Il n’y a pas de métier plus égoïste que celui de journaliste. On y travaille avec à l’esprit la possibilité d’obtenir ce que l’autre n’aura pas, afin d’obtenir le fameux « scoop » qui fait de vous un héros censé doper l’audimat, l’auditoire ou les ventes ! L’affaire du titre de Libération provoque l’indignation de la corporation qui y voit un outrage aux bonnes mœurs d’un milieu peu habitué à transgresser les règles de la bienséance. Dans le fond, cette audace permet de vérifier l’état réel du système médiatique. Revenons un peu en arrière avec cette visite présidentielle au Salon de l’agriculture suivie par une meute de journalistes avides de claques sur le cul des vaches ou de dégustations flatteuses pour les producteurs tous, bien évidemment, meilleurs les uns que les autres. Nicolas Sarkozy serre de nombreuses mains dans l’assistance et il est rayonnant car il capte l’attention des micros et des caméras. Un homme non identifié refuse sa poignée de main en disant « Ah non, touche-moi pas ! Tu me salis ! ». Nicolas Sarkozy réplique en continuant son chemin : « Eh ben casse-toi alors, pauv’ con ! ». Ils sont nombreux à le voir, à l’entendre, mais la cohue permet de faire semblant de n’avoir rien vu, rien entendu… Mieux, il paraît que certains des « rapporteurs » de l’actualité se marrent de cette saillie d’un homme n’ayant peur de personne ! Un acte de courage… en quelque sorte.
Un journaliste d’un collectif de pigistes est présent et filme la scène. Le jour même, il propose la vidéo au journal Le Parisien qui accepte de la mettre en ligne sur son site Internet, où elle rencontre un succès immédiat. Elle est également vendue à l’Associated press dès le lendemain et est largement diffusée sur une chaîne américaine d’informations. Au nom du droit de citation, les grandes chaines de télévision françaises diffusent la vidéo dans leurs journaux, non sans demander, pour TF1, l’autorisation à l’Élysée. Une sage précaution… et une méthode qui n’a pas lieu ailleurs dans le milieu médiatique, bien entendu ! Les caciques de l’UMP y voient seulement une « réaction humaine ! ». Et là, les commentateurs attitrés du petit matin ou du soir n’y ont pas vu autre chose qu’une réaction épidermique… n’ayant aucune connotation vulgaire ou outrageante pour celui à qui elle était destinée.
Mieux, protégé par son immunité présidentielle, l’auteur d’un propos public outrageant pouvait se permettre d’assumer pleinement ses propos, déclarant : « J’ai sans doute les défauts de mes qualités, mais il est difficile, même quand on est président, de ne pas répondre à une insulte (sic). Ce n’est pas parce qu’on est le président qu’on devient quelqu’un sur lequel on peut s’essuyer les pieds (sic) », estimant cependant au surlendemain de son altercation verbale qu’il aurait « mieux fait de ne pas lui répondre ». Car il faut l’admettre, traiter un simple quidam de « c.. » relève de la réponse adaptée à une insulte faite à la morale républicaine. Peu d’éditorialistes causant dans les postes ou devisant entre potes, jouant les rôles du bon, de la brute et du truand sur les plateaux lumineux des télévisions vont s’indigner de cette apostrophe d’un homme représentant la République. S’il n’y avait pas eu Internet, nul n’aurait même su que pareille attitude puisse exister. Elle aurait été occultée par la conspiration du silence qui souvent vaut de l’or !
Là, bizarrement, depuis que ce matin « Libération » a détourné cette expression commune du langage populaire mais peu présidentiel, les confrères de celui qui a inventé cette provocation bien anodine, se déchaînent et parfois même s’étranglent d’indignation. Comment peut-on ainsi publiquement traiter l’homme le plus puissant de France, dont la fortune est évaluée aux 33 milliards que le gouvernement cherche avec sa lanterne pour combattre le déficit structurel de l’État ? Une « honte » pour une profession ? Une atteinte à la dignité d’un personnage au-dessus de tout soupçon ! Un dérapage intolérable dans une société exceptionnellement saine ! Fillon qui avait été tellement prompt à critiquer son « ami » Sarkozy, a été à la hauteur de l’événement : « Mais qui est le plus patriote dans ce pays ? Est-ce que c’est quelqu’un qui a créé des milliers d’emplois, qui paie et fait payer des milliards d’euros d’impôts, quelqu’un dont on admire le travail partout dans le monde, ou ceux qui écrivent ces papiers ? » a-t-il demandé avec son regard noir de Zorro de l’éthique journalistique.
« Ça me choque profondément qu’un grand patron d’une grande entreprise française soit contraint à des attitudes comme celles-là », a commenté l’exilé de la Sarthe « mais ce qui me choque encore plus, c’est le déchaînement d’insultes et de violences ». Ouf ! L’insulté du salon de l’agriculture va pouvoir se manifester, mais il ne pourra toujours pas porter plainte comme l’a fait le grand soutien de l’UMP. Lui n’était, il est vrai, qu’un pauvre con ! C’est ce qui fait la différence ! En fait, il va falloir revenir à la fable de La Fontaine sur une société malade de la peste et en changer la morale :
Selon que vous serez » pauvre con » ou » riche con « ,
Les jugements de cour vous rendront blanc ou noir.
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Selon que vous serez « pauvre con » ou » riche con »,
Les jugements de cour vous rendront blanc ou noir
Bien dit!!!
Ce « pôvre » Mr Arnault, qui n’en a rien à foutre de la Belgique mais cherche seulement à pouvoir s’exiler ensuite à Monaco, ne mérite pas d’être traité comme un vulgaire quidam, lui si puissant, si désireux de fournir aux pauvre nécessiteux des emplois de « petites mains » royalement payés 1 500 euros par mois, c’est bien la preuve qu’il n’a pas volé sa fortune!!!
Le luxe est un créneau porteur coco, y’a pas que des pauvres sur cette bonne terre…..
Ça fait plaisir de voir que Libé est encore capable de se réveiller de temps en temps….
« Il n’y a pas de métier plus égoïste que celui de journaliste. » JMD
Ah bon ! je pensais que c’était Grand Patron de Multinationales, le métier le plus égoïste.
Rectificatif classement et montant :
« Le patron de l’empire du luxe LVMH, Bernard Arnault, première fortune de France et d’Europe et quatrième fortune mondiale….Proche de l’ancien président Nicolas Sarkozy et libéral revendiqué, M. Arnault possède une fortune estimée à 41 milliards de dollars par le magazine américain Forbes. Après la victoire de la gauche en 1981, il s’était exilé aux Etats-Unis pendant trois ans. » Source : http://lexpansion.lexpress.fr/economie/quatrieme-fortune-mondiale-bernard-arnault-veut-devenir-belge_332834.html
Encore un anniversaire oublié.
2 279 morts et 957 disparus, près de 150 000 personnes emprisonnées, 27 255 torturées, des centaines de milliers d’exilés politiques. Ces chiffres sont sans doute minorés.
C’était le 11 septembre …1973, au Chili.