"Cela ne changera rien au destin de l'Humanité"… avait dit Langlois !

Il est né le royal enfant, sonnez cornemuses et clarines… Il est né et les journaux télévisés étaient en direct de la clinique où une porte devait s’ouvrir sur le rejeton porté dans le monde par une mère et un père promis à un destin couronné. La béatitude absolue. L’extase populaire. L’attendrissement complet. La reconnaissance passionnée. Dommage que Léon Zitrone ait rejoint depuis trop longtemps les Champs Élysées des commentateurs d’événements princiers et que Stéphane Bern n’ait pas sa carte de journaliste, car les propos accompagnant cette sortie manquaient singulièrement de l’emphase indispensable à la magnificence des circonstances. On aurait dû rappeler Léon du diable vauvert où il est désormais installé, pour qu’il puisse rappeler pourquoi le « baby » descendait de la cuisse de Jupiter. Cet homme là, qui se faisait porter ses bagages par son épouse lorsqu’il voyageait, avait une autre faconde et une autre dimension dans le verbe. Vraiment, les informations capitales distillées pendant que la porte était fermée et qu’il n’y avait rien à voir, manquaient de lyrisme et de gloire. Enfin, peu importe, l’essentiel c’était que les photographes et les caméras puissent immortaliser l’enfant de droit divin.
Dans les chaumières britanniques, les pavillons du monde entier, les logements HLM des quartiers sensibles français, les favelas brésiliennes ou les îles du bout du monde, la part de rêve est essentielle pour panser les maux du temps présent. Alors, autant se pencher sur le berceau de celui qui sera roi dans 60 ans si, enfin, son arrière-grand-mère usée par le boulot accepte de prendre sa retraite. Les Pays-Bas ont vu leur Reine se retirer, les Belges se morfondent depuis que leur roi a quitté son trône et la Principauté de Monaco attend avec impatience la venue du saint esprit pour qu’un héritier se profile…Une angoisse populaire insupportable s’empare de l’opinion publique quand les couronnes vacillent sur les têtes des gens réputés supérieurs par leur seule naissance a tous les autres. Il fallait la naissance du fils de Kate et William.
J’ai une pensée toute particulière, en ce moment de délire collectif pour un enfant tombé dans la dentelle, le fric et le protocole, quand d’autres chutent sur la misère, la malnutrition et la violence, pour Bernard Langlois. Vous souvenez-vous de ce vrai journaliste qui avait commis un véritable crime de lèse majesté en hiérarchisant l’information d’une autre manière que celle que les journaux télévisés du service public ont choisi, en ce jour d’annonce faite au monde ! Rappelez-vous, si vous avez les décennies nécessaires, ou découvrez si ce n’est pas le cas. Nous sommes le 14 septembre 1982 et la Gauche vient de « déverrouiller » un peu la télévision d’État. Pour avoir mis en balance deux décès appris le même jour, ceux de Bashir Gemayel et de la Princesse Grâce de Monaco, au cours de l’éditorial qui ouvrait le journal d’Antenne 2. Il fut proprement viré ! Que pesait la mort d’une homme politique clé au Moyen-Orient face à l’accident d’automobile de l’égérie des magazines, que l’on ne qualifiait pas encore de « pipole» ?
C’est pour avoir minimisé, de manière ironique, la disparition tragique de Grâce qu’il avait été déplacé puis finalement licencié et contraint au départ. Son propos, légèrement adapté, aurait été ce soir d’une lucidité décapante : « cela ne changera rien au destin de l’humanité. Juste un deuil ordinaire, la peine ordinaire d’une famille célèbre qui nous était familière par la grâce des gazettes ». Allez un petit effort et vous trouverez le mot juste à placer dans ce propos objectif ! Il avait souligné que cette mort détestable sur le fond était moins importante que l’assassinat, survenu le même jour, du président Bashir Gemayel, au cœur des affrontements sanglants du Liban ! Il qualifia, cet inconscient, également Monaco de « caillou cossu », de « royaume d’opérette », ce qui put donner à ses détracteurs du grain à moudre, attendu que cela pouvait être considéré comme une offense faite à État étranger, qui plus est ami de la France (et d’une influence énorme sur cette dernière et les affaires du monde). Il se moquait alors non pas de la mort de la princesse de Monaco, qu’il tenait pour une femme de qualité, mais de l’importance, selon lui disproportionnée, que la presse accorda alors à celle-ci, notamment la presse dite à l’époque « presse du cœur » (« poids des mots, choc des photos », dit-il au cours de sa présentation). Quel courage ! Quel exemple de rationalité ! Quand on connaît, avec le recul du temps, les conséquences planétaires des deux événements et que l’on sait ce qu’il advint de Monaco et du Liban plus tard, on mesure le courage des ces propos jugés indignes d’un éditorialiste !
Que dirait du cinéma princier britannique, Pierre Desproges qui avait courageusement pris la défense de Bernard Langlois dans le Tribunal des Flagrants délires ? Il avait alors résumé à merveille (comme toujours) la situation : « (…) ce journaliste renvoyé promptement pour avoir, si j’ai bien compris, ramené à de justes proportions, un accident d’automobile survenu à une ancienne copine de Cary Grant, reconvertie dans l’opérette immobilière sur la Côte d’Azur… (sic) » 
Allez, dans le fond, tout n’est pas négatif. L’audition inutile de Jérôme Cahuzac a été escamotée. Les questions au gouvernement de l’UMP, cyniques et provocatrices ont été effacées. En Syrie, en Egypte, en Afghanistan, au Mali et en bien d’autres lieux, les massacres ou les guerres ont pu enfin bénéficier d’un répit médiatique. Bourdouleix est arrivé à se faire oublier. Jacques Chirac n’ira pas cette année à Saint Tropez pour bronzer. Ah ! au fait, en Savoie une petite fille de 5 ans a été écrasée par un poids lourd en revenant de la boulangerie à vélo…

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Cet article a 7 commentaires

  1. mansencal

    que la vérité

  2. Eric Batistin

    Un enfant dans le dos.

    Et bien, puisque nous en sommes aux nouvelles d’importance, aujourd’hui, sur le marché de Annot, dans les Alpes de Haute Provence, une femme de l’inspection sanitaire a fait un enfant dans le dos à des anciens pourtant respectables.

    Un couple d’italiens, marchands de légumes.
    Elle, vielle femme à la voie chantante, que j’appelle la Mama, qui à chaque fois décide de rajouter dans mon panier les légumes et fruits qu’elle ne pourra vendre, au lieu de les jeter.
    Lui, Antoine, vieux bonhomme qui peine à marcher, à la retraite et à qui il a été interdit d’aider sa femme, sauf à prendre le statut d’auto entrepreneur.
    Aujourd’hui, Antoine, avec sa jambe folle, a décidé de poser les caisses de légumes sur l’étal et d’aller ensuite chercher les étiquettes au camion.
    Le voilà au bout de l’étal, inscrivant tranquillement l’origine, la qualité et le prix des fruits et légumes, caisse après caisse, tout en discutant avec les anciens du village.
    Il avance doucement, les clients ont confiance, cela fait trente années que la Mama fait les marchés, et elle n’a jamais volé personne sur le prix, bien au contraire !

    A l’autre bout de l’étal, encadrée, accompagnée de deux gendarmes en uniforme, surgit la femme de l’inspection sanitaire.
    Pas d’étiquettes de ce coté, Antoine n’en est qu’à la moitié du banc.
    Résultat trois mille euros d’amende, pour défaut d’affichage, au bas mot, on en saura plus quand le courrier du tribunal arrivera.
    Tout l’été qui vient ne suffira pas à la Mama et son homme pour trouver en bénéfice de quoi payer ce vol qualifié.

    A midi, aux poubelles du marché se trouvaient aussi les invendus du supermarché.
    Ceux de la Mama sont tous partis dans des coffres de voitures, gratuitement, soigneusement présentés, la partie abimée vers le haut, pour compotes et confitures.

    Je hais le roi du marché international des fruits et légumes, et toute sa descendance, qui nous fait bouffer de la merde et tue nos anciens, et jette nos enfants dans les bras du vice et de la délinquance.
    Et mon gouvernement qui suit à pas menus et discrets cette course à la destruction du tissu social, je dis merde !

    En effet, qui après ça osera suivre l’exemplaire Mama, son courage aux heures froides des matins blêmes, son assiduité et son humanisme ?.

    Batistin
    _ancien marsouin du 2°RIMa
    _inscrit Marine Marchande,
    4 années d’activité à la pêche en mer
    _artiste -Maison des artistes_

  3. morland

    Mon fils est né le 20 juillet l’année dernière, je suis si déçu que ce petit prince d’angleterre ne soit pas venu au monde le même jour que le mien… je scrutais sa venue au monde avec bien plus de ferveur que la reine mère!! jamais je ne m’en remettrai, c’est certain…

  4. charliedenose

    Batistin faut rien lâcher, faut relayer cette info, la faire monter. Je vais essayer d’aider. Pire que les chiens qui nous gouvervent il y a tous leurs sbires, infâmes lèche-culs, fachos dans leurs niches administratives … Faut arrêter ça. Au coup par coup. On se parle au tel. pour compléments d’infos. Chiens. Merde, j’ai envie de vomir. De leur vomir dessus.

    Alain-Gilles Bastide
    Pdt.Fondateur de l’Association des cyber-journalistes.

  5. Mathilde

    Le message de « Morland » me fait rire:je viens juste de réaliser que le bébé anglais est né le même jour que mon dernier petit prince…

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