Une raffarinade supplémentaire de haut niveau !

On attribue à tort à Jacques II de Chabannes de La Palice quelques propos d’une banalité désolante, et il est donc entré par effraction dans l’Histoire de France non pas pour sa mort héroïque à Pavie mais pour son épitaphe, transformée en réflexion exprimant une évidence ou cherchant à démontrer quelque chose qui se démontre par soi-même. On sait que celle qui figure sur son tombeau a donné lieu à une interprétation moqueuse alors qu’elle n’était destinée qu’à vanter sa vaillance au combat. « Un quart d’heure avant sa mort, il était encore en vie »… pourrait bientôt s’appliquer en politique à Nicolas Sarkozy, qui a trouvé avec Jean-Pierre Raffarin, son « La Palice ».
Ses bons mots pourraient même être répertoriés dans un recueil intitulé « Les raffarinades »… et il pourrait le dédicacer à ses amis du Sénat. Là, il y est allé de son constat impayable sur la situation de l’ex-Président de ce qu’il restait de la République sous son mandat. Une série de « raffarinades » de haut vol. « Notre route est droite, mais la pente est forte » avait-il affirmé, et Jean-Pierre Raffarin pourrait mettre cette phrase en exergue de ses propos sur la situation actuelle et future de son mentor. Le grand philosophe du Poitou a en effet déclaré le plus sérieusement du monde : « je suis triste pour la démocratie française aujourd’hui, de voir à quel point la justice fait du spectacle, et mon sentiment c’est que le spectacle actuel de la justice a un seul premier rôle, c’est Nicolas Sarkozy ».
Affaires Bettencourt, Guéant, Tapie… (NDLR : il oublie Karachi, les sondages, les comptes de campagne et autres broutilles), « quelle est la cible derrière tout ça ? Toujours Nicolas Sarkozy ! Au fond, la chasse à Sarko engagée pendant son quinquennat est aujourd’hui poursuivie. Et quand j’entends Mme (la ministre Fleur) Pellerin dire qu’il y avait « système organisé « , mon sentiment personnel c’est qu’il y a plutôt campagne orchestrée », a affirmé le sénateur de la Vienne. Par qui ? « Ceux qui ont intérêt à l’affaiblissement et du quinquennat de Nicolas Sarkozy et de la personne de l’ancien président », a-t-il répondu sans citer de nom. « Ce que je constate c’est qu’il y a une orchestration. Je demande à la justice d’être plus sobre ». Ouf ! c’est un recueil impressionnant de vérités interprétables dans tous les sens. D’abord faut-il rappeler qu’en matière de « sobriété » judiciaire, du temps de l’UMP, on était dans l’idéal absolu et que le président n’a jamais fait du « spectacle » dans l’affaire Clearstream (au fait où en est-on?) ou dans ses relations avec le système qu’il méprisait et dénigrait ? Ensuite, et c’est bien entendu une vision partisane, aucune « cible » n’a été poursuivie par les « chasseurs » sarkozistes ! Cet homme là, à l’évidence, n’a jamais désigné à sa meute un « gibier » à pendre à un croc de boucher ou à abattre froidement à bout portant. Enfin, Raffarin, musicien d’un groupe de rock, s’y connaît en matière « d’orchestration » et croyez le, il n’a jamais vu à Matignon, où arrive chaque matin des rapports de tous les services de l’État, des campagnes « orchestrées » depuis Bercy, la Place Bauveau ou l’Élysée. Ou bien Jean-Pierre Raffarin a une perte inquiétante de mémoire, ou alors il se fout de tout le monde en tentant d’expliquer les multiples casseroles attachées au passage de l’ex-premier flic de France à la tête de la France.
Chaque jour l’étau se resserre sur celui qui va tenter de s’échapper par l’exploitation de vices de formes ou de biais juridiques divers. On attend dans quelques semaines la décision sur des comptes de la campagne présidentielle absolument non-conformes. La règle pour les autres, mais de la « chasse » pour Raffarin ! Le verdict est attendu avec une pointe de fébrilité à l’UMP : «C’est nous qui avons emprunté 10 millions pour Sarkozy. Si on ne se fait pas rembourser, ce sera un coup très très dur, lâche à 20 Minutes, Claude Goasguen. En fait, sans ça, je ne sais pas comment on pourra s’en sortir financièrement…» mais, bien entendu, c’est de la faute à un complot socialiste. Affaire des primes Guéant : incroyable ! le Ministre Sarkozy ne savait pas ce que faisait son Directeur de cabinet faisant valser les valises de billets… Rien su, rien vu, rien vérifié ! C’est encore un complot de gens sans vergogne qui durant 2 ans ont posé des liasses de billets sur le bureau de son bras droit !
Pour Tapie, l’ex-président n’a jamais été informé des négociations, de leur montant et bien entendu c’est un Président et un ministre socialistes qui ont offert un pont d’or public à l’homme qui a eu, dans son porte-feuille, une société que Raffarin aurait aimé : « la vie claire ! ». « Début juillet 2004, quand Nicolas Sarkozy était ministre de l’économie, Claude Guéant m’avait fait venir dans son bureau et m’avait demandé d’accepter une solution transactionnelle. Je lui ai dit ‘non' », a affirmé M. Aubert, patron du CDR de fin 2001 à fin 2006. Mais il est socialiste, donc suspect. Tapie qui n’a aucune habitude des complots a oublié qui il a rencontré et avec qui il a causé. Mais surtout pas avec Sarkozy ! C’est un vaudeville tragique pour les finances publiques !
Les sondages commandés à Buisson et payés avec des fonds publics de l’Élysée ? C’était à la demande de DSK qui voulait savoir s’il était populaire… et en l’occurrence il n’y pas l’ombre d’un doute sur le montage d’un complot pour l’éliminer de la vie publique ! Raffarin vous le dit : la justice est condamnable car elle débusque sans cesse la même personne, qui tirait les ficelles derrière le castelet pour les guignols.
Le spectacle continue. Les dialogues sont de Jean-Pierre Raffarin… qui sait faire rire. Tenez :
J’ai bon caractère, mais j’ai le glaive vengeur et le bras séculier. L’aigle va fondre sur la vieille buse.
– C’est chouette ça, comme métaphore.
– C’est pas une métaphore, c’est une périphrase.
– Oh fait pas chier !
– Ça, c’est une métaphore.

C’est du Audiard dans « faut pas prendre les enfants du bon dieu pour des canards sauvages ! ». Dédions ce constat à Raffarin le philosophe !

Ce champ est nécessaire.

En savoir plus sur Roue Libre - Le blog de Jean-Marie Darmian

Subscribe to get the latest posts sent to your email.

Cet article a 2 commentaires

  1. Eric Batistin

    Est-ce une impression, Monsieur, ou vous avez de plus en plus de difficultés à trouver une quelconque excuse aux dérives théâtrales du discours politique ?
    Plus rien ne semble avoir d’autre sens, dans le monde politique, que la recherche incessante d’une réussite personnelle. Et ce de toute évidence au détriment du bien public.
    Est-ce donc à ce point vain de croire encore au pouvoir républicain du politique, ou définitivement les banquiers auront pris le dessus sur la démocratie ?

  2. «Je suis triste pour la démocratie française de voir à quel point notre justice fait du spectacle. Aujourd’hui, elle a un seul premier rôle : Nicolas Sarkozy. » L’ancien Premier ministre a enfoncé le clou : «Dans toutes ces campagnes, la cible est toujours la même : Nicolas Sarkozy.» Mais qui est derrière? «Ceux qui ont intérêt à l’affaiblissement, et du quinquennat de Nicolas Sarkozy, et de la personne de l’ancien président», a-t-il répondu sans citer de nom. «Ce que je constate c’est qu’il y a une orchestration», a-t il affirmé. Sans le dire, il soupçonne les socialistes. «Au fond, la chasse à Sarko engagée pendant son quinquennat est aujourd’hui poursuivie. Et quand j’entends Mme (la ministre Fleur) Pellerin dire qu’il y avait un système organisé, mon sentiment personnel c’est qu’il y a plutôt campagne orchestrée», a affirmé le sénateur de la Vienne. Jean-Pierre Raffarin a alors estimé que «la justice spectacle fragilise la démocratie. La justice sereine conforte la démocratie. Elle gagnerait aujourd’hui en sobriété.» Questionné sur la tentative de médiation de Nicolas Sarkozy, alors ministre de l’Economie pour régler le conflit entre Bernard Tapie et le Crédit Lyonnais, celui qui était alors Premier ministre a répondu que «bien sûr» il était au courant. Pour lui, il s’agissait alors simplement d’«éviter des frais de justice» et de rechercher un accord entre les parties pour «éventuellement stopper la procédure» judiciaire. «Donc il est clair que cela a été géré par Bercy. Depuis le début du dossier Crédit lyonnais c’est Bercy qui a géré.» En tout cas «il n’y a pas eu de décision quant à l’arbitrage du temps où j’étais Premier ministre» (2002-2005), a-t-il encore assuré.

Laisser un commentaire