Va-t-on vers une France fédérale?

L’acte 3 de la décentralisation aiguise les appétits et ce ne sont pas les hésitations du gouvernement qui va diminuer la voracité des régions. L’association (ARF) qui les regroupe joue le rôle de lobby permanent à tous les échelons de l’État, afin de récupérer le maximum de pouvoirs et de compétences dans une période où, justement, le pouvoir central est très tenté de se délester du maximum de prérogatives. En fait, deux visions de la République s’affrontent. L’une consiste à maintenir la spécificité d’un pays solidaire autour du bloc local et l’autre va, sans le dire, vers un système fédéral avec des régions prédominantes. « Les engagements signés avec le président de la République et le Premier ministre nous semblent reniés, parfois même remis en cause. […] Il ne faudrait pas que le texte soit en recul par rapport à l’accord signé avec l’Élysée ». Le Président de l’ARF est sans nuance et prêt à dénoncer son propre camp s’il n’obtient pas un rôle important de chef de file dans la Banque publique d’investissement. Il a d’ailleurs récemment, dans la plus grande discrétion, rencontré le Président de la Caisse des Dépôts et Consignations à Bordeaux pour obtenir son soutien.

Les régions doivent être au cœur de l’acte 3 de la décentralisation et récupérer les moyens de financement. Dans le collimateur de l’ARF: la haute administration de Bercy, qui aurait pesé de tout son poids pour plafonner la présence des régions dans les différentes futures instances de la BPI. En fait la tendance n’est pas à la régionalisation outrancière car elle creuserait inexorablement les inégalités territoriales. Les Préfets l’ont d’ailleurs bien compris, en réclamant que les pouvoirs attribués aux Préfets de régions soient renforcés dans un certain nombre de secteurs. Le non cumul des mandats va décupler la volonté des Présidents des régions d’obtenir un rôle supérieur à celui qu’ils exercent actuellement au plan national.

L’ARF réclame deux postes supplémentaires pour les régions au sein du comité national d’orientation et un à deux sièges supplémentaires au sein du conseil d’administration. A ce jour, le projet de loi n’en prévoit que deux sur un total de 15 membres au conseil d’administration. « Il faut donner une réelle participation et un réel poids aux régions », sinon « ça ne marchera pas », a insisté Jean-Paul Huchon. Et le président de la région Ile-de-France de vitupérer contre « Bercy, qui fait comme si nous étions soit des clientélistes, soit des analphabètes »… La revendication est claire : ils veulent devenir les « patrons » de l’ensemble d’une certain nombre de filières et obtenir la constitution de véritables exécutifs locaux à l’espagnole ou à l’allemande. Et, sur ce point, ils savent pouvoir compter sur leur poids européen, d’où leur seconde revendication confier la gestion des fonds européens de la prochaine génération aux régions, actée par le « pacte » du 12 septembre entre l’Élysée et les régions. Désormais, personne n’est très pressé de voir cette solution mise en œuvre, car elle ne permettrait pas réellement une territorialisation des crédits. Ce n’est pas tout…

Dans une prise de position relative aux Assises nationales de l’enseignement supérieur et de la recherche, l’Association des régions de France (ARF) se félicite que le gouvernement, à travers les orientations qu’il y a présentées, reconnaisse « le rôle incontournable des régions dans ce secteur ». Dans la contribution qu’elle a elle-même apportée à ces assises, l’ARF a fait des propositions dans le sens d’une responsabilité accrue des régions dans l’élaboration des stratégies en matière d’enseignement supérieur, de recherche et d’innovation. Les régions prônent notamment une contractualisation pluriannuelle État-régions-établissements et souhaitent participer à l’élaboration de l’offre de formation afin, explique l’ARF, « de permettre une meilleure adéquation avec les besoins des territoires ». Elles entendent aussi jouer un rôle prépondérant dans des domaines aussi variés que le soutien à l’internationalisation de l’enseignement, le logement et les conditions de vie étudiants, les politiques de dialogue sciences-société ou encore les politiques de transfert de technologies et d’appui à l’innovation, dont elles souhaitent avoir l’attribution. Il reste à savoir si elles prendront en charge le financement de leurs décisions et si on s’oriente vers une enseignement supérieur à plusieurs vitesses.

Dans le secteur de l’économie, les demandes sont les mêmes. Dans les transports on est parti pour une organisation régionale. On évoque aussi la possibilité de récupérer la protection de l’environnement, et pourquoi pas, le logement ou les déchets. Bref il n’y a qu’une seule compétence qui échappe à la voracité régionaliste : le volet social et la solidarité active. Étonnant !

Ce champ est nécessaire.

En savoir plus sur Roue Libre - Le blog de Jean-Marie Darmian

Subscribe to get the latest posts sent to your email.

Cette publication a un commentaire

  1. Vanmeulebroucke Guy

    Bonjour,

    Un centralisme régional ???Les communes et départements n’auront qu’à bien se tenir sans doute ???Il y a des limites à la désunion républicaine!

Laisser un commentaire