, ou presque, se sont alliés !

    La grande messe du commerce international
    ne trouvera de véritable hérétiques trouble- fête
    que quand la résistance sera capable, elle aussi de s’internationaliser.

    Ce qui ne semble pas être le chemin engagé, en tout cas en Europe.
    Pour preuve, au bar du coin,
    lancez donc une discussion sur la libre circulation des travailleurs !

  2. david

    C’est d’abord les gouvernements des pays « civilisés » qui sont coupables de ne pas boycotter des manifestations sportives mondiales dans les pays hôtes tels que la Russie aux J.O. en 2014 ou le Qatar fasciste et obscurantiste qui recevra la coupe du monde de l’opium du peuple. Devant le fric les fédérations sportives comme les gouvernants lèchent les bottes des violeurs des droits de l’homme. En s’indignant légèrement et hypocritement des dictateurs hôtes des manifestations sportives. Et tous de communier dans l’esprit de Coubertin : hypocrisie et cynisme. J.O. de Berlin 1936, coupe du monde de foot en Argentine 1978, J.O. de Pékin 2008 J.O. de Sotchi 2014 coupe du monde au Qatar 2018…bientôt J.O. à Téhéran en honneur à la théocrasse des ayatollahs fasciste ? Libéralisme et sport sont les 2 mammelles de la veulerie et s’accommode bien avec la barbarie du moment que le fric s’amoncéle toujours pour les mêmes. Coubertin admirateur du nazisme je vomis tes J.O. et ses valeurs frelatées.

  3. Edna Wall

    pour blasphème et profanation !? quelle peine ?deux choses: soit on est un barbare, et on les exécute immédiatement. soit on est civilisé, et on pardonne car il n’y a pas de peine appropriée (on met juste une amende dissuasive pour éviter que ça devienne une mauvaise habitude de polissons…)maintenant, elle a pas tort, c’est stalinien comme procès: se faire accuser d’incitation à la haine anti-religieuse et anti-croyant, et jeter en tôle… c’est un peu fort !!! ça n’avait pas l’air bien méchant ces danseuses en collants et cagoules colorées.manque de respect, c’est certain. Haine de l’Eglise et des Chrétiens, c’est franchement limite comme accusation. ça fait du tort à l’Église tout ça (de cautionner cela).

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