Les discussions sont engagées entre les associations d’élus qui voient arriver avec angoisse la discussion parlementaire sur le Projet de Loi des Finances 2016. La ponction effectuée sur les dotations va mettre en pièces les situations de bon nombre de communes ou de départements. Au nom du redressement des comptes de la Nation le gouvernement va sacrifier des pans entiers de politiques publiques de proximité qu’il a confiées par manque de moyens pour les assumer aux collectivités locales. En fait si elles ne veulent pas trop réduire leurs dépenses de fonctionnement (éducation, vie associative, solidarité…) elles ne pourront que diminuer drastiquement leur autofinancement et donc leur capacité à investir… L’Association des Maires de France sous l’impulsion d’André Laignel intraitable et loyal défenseur des communes tente d’infléchir cette politique qui va à terme coûter plus cher au pays en dégâts sociaux qu’en économies budgétaires. Elle a entamé les pourparlers avec Manuel Vals en pure perte ou presque.
Le Premier ministre ne veut ni étaler la ponction dans le temps, ni la diminuer en volume. Or c’est la seule solution pour éviter une année 2016 particulièrement angoissante sur le plan économique de manière indirecte. Le gouvernement propose la création d’un fonds d’un milliard d’euros pour les investissements des communes, afin de limiter l’impact de la baisse des dotations aux collectivités sur l’investissement public. Mais le financement de ce fonds reste encore à préciser et c’est justement le rôle du débat sur la Loi des Finances. Une fausse bonne nouvelle car pour investir il faudra que les collectivités certes bénéficient de soutiens de l’Etat mais qu’elles trouvent les compléments par l’emprunt ! On évalue le volume de l’endettement supplémentaire pour consommer ces crédits à 2, 5 milliards d’euros ! Même si les taux d’intérêts sont bas il faudra nécessairement rembourser le capital et accroître la dette globale de la France !
En 2014 la préfecture de la Gironde a renvoyés 20 % de ses crédits de Dotation d’équipement des territoires ruraux (DETR) faute de projets suffisants déposés par les communes ou les intercommunalités. On peut aussi signaler que cette année certains programmes d’investissements des petites communes sont bloqués parce que les crédits de l’État n’ont pas été attribués avant l’été ! Bref on peut annoncer comme au niveau européen ce ne sont pas les annonces d’ouvertur de fonds disponibles mais leur affectation qui constitue la clé des aides ! Et là on attendra des textes confus, négatifs, restrictifs qui bloquent en fait l’utilisation des subventions annoncées !
Début avril, Manuel Valls avait déjà annoncé, dans le cadre d’une batterie de mesures pour relancer l’investissement public, que « la Caisse des Dépôts mettra en place une solution de préfinancement à taux zéro des remboursements versés par l’État au titre du FCTVA, à destination de l’ensemble des collectivités territoriales ». C’est comique puisque c’est un moyen détourné de faire la trésorerie de l’Etat en évitant le redressement dans de bons délais de la TVA ! Le Premier ministre suggère aujourd’hui d’étendre cette mesure à 2016 et 2017, et d’élargir aussi son cadre aux dépenses d’entretien des bâtiments municipaux. Ils sont en général payés sur les budgets de fonctionnement et pas sur ceux d’investissement … et ce serait une grande première que la TVA soit récupérée dans ce type de travaux. Pourquoi tout bonnement ne pas exonérer les collectivités de la TVA plutôt que de leur restituer un ou deux ans plus tard amputée d’une part gardée par Bercy.
Enfin, il a proposé ce jeudi de « simplifier et alléger les normes comptables en matière de durée et de règles d’amortissement » pour permettre aux communes de dégager des marges pour investir. C’est une solution comptable qui ne fera qu’appauvrir les collectivités qui ne pourront pas au moment du renouvellement de leurs équipements bénéficier de ces prévisions puisque l’amortissement est une précaution de gestion. Cette mesure peut par contre constituer un levier utile si on l’accompagne d’une refonte des durées réglementaires des amortissements sur certains matériels ou certans équipements.
Le Premier ministre « a formulé des propositions de nature technique qu’on va examiner, qui ne correspondent pas aux demandes que nous avions formulées, c’est-à-dire un allègement dans la durée de cette charge qui, pour nous, est intenable« . « On avait demandé un allègement du calendrier et une baisse de volume » de baisse des dotations, « nous n’avons pas les deux ». « Maintenant il y a des propositions qui sur le plan technique doivent être examinées, elles peuvent fonctionner pour soutenir l’investissement sur le plan local », a-ajouté le Président de l’AMF.
Un vrai débat avec prise de position des députés paraît indispensable dans le PLF surtout avant… 2017 !
En savoir plus sur Roue Libre - Le blog de Jean-Marie Darmian
Subscribe to get the latest posts sent to your email.
Alléger les amortissements c’est la fausse bonne solution…. pour passer un cap difficile peut-être mais à terme cela diminue la trésorerie des collectivités qui en seront réduites à solliciter des emprunts de trésorerie et les prive aussi de toutes possibilités de dégager de l’autofinancement.
Bravo Jean-Marie pour ces analyses fines et percutantes. Je milite depuis des années pour une modification nécessaire du fonctionnement de la fiscalité de l’Etat vis à vis des communes. En effet, l’Etat, par la dotation globale de fonctionnement (DGF) attribue à ma commune de 2800 habitant la somme de 390 000 € par an, ce qui constitue 1/6 des recettes de fonctionnement de la commune (2 100 000 €). En revanche, sur les dépenses de fonctionnement, l’Etat ponctionne 20% de TVA, soit 380 000 €. Autant dire qu’il ne donne donc rien à ma commune. Par ailleurs, sur les dépenses d’investissement, la commune est contrainte de payer la TVA, qui est remboursée partiellement l’année suivante par l’intermédiaire du FCTVA. Par exemple, lors de la construction de la nouvelle école et du nouveau restaurant scolaire de la commune de Pompignac et des voies et réseaux du centre bourg, il y a eu en 2013 : 950 000 € de TVA à payer. Il a fallu emprunter cette somme pour payer la TVA. L’ETat a remboursé fin 2014, soit 1 an 1/2 après, la somme de 807 000. La commune a eu à assumer la différence et les frais financiers des emprunts. Tout cela pour créer de la trésorerie à l’Etat. Et, double peine, l’Etat diminue sa dotation globale jusqu’en 2017, tous les ans, pour aboutir à 30% de diminution du montant initial de la DGF. Très mauvais calcul, car si les finances de la commune sont diminuées, elle dépensera moins en fonctionnement et elle investira moins. De ce fait, l’Etat encaissera moins, beaucoup moins en TVA. Comment se fait-il que les pseudo experts de Bercy n’aient pas fait ce calcul ? La baisse de la dotation handicapera les communes et elle fournira moins de ressources à l’Etat, comme dans une opération blanche où tous les protagonistes seront perdants. Belle performance de nos experts !
Au lieu de cela, voilà ce qu’il faudrait pour soutenir l’économie du pays et permettre aux communes d’accomplir leur tâche correctement et d’investir pour le service public :
– supprimer la TVA sur le fonctionnement (c’est le cas pour les universités, pourquoi pas pour les communes ?)
– supprimer la TVA sur les investissements.
A partir de là c’est 20% de budget supplémentaire qui sera disponible pour les communes.
La perte pour l’Etat n’existera en aucune manière, car l’activité économique relancée assurera des rentrées fiscales issues des entreprises, qui auront pu recommencer à travailler. Rappelons que les collectivités locales assument 73 % de l’investissement public en France. Doper cet investissement permet de relancer l’économie et de fournir de substantielles ressources fiscales à l’ETat; Pourquoi ne pas le faire, au lieu d’être obnubilé par une stupide idée, instillée sans doute dans l’esprit des hommes politique, par les pseudo experts de Bercy, selon laquelle on diminue les déficits en supprimant les dotations. Non ! On fait des économies en augmentant les recettes par rapport aux dépenses. Que Bercy s’ingénie à aider les collectivités locales à augmenter leurs recettes, au lieu de les bloquer, et la situation économique de la France sera rétablie dans sa prospérité.
Denis Lopez