Le jour qui précède les vacances reste le plus beau car c’est celui de l’espoir… surtout quand il débouche sur un voyage. Échapper à la pesanteur du quotidien, à ses contraintes prévues ou imprévues en entrant dans un autre monde reste un privilège en cette période particulièrement oppressante. J’en ai conscience car maintenant, l’évasion devient un luxe. Elle nécessite d’abord les moyens matériels de la mettre en œuvre et, ensuite, il est indispensable d’avoir le temps de s’offrir pareille envolée, ce qui devient rare. Certes les « conseilleurs » rappellent sans arrêt qu’il faut savoir justement couper avec le réel pour aller chercher le rêve ailleurs, mais ils ne disent pas comment on y arrive quand les engagements constituent des compagnons de toutes les routes empruntées. Ils s’incrustent dans les bagages et donnent le sentiment, quand on parvient à s’en défaire, d’une légèreté absolue. Celle qui permet vraiment de se sentir…en vacances.
Le plaisir est infiniment plus fort quand on songe que c’est un vraie chance que celle de pouvoir plonger dans une culture différente et de se préparer à en mesurer les apparences. On ne parvient jamais à vraiment s’imprégner d’un ailleurs quand on se pare des atours du touriste. Le savoir constitue la meilleure prévention du risque majeur qui est celui de revenir à la case départ chargé de fausses certitudes et avec la sensation que l’on sait tout d’une destination où on a simplement écumé le bouillon de la vie ! Je déteste les gens qui reviennent avec des certitudes, alors qu’ils sont seulement partis pour fuir les leurs, pour plonger dans le bain lénifiant de l’insouciance. Se laisser porter par les événements sans aucune envie de révolte, se permettre de regarder au-delà de ce que l’on veut absolument vous montrer, rompre avec un rythme institutionnel stérilisant, retrouver purement une certaine liberté, échapper au regard critique des autres, perdre ce que l’on pense être essentiel…. devenir anonyme parmi la foule : autant de bonheurs procurés par les escapades lointaines !
S’oublier grâce à l’oubli général. Vivre en apesanteur sociale. S’adapter au lieu que l’on vous impose. Accepter la différence comme une chance. Le voyage permet de mesurer les limites de l’horizon des pouvoirs que l’on pense avoir. Le salut passe par ces « cures d’ailleurs » qui déconnectent des palais où l’on se prend trop facilement pour des puissants. Les plus beaux voyages sont ceux qui justement rendent humbles par la découverte de milieux beaucoup plus authentiques que les décors du quotidien. Inutile de se bercer d’illusions, on ne vous fait souvent voir, en pensant vous faire plaisir, que les plus splendides apparences, mais autant se laisser emporter sans résister mais sans être dupe. Il ne peut donc y avoir pour moi de véritable escapade réussie sans emprunt des sentiers non battus ! Les plus révélateurs sont ceux qui serpentent dans les marchés.
On y trouve la vérité d’un pays avec ses visages, ses rites, ses produits, ses échanges, ses conciliabules et surtout ses rencontres. Un geste suffit pour être compris. Un sourire permet d’être aimé. Une marque d’intérêt donne confiance. Pour ma part, je ne reviens pas sans cette promenade dans les couleurs, les senteurs, les saveurs de ces espaces commerciaux magiques. Mes vacances, je les passerai sur les marchés du monde, les vrais, les moins aseptisés, les plus réduits comme les plus vastes. Il n’y a pas de repères culturels plus essentiels pour abandonner ses soucis que de laisser flâner ses sens devant des étals faméliques ou plantureux. A Ouagadougou, à San Pedro d’Atacama, à Samarcande, à Québec, à Vérone, à Fez, à Assouan, à Gdansk, à Prague, à Tarascon ou à Vienne, pas un marché ne ressemble à un autre, et tous fleurent bon la vérité sur les Peuples. Pour Jean-Jacques Rousseau « il y a bien de la différence entre voyager pour voir du pays ou pour voir des peuples. Le premier objet est toujours celui des curieux, l’autre n’est pour eux qu’accessoire ». Pourvu que je ne tombe jamais du côté de ceux qui se contentent de « voir » sans comprendre.
Allez, je tire ma révérence pour une quinzaine de jours… et sans me prendre pour Ulysse, j’espère revenir heureux d’avoir fait un beau voyage ! Et vous allez donc faire un tour sur un marché… c’est le meilleur moyen de vivre des vacances dans la proximité ! Moi, je laisse provisoirement mes boulets en vente au bord du chemin !
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Bon voyage
bonne évasion….pour le corps , pour l’esprit….revenez avec de belles histoires ….bon repos monsieur le maire…….
j’ai oublié : je ne sais pas s’il y aura beaucoup de clients pour vos boulets,je ne veux pas alourdir vos vacances mais il y a de grande chance que vous les retrouverez……mais j’espère que le « ailleurs » vous les feront oublier quelques jours………..
bon voyage ! j’espère que tu me contera ça avec le verbe de Homère !