On règle les comptes. Au ballon ou par balles ?

La mafia gangrène tous les secteurs de l’économie et surtout ceux où circulent des sommes considérables lui permettant de recycler ses bénéfices illégaux ou d’effectuer des prélèvements juteux. C’est ainsi qu’il relève de la plus grande naïveté de croire que le football dans les pays échappe à ce phénomène. Il existe maintes solutions pour détourner ou récupérer des millions d’euros en toute légalité puisque les contrôles sont quasiment inopérants. La mafia est présente depuis belle lurette dans les secteurs des paris et donc des matchs truqués mais aussi dans le monde opaque des transferts. De manière directe ou indirecte les exploiteurs du ballon rond sont dans l’environnement de beaucoup de clubs. Pas d’autographes ici mais des matchs bidonnés, des commissions sur transfert ou des rapports rédigés par certains des plus grands cabinets du monde qui se penchent sur la manne financière potentielle de ce joyau en cuir de la globalisation. On sait fort bien que le pain et les jeux sont les mamelles de la vraie fortune. L’arrivée de propriétaires ne sachant pas compter autrement qu’en millions dont personne ne connaît véritablement la provenance a brutalement accéléré le jeu pervers du blanchiment. Et les symptômes de déliquescence se multiplient si l’on en croit une étude du Groupe d’Action Financière de l’OCDE sur l’argent sale dans le foot. En 2006, lors de la dernière Coupe du Monde, pour la première fois dans l’histoire de ce sport plus de la moitié des joueurs évoluant dans les meilleurs équipes du monde étaient sous contrats dans des clubs étrangers. Aucun scandale ici, simplement un symptôme de l’aboutissement du projet du capitalisme planétaire achevé dans l’industrie des loisirs, du spectacle, le luxe et le cosmopolitisme. Tout n’est que supercherie avec des règlements de transferts ou de salaires sur des comptes offshore ou dans des États peu regardants.

 

J’ai connu ce système qui a fait les beaux jours de clubs rivaux mais conseillés par le même intermédiaire, un Croate Ljubomir Barin, qui fut condamné par la Cour d’appel de Bordeaux à deux ans de prison, avec sursis, et 500.000 francs d’amende pour son rôle dans l’affaire dite des Girondins avant d’être aussi suspecté d’appliquer sa méthode dans les sillage de Tapie ! Il avait inventé une méthode qui existe encore. Par exemple une grande équipe va évoluer pour des matchs amicaux ou des tournois à l’étranger. Elle se déplace moyennant un double financement : un officiel réglé sur son compte en banque national et l’autre versé d’un compte étranger sur un compte étranger. Il servira à rétribuer des joueurs apparemment peu payés mais qui ont des compléments occultes sur une banque ouverte dans son pays d’origine moins regardant, ou sur une autre, dans un paradis fiscal. Les caisses noires « délocalisées » ou « mondialisées » existent encore et elles ravitaillent des clientèles sachant jongler avec les millions autant que leurs protégés le font avec des ballons ! Autre moyen que j’ai vu pratiquer, les surestimations de transferts acceptées par le club d’accueil et qui sert à négocier au mieux des résultats. Il y a parfois beaucoup à récupérer !

Pour la mafia qui dispose de nombreuses facilités pour blanchir l’argent grâce au rachat indirect de clubs en difficultés ou de clubs amateurs, ou encore le trucage du nombre d’entrée au stade (surévalué pour cacher une partie d’argent sale) la tâche est facile. La multiplicité des acteurs rend les contrôles très difficiles : clubs, joueurs, sponsors, médias, investisseurs locaux, mécènes, agents, gouvernements, supporters. Tous jouent à ne rien entendre, ne rien voir, ne rien penser, et à se contenter de hurler dans leur stade. Ils amusent la galerie avec quelques réprimandes faites autour du dopage . Des sommes irrationnelles, dont l’origine et la destination sont difficiles à identifier circulent d’un continent à l’autre avec un taux d’évaporation considérable. Ajoutez à cela des réglementations fiscales qui varient selon les pays et vous avez les filières idéales pour se gaver avec deux ou trois bonnes affaires par an ! En étant observateur, on constate avec étonnement des engagements de joueurs qui cirent des bancs de touche car ils n’offrent aucun intérêt sur le plan sportif. On va néanmoins souvent les faire jouer, car il faut un jour ou l’autre tenter d’en tirer le meilleur prix et récupérer le sommes envolées.

 

Pour celles et ceux qui ont un peu de mémoire, ils trouveront aisément des exemples de trucages de ce type. J’ai vu des joueurs arriver une semaine et, à peine installés, refaire leurs sacs pour partir vers une autre destination en prêt, et finir par être transférés sans jamais être alignés par leur club acquéreur. Bref, il n’est pas du tout étonnant que la violence s’installe autour des grands clubs sur lesquels on exerce aucun véritable contrôle. Des sommes indécentes sont annoncées par les médias, mais elles sont souvent fausses car manipulées par des intermédiaires occultes ayant tout intérêt à ce que ces chiffres leur permettent de débloquer des sommes illicites entrant dans le total annoncé!

 

Dans son numéro du mardi 29 janvier 2013, ‘‘France Football’‘ a publié une enquête sur le «QatarGate», ou l’attribution par la Fifa de l’organisation du Mondial du football 2022 au Qatar. Le magazine sportif français parle d’«une odeur de scandale qui oblige à se poser la seule question qui vaille: ce vote doit-il être annulé?». L’enquête publiée par  »France Football » «met en lumière des pratiques déviantes, des arrangements occultes, des conflits d’intérêts, des accommodements entre ennemis, des trahisons entre amis (…) Derrière ce qui n’aurait dû être qu’une simple annonce réjouissante, c’est un tout autre système, de type mafieux, qui fut validé ce jour là, au plus grand mépris d’un cahier des charges broyé sur l’autel du fric à tout va… La pieuvre richissime n’a pas de bien grands efforts à faire pour étendre ses ramifications sur le monde du sport, mais pas seulement du sport. Combien de gros contrats (et là, nous ne parlons pas de football) ont-ils été signés dans la foulée de ce 2 décembre 2010». A ne jamais oublier !

 

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Cette publication a un commentaire

  1. Eric Batistin

    La mafia ! Et bien je vais me faire ici l’avocat du diable …

    Nous plaçons aujourd’hui sous la même appellation non contrôlée, en vrac, tout ce qui nous semble répréhensible et inacceptable, tels pour ne citer qu’eux, les marchands d’esclaves sexuels et les marchands de drogue.

    Mais qu’est-ce donc, historiquement que « la Mafia » ?
    Et bien il s’agissait historiquement d’une bande de gros bras qui prenaient en charge la défense des familles d’immigrés, gros bras immigrés eux aussi.
    Pour exemple, assez de films en ont parlé, les immigrants italiens aux USA, d’où les quartiers italiens, ou encore les même mais chinois et leurs quartiers aussi.
    En remontant un peu dans l’histoire des Usa, on trouve la mafia irlandaise en charge de défendre les familles de blancs, désireux de construire une vie paisible, contre les indiens…
    Les mafieux, à l’origine étaient donc des gros bras plus investis de part leur actions violentes dans la défense de leur communauté que dans la construction paisible d’une saine activité !
    Les dérives mafieuses qui suivirent, l’argent que la communauté leur octroyait ne suffisant plus à leurs ambitions, auront mené ces hommes tenant d’une organisation civile à passer du statut de milice armé à celui d’entreprise spécialisée dans tous les vices. Que ne ferait-on pas pour mener ses enfants dans de belles, réputées et chères écoles !
    Combien d’hommes politiques américains, ayant eu le loisir de mener grand train, peuvent se vanter de n’avoir rien à devoir à la Mafia?
    Ni irlandais, ni chinois, ni Italiens n’auront avancé sans soutien, le soutien total de tous les membres de leur communauté.

    Mais aujourd’hui, la Mafia dont ont nous parle n’a ni patrie, ni famille, et ne fait pas son argent uniquement sur le vice.
    La Mafia d’aujourd’hui est un conglomérat de financiers, venant de tous horizons, faisant feu de tout bois, spéculant sur la valeur du riz, de l’armement ou du textile, assassinant sans discernement famille pauvres ou riches, et ayant comme ennemi commun toutes les femmes et tous les hommes de bonne volonté !

    Les temps changent, les chefs mafieux aussi, nous en connaissons tous uns, il vit juste à coté de nous, c’est votre chargé de clientèle au guichet de votre banque.
    Vous savez cet établissement qui ne doit aucun compte à qui que ce soit, et qui si par malheur venait à faire une légère erreur mettant en péril toutes les entreprises publiques d’une nation , n’aurait comme réprimande que le plaisir savant d’augmenter le taux de vos crédits .
    Parlez-en au peuple américain, au peuple grec, et aux syriens, ils vous diront, eux, qu’est-ce que c’est qu’un chef mafieux !

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