Il sera bientôt nécessaire d'aller voir chez les Grecs

Tous les regards étaient tournés vers la Grèce depuis quelques jours et ils scrutaient le résultat de l’élection du nouveau Président de la République. Certains étaient froncés et venaient des institutions internationales qui observaient avec inquiétude un foyer de contagion possible autrement plus inquiétant pour eux que la montée des idées d’extrême-droite. En effet c’est ce que l’on appelle désormais le degré d’acceptabilité des mesures qu’ils ont, de fait, imposées au pays qui risquait de basculer dans le rouge. Une couleur qu’ils n’aiment guère pour ne pas dire pas du tout. Leur seule obsession est depuis plus de 4 ans, alors qu’ils ont couvert tous les abus antérieurs avec la même duplicité que les banquiers ayant refilé des emprunts toxiques aux collectivités, de préserver un système financier privé aux abois. D’ailleurs dans les deux cas c’est la puissance publique qui a casqué pour éviter des faillites peu glorieuses pour les prêteurs.
Tout a en effet débuté en décembre 2009 soit il y a 4 ans quand l’Union Européenne a mis en garde la Grèce sur son déficit public. Trois agences de notation – Fitch, Standard & Poor’s et Moody’s – ont dans la foulée abaissé la note souveraine du pays. Le scénario est toujours le même… au début car pour la Grèce il a vite pris par la suite des allures de catastrophe puisqu’en avril 2010 avec 350 milliards d’euros de dette, la Grèce, privée d’accès aux marchés financiers, a sollicité l’aide internationale sous la menace. Les explications étaient pourtant nécessaires car ce gouffre de la dette avait bien des explications « politiques » : libéralisme plus ou moins exacerbé selon les tendances gouvernementales alternatives, fraude massive grâce au liquide, niches fiscales pour privilégiés, perfusion européenne ayant détruit la compétitivité, emploi public de complaisance… Bref depuis l’entrée de la Grèce dans l’UE en 2001 tout était « dopé » mais l’Allemagne avait fermé les yeux alors qu’au moment du passage à l’euro en 2001 et surtout la terrible « ardoise » de l’organisation des JO de 2004. La Grèce a alors vécu à crédit et largement au-dessus de ses moyens et les banques (surtout les allemandes) ne se sont guère préoccupées au début du XXI° siècle de sa solvabilité (sous-estimation du déficit public et de la dette). Elles savaient fort bien que l’UE serait obligée de casquer si l’euro était menacé ! Et le 3 mai 2010 la zone euro et le FMI lui accordaient ensemble – une première – 110 milliards d’euros de prêts en échange d’un… plan d’austérité pour ajouter le 27 octobre 2011 un second plan de sauvetage, combinant des prêts supplémentaires de 130 milliards d’euros à un effacement d’une partie de la dette détenue par les banques.
La crise financière allait engendrer comme le veut la logique une crise politique ! Le 31 mai de la même année le premier ministre Georges Papandréou annonçait un référendum sur ce plan, provoquant un tollé chez les partis de Droite. L’Union européenne menaçait de lâcher la Grèce si cette idée de consulter le peuple était maintenue. Le Premier ministre démissionnait le 9 novembre et il était remplacé par « l’homme de la situation » ancien vice-président de la BCE qui allait boucler la restructuration de la dette détenue par le secteur privé, pour ramener son endettement de… 160% du PIB à 120,5% d’ici 2020. Les prêteurs y perdent plus de 70% de leur mise mais continue à prêter de l’autre main pour que le pays continue à régler les intérêts de sa dette résiduelle ! L’austérité conduisait la Grèce au rang de « pays émergents » et à des convulsions politiques permanentes car aucune majorité n’émergera des divers scrutins. Un seul parti sera en progrès constants : celui défini comme la gauche radicale. Syriza devient vite le second du pays puis arrive en tête aux élections européennes et gouverne de nombreuses régions… Les menaces pleuvent sur la Grèce ! On vend tout, on supprime tout, on restreint tout, on détruit tout, on dénature tout, on privatise tout… mais rien n’y fait, les créanciers exigent encore 2 milliards de coupes supplémentaires pour être payé de leur dette !
La non-élection du Président de la République est en fait un début de Révolution contre un système qui ne marche pas, que tout le monde sait orienté vers les finances et le profit mais coupé des femmes et des hommes. C’est la faillite non pas de la Grèce mais des théories relatives à la résorption par l’austérité de la crise financière. C’est ce qui affole les boussoles des bourses, des milieux spécialisés et des tenants du capitalisme artificiel des profits « institutionnalisés » Syriza promet de créer 300 000 emplois « dans les secteurs public, privé et dans l’économie solidaire », d’étendre le nombre de bénéficiaires du chômage, de rétablir le salaire minimum, d’assurer électricité, nourriture et soins gratuits pour les foyers les plus pauvres, ou encore de baisser la TVA sur le fuel de chauffage… Tout en assurant de sa capacité à boucler des budgets à l’équilibre. La promesse de payer les échéances des créanciers privés qui arrivent à terme au printemps, soit 3,5 milliards d’euros n’y change rien.

Signe de défiance des marchés, la Bourse d’Athènes a cédé plus de 11% juste après le vote, tandis que l’obligation grecque à 10 ans, qui avait fini la semaine dernière à un taux de 8,5%, s’est envolée à 9,55%. A l’issue du vote, Alexis Tsipras n’a rien fait pour calmer les esprits en déclarant: « C’est un jour historique. Avec la volonté du peuple, dans quelques jours, les plans d’austérité appartiendront au passé, l’avenir peut commencer. ». On le saura fin janvier quand le peuple grec se sera exprimé!

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Cet article a 3 commentaires

  1. sillière

    la crise grecque est le fruit de l’aléa moral et la crise de régulation (corruption, fraude, crise des « subprimes »…) ; Le pays en a longtemps été victime (depuis son adhésion à la CEE avec comme révélateur les abus sur les subventions à l’agriculture) ; l’administration américaine, en connivence avec ses banques et les agences de notation, sanctionnent et ponctionnent volontiers aujourd’hui ce pays, principalement trahi par la banque « Goldman Sachs » !

  2. le chat François

    Bonne analyse qui prouve qu’une certaine conscience est en train d’émerger . Si cela pouvait être le début de la fin de ce système .. Mais les requins ont la dent dure et si les grecs donnent un exemple de ras le bol , ils vont payer cher leur volonté de changement . Pas question pour les technocrates d’accepter le risque que la contagion s’étende . Déjà en Espagne la loi durcit les mesures afin de pouvoir réprimer les manifestations de manière musclée comme de triste mémoire sous Franco . Les Espagnols « indignés » appellent cela la loi du bâillon . Il va être instructif de voir comment les techniciens de la pensée unique vont procéder pour empêcher Syriza de réussir l’émancipation de la Grèce . « Plutôt Hitler que le front populaire » est la devise à attendre de Bruxelles . Jamais les dirigeants Européens ne tolèreront qu’un échappatoire puisse donner des idées aux peuples saignés par la politique mise en place depuis des années . Et il ne faudra pas compter sur les médias pour nous informer de manière impartiale . Comme d’habitude en dictature , les résistants seront présentés comme des terroristes , et l’échec de Syriza validera qu’il n’existe aucune alternative possible , d’ailleurs Bruxelles a pris les devants en disant que quel que soit le résultat , le gouvernement devra se plier aux dictats Européens .
    Tout cela durera tant que les citoyens ne feront pas l’effort de s’instruire par eux mêmes ..

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