Il n’y a que les idolâtres qui peuvent encore croire que si Bush et ses alliés sont allés guerroyer en Irak ou si Sarkozy et Cameron ont multiplié ses déclarations fracassantes sur la libération du peuple libyen ce n’était pas en lien avec les ressources pétrolières de ces pays. Partout derrière la façade des guerres libératoires ou les coups d’État meurtrier il existe des motivations économiques. Les quantifications des profits a largement remplacé les motivations liées à un interventionnisme humanitaire. Pas un seul conflit qui ne soit pas en rapport avec une ressource naturelle en cours d’exploitation ou potentiellement exploitable. Cette dure réalité s’applique aussi aux conflits du Moyen-Orient où se joue l’après-pétrole et le devenir des immenses fortunes qu’il reste à amasser sur les réserves actuelles.
Depuis l’ignominie des attentats de Paris les hypothèses de lutte contre Daech se multiplient avec des déploiements de mesures multiples répressives à l’égard des terroristes mais pas nécessairement de leurs inspirateurs. En effet Daech n’a rien d’un « état » mais d’une véritable organisation structurée similaire à celle que la mafia avait installé dans sa plus belle période. Les trafics divers alimentent les caisses des djihadistes de tous ordres et dans le Sahel ils sont particulièrement florissants (drogues, armes, cigarettes…). C’est la réalité : il faut parfois fermer les yeux pour les troupes françaises installées là-bas car les commanditaires se situent parfois au plus haut niveau de certains pays. Les interventions pour couper ces routes du fric indispensables à l’achat de moyens militaires ou tout simplement pour rétribuer des combattants ne sont pas nombreuses ou vraiment efficaces. On vient de le constater : des commandos dotés de budgets conséquents s’installent dans le monde (appartements, voitures, moyens de communication, armes…). Tous ces fonds transitent par des banques peu regardantes sur l’odeur des dollars qu’elles reçoivent. Il en va de même pour ce qui se passe en Irak ou en Syrie comme ce fut le cas pour les Talibans en Afghanistan. En effet l’un des moyens efficaces pour étouffer Daech consisterait à s’attaquer collectivement et durablement aux circuits de financement de cette pieuvre mortifère. Or il n’en est pas souvent question. Pourquoi ne pas organiser une conférence internationale à paris pour étudier les moyens de couper les revenus réels évalués à plusieurs millions de dollars quotidiens.
On sait après une enquête effectuée par 5 journalistes anglais que Daech exploite deux champs pétroliers en Syrie : al-Jibssa et al-Omar. Il a dû abandonner en avril face à l’armée irakienne ceux qu’il exploitait en Irak près de Mossul : Allas et Ajil. Sa production journalière s’établit entre 34.000 et 40.000 barils par jour de brut. Il est commercialisé ou plutôt soldé entre 20 dollars et 45 dollars (le prix international varie autour de 50 dollars actuellement) ce qui bien évidemment convient à certains acheteurs qui réalisent ainsi de substantiels bénéfices comme le font également certaines tribus libyennes pas prêtes à lâcher leurs revenus exceptionnels confisqués antérieurement par Khadafi.
Le brut est écoulé via des camions citernes venant de toute la région, même de parties en lutte contre Daech. Ces camions peuvent attendre plusieurs semaines avant de charger leur pétrole et le livrer à des raffineries locales qui fonctionnent encore grâce au recrutement à prix d’or d’ ingénieurs hautement qualifiés à l’étranger, avec des salaires élevés pour développer le secteur. C’est la raison essentielle qui a conduit les avions français à aller détruire ou du moins largement endommager une installation pétrolière après les Américains. Actuellement de multiples actions portent tardivement sur cette ressource qui a déjà permis à Daech et ses dirigeants de se constituer de solides comptes en banque en dollars.
Une bonne part des stocks sont écoulés sur un large marché local élargi non seulement sur le territoire contrôlé mais également dans d’autres zones tenues par des forces qui le combattent, comme le nord de la Syrie. En effet, les djihadistes sont les seuls fournisseurs de pétrole pour produire de l’électricité pour les hôpitaux, le commerce, les machines outils, ou alimenter les transports.
Ce qui explique que sur les 10.600 missiles air tirés par la coalition internationale contre Daech depuis août 2014, seuls 196 ont atteint des sites pétroliers. Sans énergie, la population de toute cette région serait plongée dans une grave crise humanitaire et on laisse donc filer les approvisionnements. Il faut ajouterr à ces ressources directes l’argent de riches sympathisants déterminés à soutenir les Sunnites dans leur guerre contre Bachar el-Assad. La plupart de ces fonds proviennent des pays du Golfe, où des donateurs acheminent des millions vers la frontière turco-syrienne, à destination des combattants islamistes. Les gouvernements de l’Arabie saoudite, du Qatar et du Koweït ont également financé en secret les groupes radicaux sunnites qui combattent el-Assad. Et donc les fonds ont fini par rejoindre les caisses de Daech s fusions diverses. Il faut y ajouter le pillage des banques, des particuliers, des institutions ainsi que des taxes et de…impôts pris sur les populations restées sur place. Tous ces canaux ne s’évaporent pas mystérieusement dans la nature mais finissent sur des comptes en banque. Où ? Comment ? Grâce à qui ? On doit certainement le savoir mais…
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Ce n’est pas le vice appuyé sur le bras du crime (Châteaubriand), c’est l’obscurantisme appuyé sur le bras de la finance, ce qui revient à peu près au même ….
Bonjour,
voici un extrait de l’article écrit par Nafeez Ahmed* et intitulé L’Etat islamique, cancer du capitalisme moderne. dans cet article l’auteur revient sur les financements des groupes islamistes depuis 25 ans
lien http://www.middleeasteye.net/node/39507
en voici un extrait:
« Le vice-président américain Joe Biden a indiqué lors d’une conférence de presse à la Maison Blanche que l’Arabie saoudite, les Émirats arabes unis, le Qatar et la Turquie, entre autres, fournissaient « des centaines de millions de dollars et des dizaines de milliers de tonnes d’armes » aux « éléments djihadistes extrémistes du Front al-Nosra et d’al-Qaïda » dans le cadre d’une « guerre par procuration entre sunnites et chiites ». Biden a ajouté qu’il était impossible, à tous égards, d’identifier les rebelles « modérés » en Syrie.
Rien n’indique que ce financement s’est épuisé. Pas plus tard qu’en septembre 2014, alors même que les États-Unis ont commencé à coordonner les frappes aériennes contre l’État islamique, les responsables du Pentagone ont révélé qu’ils savaient que leurs propres alliés de la coalition finançaient toujours l’État islamique. »
Et ici la conclusion de son article:
« En fin de compte, l’État islamique est un cancer du capitalisme industriel moderne en plein effondrement, un sous-produit fatal de notre dépendance inébranlable à l’or noir, un symptôme parasitaire de l’escalade des crises de civilisation qui secouent à la fois le monde musulman et le monde occidental. Tant que l’on ne s’attaque pas aux racines de ces crises, l’État islamique et ses semblables ne sont pas prêts de disparaître. »
Sans commentaires.
Salutations Républicaines
* Nafeez Ahmed est journaliste d’investigation et auteur à succès. Titulaire d’un doctorat, il s’est spécialisé dans les questions de sécurité internationale. Son travail sur les causes profondes et les opérations secrètes liées au terrorisme international a officiellement contribué à l’établissement de la Commission nationale sur les attaques terroristes contre les Etats-Unis du 11 septembre 2001 et à l’enquête du Coroner sur les attentats du 7 juillet 2005 à Londres.
L’argent ne devrait avoir pour valeur de référence que celle d’un bien matériel. Et ne pas en lui-même représenter une valeur.
Cela toutes et tous nous le savons, les fluctuations du prix des denrées alimentaires en bourse, affamant les populations, par exemple.
Mais ici, vous parlez, Monsieur, d’un argent dont la valeur est basé sur une matière brute nécessaire à la survie, le pétrole.
Ce qui, tout en mettant l’accent sur la folie et le piège infernal dans lequel « nous » sommes, met aussi en lumière un point précis de ce que pourrait être l’engagement citoyen.
Le seul moyen à ma disposition pour participer à l’effort de guerre national n’est autre que celui-ci:
changer mes habitudes de consommation et la façon dont je me déplace d’un point à un autre, quel véhicule utiliser.
Ce n’est pas glorieux, je ne gagnerai jamais ainsi la médaille des anciens combattants, ni le bonnet phrygien du révolutionnaire républicain.
Mais que faire d’autre pour lutter ?
Bonjour,
Oui, comme vous, je me pose cette question : que faire d’autres pour tenter de lutter…
Personnellement, je cherche encore et toujours à savoir.
Permettez-moi alors de partager les références ci-après (et si vous en étiez déjà informés, je vous prie, par avance, de bien vouloir pardonner ce qui sera des redondances et d’accepter par conséquent de ne pas en tenir compte).
– le hors série du Courrier International sur Daesh.
Le sommaire est consultable à ce lien : http://boutique.courrierinternational.com/catalog/product/view/id/15993/s/hs-54-daech/category/669/?utm_source=site-CO&utm_medium=cta&utm_campaign=autopromo-boutique-homepage
– les propos de Philippe-Joseph Salazar parus dans la revue de Philomag de novembre 2015.
(p19). Extraits de l’article :
Professeur de rhétorique au Cap (Afrique du Sud), Philippe-Joseph Salazar (PJS) a lu les discours de l’État islamique. Selon lui, le Califat se sert du Verbe comme d’une arme. D’où la nécessité d’adapter notre propre vocabulaire.
Voici quelques uns de ses propos recueillis par A.L. :
« Une fois le califat proclamé, le Verbe a une force d’appel.
(…)
Les médias occidentaux n’ont pas compris ce qui s’est passé, ce jour de l’été 2014 où Al-Baghadi a surgi dans la mosquée de Mossoul pour entonner l’homélie de la refondation du Califat. (…) Il faudrait faire un parallèle entre cet acte et le sacre des rois de France dans la cathédrale de Reims. Une fois le Califat proclamé, tous les musulmans sont appelés à ne pas rester au milieu des égarés. Le Verbe a une force d’appel.
(…) : faut-il dire « État islamique », « Isis », « Isil » (version officielle de l’ONU), « Daech » ou « Daesh » (version de France Télévisions) ? (…) Moi, je préconise d’employer le mot « Califat », qui désigne une forme politique non occidentale. De même, on ne sait plus ce que signifie la Terreur ou le terrorisme. Le jus terrendi, ou « droit de terroriser », a des origines romaines. Pour le juriste Pomponius [IIè siècle de notre ère], la terreur est ce qui permet à un magistrat de tenir en respect un criminel en lui inspirant une « peur salutaire ». Étymologiquement, « terroriser » signifie « chasser du territoire ». L’usage de la Terreur par le Califat est un acte d’appropriation territoriale, ni plus ni moins.
(…)
(…). N’oubliez pas que ce verbe djihadiste est assez fascinant pour que 30 000 jeunes Européens aient à ce jour rejoint le combat califal dans les sables du désert. À ces jeunes, nos autorités proposent aujourd’hui un traitement psychologique, comme s’ils étaient malades. Cela me paraît une pratique totalitaire : quand vous vous opposiez autrefois au communisme en URSS, vous étiez bon pour l’hôpital psychiatrique. Il me paraît plus légitime de reconnaître en eux des combattants ennemis et de les traites comme tels. En somme, à chacun d’assumer ses responsabilités. Les djihadistes font un choix politique et y répondre par de la thérapeutique et des soi-disant protocoles de désendoctrinement revient à nier l’essence même de la politique.»
– Enfin, l’émission de mai 2015 sur France Culture où était invité Invité Michel Terestchenko
http://www.franceculture.fr/emission-les-nouveaux-chemins-de-la-connaissance-actualite-philosophique-michel-terestchenko-2015-05#xtor=EPR-32280591
Et permettez-moi encore de vous faire part des propos que j’ai retenu de cet invité au cours de cette émission :
« Il n’y a justement pas de déterminisme » (39’10 de l’émission)
« Je suis pour la candeur, et je rappelle que Candide n’est pas un imbécile. »
Michel Terestchenko repère que notre monde n’appelle pas à faire la guerre mais plutôt à la vengeance : cet état de vengeance est une conséquence de la disparition de toutes les médiations.
« Importances des principes, et qui plus est, des principes juridiques ».
Il regrette cet état de passivité actuelle (40’19 de l’émission).
Après les attentats à Charlie Hebdo, il a repéré également une position dualiste de la société : il y a eux et il y a nous. Il n’y a pas eu, à sa connaissance tout au moins, remise en cause de ce “nous” dans les actes qui venaient d’avoir lieu.
Aux côtés de Michel Terestchenko, je le regrette aussi.
Pour tenter de conclure, en relation plus directe avec le thème de la finance abordé par Monsieur Darmian, j’ai également le plaisir de vous communiquer, en ce jour de fête du prénom Aude, un des livres que je suis en train de lire : il s’agit de celui de Yanis Varoufakis intitulé « Un autre monde est possible Pour que ma fille croie encore à l’économie » (Flammarion Septembre 2015).
En vous remerciant de votre attention,
Bien amicalement
Noëlle S.