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Du monde de l’espoir à celui du moins pire

Durant le XX° siècle la très grande majorité des Françaises et des Français croyait en un monde matériellement meilleur et l’imaginait sur la base d’idéaux qui entretenaient l’espoir. Le communisme, le socialisme et le libéralisme offraient des perspectives différentes et même parfois totalement opposées mais nous avions le choix. N’empêche que le rêve d’un avenir qui dépassait les tourments du présent a parfaitement fonctionné durant des décennies. L’ascenseur social existait et personne n’y échappait même en dehors de la réussite scolaire. On construisait le bonheur d’une forme de réussite positive souvent insatisfaisante mais bien réelle. Autour de moi dans les années 50 les signes d’un progrès social ont été constants. Accéder à une automobile (2 ou 4 chevaux), à une télé en noir et blanc, à quelques jours de vacances, à une machine à laver ou à l’achat d’une maison correspondait à cette volonté de dépasser le statut des générations antérieures. On s’élevait sans avois cette peur panique du déclassement social.

Le délitement des grandes théories a généré une modification profonde de la vision de la réussite. La dérive de toutes les formes de militantisme vers des comportements strictement politiciens a transformé ce qu’il pouvait rester de la citoyenneté en attitude permanente de consommateur. Les « idéologues » ont perdu pied dans le monde présent et on parfois été remplacés par des religieux au sens large de ce qualificatif. Ils ne pèsent même plus dans les rares débats permettant des échanges construisant une position d’intérêt général. Mieux il n’y a plus que des aboyeurs débitant des « punchlines » sans aucune base réellement réfléchie et n’ouvrant aucune perspective réelle pour espérer ces fameux lendemains qui chanteraient. C’est sur ce vide sidéral que le RN a construit sa dédiabolisation.

En abaissant le niveau de la réflexion, en détruisant les repères venus du siècle des Lumières, en cultivant l’ignorance collective, en développant une défiance vis à vis de la politique, les manipulateurs médiatiques mènent la descente aux enfers des démocraties. Nous sommes ainsi entrés dans une société où l’on ne soutient plus le coté positif des choses mais où l’on développe en permanence la culture du « moins pire » ! Nous ne souhaitons plus bâtir un monde meilleur mais nous nous contentons de souhaiter qu’il ne point aussi catastrophique que nous le présentons. Alors qu’il était arrêté par la Gestapo Tristan Bernard avait eu cette phrase sublime : « nous vivions dans la crainte, maintenant nous allons vivre dans l’espoir. »

Dans notre quotidien nous avons inversé cette pensée : «  nous avons longtemps vécu dans l’espoir, maintenant nous vivrons dans la crainte. » Tout le pays est au minimum prudent. Il vire à la peur des jours qui s’annoncent et pour une bonne par dans une angoisse qui l’engloutit inexorablement. Le refuge dans les extrêmes devient alors un moyen de se rassurer. Ils offrent des certitudes (fausses pour la plupart) tellement simplistes qu’elles constituent seulement des bouées pour ceux qui ont peur de se noyer dans le doute. Impossible de changer cette imprégnation grandissante des esprits. Rien de plus normal puisque 90 % des informations, des événements mis en avant, déclinent des faits négatifs et inquiétants. Affolant. Démoralisant. 

Exister à l’époque actuelle ce n’est donc pas apprendre, comprendre, aimer, soutenir mais ignorer, déformer, détester, combattre. Le collectif a bien du mal à survivre puisque seule la réussite individuelle est souhaitée et que l’intérêt général ne serait que la somme d’intérêts particuliers contradictoires. Nous sommes dans le monde des réseaux, toutes sortes de réseaux, et donc dans celui qui tourne en boucle puisque chacun ne cherche qu’à projeter une image ou quelques mots sensés porter ses idées ou ses commentaires. Le coté sommaire de ces systèmes accentuent la perte de tout ce qui a constitué le cheminement de la pensée. Demain il sera trop tard.

La campagne électorale américaine offre chaque jour un condensé de toutes les dérives de cette nouvelle approche de la vie collective. Le résultat très incertain accentue la peur du futur proche. Trump ne se préoccupe d’aucune éthique, d’aucune valeur, d’aucune sincérité, d’aucune moralité. Il tape de manière grossière sur son adversaire qui tente tant bien que mal de rappeler les vertus même à minima de la solidarité, de la liberté, de l’égalité ou  de la fraternité. Les USA sombrent dans l’affrontement entre un tsunami aux perspectives fascisantes et une résistance désespérée car de plus en plus difficile face à cette montée de tous les travers de la fameuse loi du plus fort.

Un proverbe américain s’applique parfaitement à la situation présente : « espérons toujours le meilleur, tout en se tenant prêts pour le pire. » Jamais ce conseil n’a été autant d’actualité. Il n’est pas spécifique à ce qu’il se passe Outre-Atlantique. Malheureusement pour nous. Nous y sommes en France. 

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Cet article a 4 commentaires

  1. J.J.

    « chacun ne cherche qu’à projeter une image ou quelques mots sensés porter ses idées ou ses commentaires. »
    Cela me fait prendre conscience de la vanité de mes commentaires, je pense qu’à l’avenir je m’en abstiendrai.

  2. christian grené

    J.J. ne t’abstiens surtout pas d’apporter ton commentaire au papier du jour de JMD, sans quoi la roue libre ne marchera plus et d’aucuns, comme moi, vont se retrouver sur la paille.

  3. PC

    Dans le même ordre d’idée, l’incertitude des élections américaines est-elle réelle? ou nous entretient-on un faux suspense pour nous inciter à consommer du média?
    les émissions sur le sujet se succèdent sur toutes les chaînes, ya du pognon à se faire… et aucune chaîne ne s’en prive.
    Assez curieusement les gens autour de moi ont l’air de s’en ficher royalement, ils ont d’autres soucis….

  4. faconjf

    Bonjour,
    pas de commentaires … reste l’humour.
    https://youtu.be/BlKFqqraZSo
    “L’humour est une tentative pour décaper les grands sentiments de leur connerie.” Raymond Queneau
    Gardez le sourire et bonne journée

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