La vie publique, c’est un peu le parcours du Petit Poucet. Il faut repérer de petits cailloux blancs sur le chemin parcouru pour en mesurer parfois la valeur. Si les obstacles sont toujours de taille, les repères de la réussite sont toujours extrêmement ténus. Et celui qui reste persuadé que les mémoires citoyennes conservent la trace de tout ce qu’ont pu être les espaces ensoleillés est certain de sombrer dans le désespoir. C’est la raison pour laquelle les hommes qui veulent une place dans l’histoire tiennent absolument à ériger un monument, pour que la poussière de l’oubli ne masque pas leur trace. Pour ma part, je préfère nettement les constructions humaines à celles de pierre aussi belles soient-elles car elles sont beaucoup plus exigeantes dans la démarche et surtout beaucoup plus vite oubliées. Alors, je me réjouis chaque fois que dans l’herbe fraîche du quotidien je peux retrouver un petit rien qui me rappelle combien il a fallu d’efforts pour arriver à transformer ses valeurs en actes concrets. Il est vrai, par exemple, que chaque semaine désormais, dans le domaine culturel, il y a sur Créon un « caillou » constituant une pépite politique.
Sur la semaine dernière plus de 2 000 personnes de toutes les conditions, de tous les âges, de toutes les religions, de toutes les options philosophiques, ont été les actrices et les acteurs volontaires de la défense et l’illustration de ce que nous avons patiemment bâti en terme de citoyenneté depuis maintenant 30 ans ! J’aurai été de tous les combats, de tous les chantiers, de tous les plans. Parfois devant. Souvent au milieu. Rarement derrière. Aucune vanité dans ce constat. Aucun renflement prématuré des chevilles ou du tour de tête, mais seulement le sentiment que les gens qui sont en mesure d’apprécier le chemin parcouru solidairement se raréfient. La facilité du présent dans la réussite du festival « Le Festin » ou dans un concert du Jeune Orchestre Symphonique de l’Entre Deux Mers occulte qu’elle n’est que la résultante d’une farouche volonté politique.
Une équipe technique vidéo tournera en 2012 un documentaire sur justement les fondements de la réussite créonnaise en matière d’animation culturelle, sociale ou citoyenne. Elle vient de passer une semaine à suivre les faits et gestes de quelques-uns des acteurs, et elle m’a poussé, lors de diverses rencontres, à expliciter les principes fondateurs de la gouvernance municipale. Un vrai bonheur pour moi ! Une jubilation intense ! Etre obligé de puiser en soi les raisons de ce que l’on fait au nom des autres, alors que trop souvent on ne retient que l’écume des faits. C’est comme dans l’éducation, quand un enseignant est incapable de justifier ses choix pédagogiques et les valeurs qui les fondent. Il faut sans cesse imaginer, construire, modifier, réfléchir, oser pour être utile à l’intérêt général. La gestion n’est rien si elle ne repose pas sur des fondements politiques au sens noble de ce qualificatif. L’échec patent, c’est d’aligner les décisions strictement techniques dénuées de toute dimension philosophique.
Un concert laïc réunissant toutes les associations de solidarité d’une petite ville, donné par le Jeune Orchestre symphonique de l’Entre Deux Mers, au profit d’une maison pour enfants maltraités à Haïti paraît de prime abord anecdotique. Or c’est la synthèse de l’esprit créonnais, patiemment construit, et figé dans un « pacte social, citoyen et durable », initiative unique mais qui n’a jamais suscité le moindre intérêt. En 11 jours, sur Créon, il y aura eu, entre le cinéma, la musique, les expositions, les animations, pas moins de 17 séquences « culturelles » ayant fait sortir du triptyque « gazon, maison, télévision » des centaines de gens allant des enfants de maternelle aux retraités les moins gaillards ! C’est le fruit d’une volonté politique et pas nécessairement de moyens financiers considérables. Tout repose sur l’encouragement permanent, incessant, usant, mais tellement réjouissant quand il réussit, à l’action citoyenne constructive !
Des gens venant du Secours catholique, des associations laïques de solidarité avec le Sénégal, Madagascar ou le Burkina Faso se joignent à d’autres participants du secteur socioculturel, soutenus fortement par les élus locaux, et se prennent en mains pour mettre en œuvre leur propre idée. A Créon c’est devenu lentement mais maintenant solidement une habitude ou plus exactement un principe de vie ! C’est évident, et seul celui qui sait d’où on est parti peut juger du bonheur d’être arrivé à ce résultat. Il en est de même pour le JOSEM et ses quarante musiciens de 12 à 25 ans !
Qui se souvient des circonstances de la création, il y a maintenant 30 ans, de l’école de musique, avec un tract tiré sur la ronéo à alcool à brûler de l’école de Sadirac ? Qui pense à ces acrobaties nécessaires pour accueillir, dans la salle du conseil municipal de Créon, les répétitions du mercredi des musiciens qui avaient débuté quelques années auparavant et étaient dépourvus de tout lieu pour se rencontrer ? Qui imagine un instant que chaque année il faut un soutien résolu pour persuader les institutions du caractère formidable de cet ensemble musical qui se régénère au fil des ans; et dans lequel on a vu passer plus de 600 musiciens différents, qui a parcouru et parcourt la France, l’Europe et le monde ? Sans volonté politique, il n’y a pas de construction possible ! Et même si c’est insupportable aux oreilles prudes de quelques vierges effarouchées par le parler vrai, je le clamerai encore et toujours. Ce n’est pas la campagne présidentielle actuelle qui me persuadera qu’il faut la fermer face à un tsunami de mensonges, de manipulations, d’annonces, d’amnésie collective. Mes cailloux sont différents de ceux du Petit Poucet, car les miens sont rouges et je le revendique !
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L’école municipale de musique de Créon (je ne parle pas du JOSEM) souffre quand même d’une certaine confidentialité dans laquelle elle semble être tenue. C’est du moins ainsi que je le ressens. Pourtant, les personnels sont compétents, dévoués (et très sympathiques), l’accueil en mairie pour l’inscription(bureau des associations) est chaleureuse et d’une qualité rare à souligner.
Malheureusement, juste quelques lignes sur le site web municipal signalent son existence mais ne mentionnent pas les disciplines qui y sont dispensées. C’est ainsi que ce n’est qu’au bout de plusieurs années que j’ai découvert qu’on y enseignait l’instrument que pratique mon fils, par hasard, par le biais d’un reportage de Télé Canal Créonnais. Les années précédentes, j’avais du l’inscrire à Salleboeuf puis à St Caprais (c’était avant les municipales de 2008 si vous voyez ce que je veux dire).
Les manifestations de cette école font tout autant l’objet d’une relative discrétion. Début février si j’ai bonne mémoire, il y a eu « Scènes Ouvertes » à l’espace culturel de Créon, mais pas de franche publicité sur le site municipal ou sur les sites dédiés. Aujourd’hui même, l’école organisait à Sadirac le festival Sadirock mais la diffusion a été tout aussi confidentielle. Une cinquantaine de personnes, la plupart parents des élèves. Et samedi prochain, à l’espace culturel de Créon se déroulera la représentation « Dans les Pas de Martin ». Et là encore, aucune publicité notable. Ces manifestations permettent aux élèves de faire un peu de scène et croyez moi qu’ils travaillent très dur pour la réussite de leur prestation. Et, outre le fait d’être très motivés, nombre d’entre eux sont vraiment talentueux, ils en veulent.
Alors pourquoi Créon, qui dispose d’une école de musique agréable, de grande qualité et variée dans le choix des instruments, est elle si timide à la faire connaître ? Ce n’est pas une critique, juste une interrogation que je me pose.
Quand je parlais « d’aujourd’hui », pour Sadirock, je voulais dire le 31 mars bien sûr. Mais le temps que je termine et quelques désagréments avec les ****** de Bill Gates installés sur ma machine ne m’ont permis d’achever mon message dans les temps. CQFD.
Je tiens juste à préciser que MEC n’est pas l’école de musique de Créon mais l’école de musique de la Communauté de Communes du Créonnais (14 communes)