Supprimer c'est facile ! Construire beaucoup plus difficile !

La suppression des conseils généraux n’est pas une idée si révolutionnaire que ça. Elle a maintenant près de 20 ans puisque elle traînait dans les cartons du gouvernement Juppé. Il avait même fallu que le premier Ministre aille rassurer à Lyon le 28 mars 1996 pour s’adresser à 1 500 délégués des assemblées départementales prêts à entendre la sanction. L’association des Présidents des Conseils généraux était alors largement à droite et son Président aveyronnais Jean Puech appartenait à la Droite au pouvoir. Les élus locaux s’étaient déjà également inquiétés de la réforme de l’Etat. La déconcentration n’est « pas synonyme de recentralisation au niveau local de ce qui aurait été mal administré au niveau central », avait insisté le futur Ministre de l’Agriculture . Il faut « s’engager en faveur de la déconcentration avec la même ambition dont nous avons fait preuve pour la décentralisation», avait répliqué Alain Juppé. A conserver en archive !

Les présidents de conseils généraux avaient encore souhaité être davantage «associés» aux travaux du gouvernement sur la réduction du temps de travail. Enfin, ils affirmaient une soif de reconnaissance : «L’Etat doit leur reconnaître leur légitimité démocratique au-delà des inaugurations », avait lancé Jean Puech, du haut de la tribune, tandis que Pascal Clément, président du conseil général de la Loire, se lançait dans un plaidoyer en faveur du département. Le Premier ministre (Alain Juppé) avait pris la chose en riant, assurant qu’« il n’y avait aucun projet dans les cartons du gouvernement visant à supprimer les départements » (sic) Il n’empêche. Claude Lise, président du conseil général de la Martinique, avait trouvé une belle image illustrant les rivalités entre l’Etat et les départements. Chez lui, on chassait avait-il dit deux sortes de moustiques. La fonction publique s’occupait des « moustiques de l’Etat », les fonctionnaires territoriaux exterminaient les «moustiques du département». Rappelons que c’était il y a un peu plus de 18 ans ! Et depuis à de multiples reprises le scénario s’est renouvelé : du haut de toutes les tribunes les orateurs ont plaidé pour a défense des assemblées départementales. Désormais c’est une réalité politique et l’opinion dominante totalement inconsciente du rôle fondamental que joue le Conseil général dans sa vie quotidienne.

Ayant comme responsabilité directe tout ce qui touche à l’enfance il a une action via la Protection Maternelle et Infantile sur les mères de famille et leur progéniture. Il agit aussi financièrement dans le domaine de l’assistance à l’autonomie des personnes âgées en passant par les transports scolaires, les collèges, les jeunes en difficultés, les adultes relevant du RSA, les handicapés et tant d’autres secteurs qui couvrent tous les âges et surtout les couches sociales en manque de solidarité concrète. Même imparfait le système fonctionne pour la très grande majorité grâce à la présence au plus près des gens des services départementaux… Or dans l’annonce « vallsienne » du même type que celle de Sarkozy sur la suppression de la taxe professionnelle, personne ne sait à quel niveau se situera la prise en charge de cette solidarité qui en Gironde approche les 800 millions. Que fera-t-on ? Supprimera-t-on le RSA ? Abandonnera-t-on l’APA individualisée ? Laisserons nous les handicapés dans la plus grande précarité ?

Au nom des économies consenties à cette Europe qui n’a qu’une seule obsession éviter la faillite des banques allemandes, françaises et dans une moindre mesure italienne on tue la seule collectivité territoriale au contact de chaque individu, du pus jeune au plus âgé. Pour ne pas faire supporter les pertes aux banques allemandes et françaises, on se dit qu’on allait prêter l’argent du contribuable pour permettre aux établissements bancaires de recouvrer leurs créances des pays du sud. En échange de quoi on a imposé une torture médiévale à la Grèce. L’austérité n’est la solution ni à une crise bancaire, ni à une panique, qui sont en fait les vraies raisons de la crise actuelle. Il aurait fallu que le secteur public maintienne ses dépenses pour que le secteur privé réduise ses dettes. Or on va en France immédiatement assister à une décélération des investissements dans les départements avec beaucoup moins d’ouverture de chantiers compte-tenu du transfert des compétences déjà programmé pour 2016 vers les métropoles ou les communautés d’agglomération. La vie associative, sportive, culturelle, la citoyenneté (autant de gros mots) va s’effondrer comme un château de cartes.

Par ailleurs les départements participant aux investissements publics globaux (collèges, routes, ouvrages d’art, patrimoine environnemental…) se montant en 2011 à 43,3 milliards d’euros on va vers un impact sur l’économie et l’emploi de proximité. Pas un euro des conseils généraux ne va pas directement ou indirectement dans le monde du profit, dans l’économie virtuelle ! Ce qui semble une mesure « salutaire » ne verra jamais le jour car lentement émergeront les conséquences concrètes pour l’ensemble du pays d’une effet d’annonce. Le seul vrai débat qui vaut c’est celui de la clarification des compétences et des ajustements des ressources… il demande du courage discret et un travail de fond sérieux !  Attendons les réponses sur la distribution des charges départementales…pour savoir qui va les accepter à ressources constantes!

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Cette publication a un commentaire

  1. Michel

    Cette annonce est un effet du « changement vallsien », l’illustration d’une stratégie personnelle de conquête du pouvoir élyséen par un homme qui veut (tiens! encore un!) incarner la rupture… La fusion des régions (on va voter pour elles en mars 2015 sur un territoire qui ne sera plus le même 1an1/2 après, bonjour la lisibilité!), la suppression des départements (qui prendra en charge la solidarité? qui assurera la péréquation entre la métropole et le monde rural?), tout cela procède d’une vision populiste qui veut faire porter le poids des économies à ces collectivités territoriales terriblement dépensières… d’ailleurs, avez vous remarqué? ce matin sur Inter une Marylise Lebranchu pitoyable parce que désavouée, indiquait que l’appareil d’État (préfets, sous-préfets) resterait bien en place, lui!!..
    Un Parti socialiste jacobin et social-libéral est il encore un parti progressiste?…

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