En fait lorsque l’on dresse un bilan de la démocratie, il suffit de mesurer les rapports qu’entretient le pouvoir avec 3 professions : les enseignants, les juges et les journalistes. La manière dont se comporte un Président, un gouvernement ou un parti avec ces acteurs sociaux suffit à révéler la considération qu’il a pour le Peuple. Tous les dictateurs haïssent ostensiblement ou plus discrètement ces garants de la qualité d’un système politique et soit ils les étranglent, soit ils les déciment, soit ils les maîtrisent. En observant le regard qu’ils portent sur celles et ceux qui garantissent l’émancipation de l’individu par le savoir, qui assurent l’équité de sanctions à l’égard des gens enfreignant les règles du bien vivre ensemble, ou qui offrent la plus précieuse des références citoyennes, l’information, on apprécie réellement la qualité des hommes qui dirigent un pays. Nicolas Sarkozy a sans cesse tenté, depuis des années, de décimer les premiers, de soumettre els seconds et de ridiculiser les troisièmes. Il faut bien avouer que pour parvenir à ses fins, il a bénéficié du maximum de collaboration de la part des sbires de l’UMP. Un seul objectif : détruire toute indépendance pour éviter de perdre son pouvoir, parvenir à se protéger d’errances avérées, arriver à remplacer l’information par la propagande. Dans tous les pays au monde, l’équilibre entre pouvoirs et contre-pouvoirs demeure fragile et ce ne sont pas les « révolutions » ou les « printemps » qui parviennent nécessairement à le renforcer. Chez nous, les rapports sont devenus angoissants car on approche du pire niveau, celui de la soumission. Si l’on ajoute la volonté évidente du candidat-président de jeter à la vindicte publique tous les « corps intermédiaires » pouvant combattre dans la proximité sa main mise sur l’État, on mesure la gravité de la situation.
Durant cette campagne, un principe nouveau est apparu : tous les médias ou les journalistes qui les font vivre qui ne sont pas laudateurs à l’égard de sa personne, sont jetés en pâture au Peuple avide de certitudes prêtes à utiliser ! Le mépris que témoigne Nicolas Sarkozy à l’égard de la « presse » est incommensurable. Dans ses vœux 2012 il avait déjà donné un aperçu du sort qu’il réserverait, dans un prochain mandat, aux « faux travailleurs » que sont pour lui les journalistes. Il lui faut des femmes et des hommes serviles, qui lui posent les bonnes questions, et qui gagnent leur salaire en servant la soupe aux heures de grande écoute. On sent son agacement, son arrogance, sa nervosité, quand il arrive que la part de mensonge, telle la partie immergée de l’iceberg, est dévoilée aux yeux et aux oreilles des curieux. Les seuls journalistes qui méritent de ne pas être honnis, sont, pour Nicolas Sarkozy et plus largement l’UMP, les bateleurs des émissions télévisées où on préfère la forme au fond, le spectacle à l’analyse, l’approximation à la précision, la petite phrase à la démonstration.
Récemment, la fameuse déclaration sur le « vrai travail » reflète parfaitement ce que le candidat-président attend des professionnels de la transmission de l’information. D’abord il fait volontairement devant micros, caméras et éventuellement stylos, une déclaration inspirée par ses conseillers en communication. Son objectif est clair : obtenir que les médias reprennent une déclaration de guerre aux syndicalistes, aux fonctionnaires, de telle manière qu’il puisse entamer avec brio sa campagne de récupération de la clientèle « poujadiste ». C’est un indéniable succès, car les journalistes ne posent aucune question sur la signification pour Nicolas Sarkozy de la formule « vrai travail » et ils la reprennent avec délectation, à tel point qu’elle occulte tous les autres discours, tous plus révoltants les uns que les autres. Le bonheur parfait, sauf que quand le « monstre » échappe à son créateur, ce dernier demande aux mêmes journalistes d’expliquer qu’il n’a surtout pas pu dire pareille énormité. Il existe alors des supports médiatiques qui oublient, d’autres qui esquivent et d’autres qui prouvent que c’est pure vérité… A chacun son degré d’indépendance. A la télévision, il y va de sa énième reculade, sous le regard compatissant du bateleur de service. Un rire jaune, un rictus rapide et l’affaire est réglée : tout bénéfice, puisque l’on aura parlé mille fois plus de l’énormité du « vrai travail » que de son bref acte de contrition !
Les journalistes, pour Sarkozy, n’existent que pour servir de courroies de transmission à sa manipulation de l’opinion publique. Il ne survit plus que sur un radeau médiatique où quelques grands noms tentent de préserver des rentes de situation, garanties par leur complicité avec le monde politique, et notamment celui qui gravite autour du monde des affaires qui s’est emparé de la presse. Ils se donnent bonne conscience en laissant parfois paraître un doute sur l’issue du scrutin… mais ils ne vont pas aller trop loin, au cas où ! Sait-on jamais, ce Peuple qu’ils oublient au moins autant que les politiques, pourrait les écouter, et sauver celui qui se fout d’eux comme des gens, en permanence. Comme chez les enseignants ou chez les juges, il n’y a pas que des résistants… D’ailleurs, s’ils existent, ce ne sont que de dangereux individus qui « font de la politique ! ». La pire des insultes, selon celui qui n’en fait jamais…
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Erratum dans le titre : Nicolas Paul Stéphane Sarkozÿ de Nagy-Bocsa utilise les copains, propriétaires des médias, et méprise les vrais journalistes.
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