Chaque week-end, sans aucune exception, Créon propose une manifestation dont l’importance dépasse largement les limites communales. Ce programme permanent, destiné à faire de la ville bastide un lieu ouvert aux initiatives sportives, culturelles, sociales, comporte bien évidemment son lot de désillusions, car il est actuellement difficile voire impossible de convaincre les gens de la qualité de ce qui leur est proposé. Figés dans leurs certitudes, capturés par la multiplicité des médias permettant de « sortir » en restant immobile, hésitants à aller vers des programmes inconnus, les gens ne vivent plus la proximité comme un atout. Ils ne croient plus dans la qualité des initiatives qui ne reposent pas sur des labels médiatiques trompeurs. Le système protège d’ailleurs avec soin ce qui correspond à des produits attractifs, rentables, clinquants… pour s’en prendre à ce qui est fragile ou très spécialisé. En fait, on entre chaque jour davantage dans le phénomène baptisé « grand public ! »
Ce week-end, Créon recevait les championnats de France de culturisme. Une discipline entre le sport et le spectacle, pour lequel je n’ai vraiment aucune passion particulière mais qui a ses adeptes (51 000 en France) et ses fans (près de 1000 spectateurs sur deux jours!). Il a fallu un investissement énorme de bénévoles désintéressés pour qu’une telle compétition puisse se dérouler dans une cité et sur des équipements de la taille de ceux de Créon. Beaucoup d’entre eux n’avaient pas plus d’intérêt que ça pour ces démonstrations de corps sculpturaux qui défilaient sur scène, mais ils consacraient un week-end à proposer un rendez-vous rassemblant 180 compétiteurs venus de toutes les régions françaises, et à faire que l’accueil soit à la hauteur de l’événement.
Dimanche, ils ont eu le privilège de vérifier que l’État s’intéressait particulièrement à leur organisation. Ils ont vu débarquer des dizaines de fonctionnaires de grande qualité (gendarmes, douaniers, médecins, personnel de la justice…) pour une opération louable consacrée aux contrôles antidopage et plus encore au trafic d’anabolisants ou autres produits dangereux. Une action que personne ne saurait critiquer tant elle est souhaitable dans le monde du sport spectacle. Et d’ailleurs, pas un dirigeant n’a, un seul instant, contesté son utilité. Elle a bénéficié du soutien de tous et un seul « athlète » a refusé les procédures légales. Le dopage sous toutes ses formes, omniprésent dans la société, doit être traqué. Ce n’est pas aussi évident que cela puisqu’on manque cruellement de moyens financiers pour que des contrôles moins spectaculaires que cette « descente », essentiellement policière, soient fréquents… Et c’est là le vrai problème. Débarquer à Créon sur un « mini » championnat de France, qui n’a été suivi par aucun média (aucun n’a publié les résultats et ne s’est déplacé pour la compétition !) et ne présente aucun enjeu financier réel confine à l’exploit ! Une dizaine de « prélèvements », des fouilles de véhicules, une minutie exemplaire, qui démontrent une rigueur procédurale rassurante. C’était impressionnant !
Le dopage dans le culturisme est certainement présent, car la passion conduit toujours à des excès, destinés à obtenir une reconnaissance « officielle » des efforts nécessaires pour atteindre le haut niveau. Je me suis imaginé un moment que le même déploiement de force soit effectué sur un tournoi de tennis de l’ATP. Tenez, imaginons un moment que dans le site prestigieux de Primerose, la semaine dernière, où évoluaient des joueurs classés… à quelques centaines de mètres du siège des instances sportives régionales, une descente identique soit intervenue en plein « brunch » ou au moment des quarts de finale. Laissez vous aller et imaginez qu’à Roland Garros une opération identique avec un zeste d’ostentation soit effectué dans les vestiaires, et que les cracks du tennis professionnel mondial soient soumis à la même rigueur policière. Les culturistes, majoritairement amateurs ont accepté le suivi médical… qui s’applique à eux comme à des athlètes dont les revenus dépassent parfois par semaine les plafonds d’imposition à 75 % que ces salauds de socialistes veulent mettre en place ! Il est certain que le dopage n’y a pas sa place et que tout le monde, pour préserver son standing et ses performances, ne fonctionne qu’à l’eau de source ou en mangeant des « tartares » bios ! Il y a des milieux dans lesquels il est plus difficile de porter le fer que dans d’autres. C’est ce que l’on peut reprocher à ce système répressif qui stigmatise certaines disciplines sportives et certains niveaux de compétition, sans entrer ou alors sur la pointe des pieds, dans la cour des grands. Combien de partants d’un marathon, d’un raid VTT, d’une randonnée des cols pyrénéens, d’une « épreuve » réputée grand public sont en infraction avec les textes et règlements en toute impunité, détruisant leur santé sous le seul prétexte qu’il leur faut imiter celles et ceux qui accomplissent des performances ahurissantes sans aucun artifice… Du moins le croient-ils.
Créon devenue l’espace d’un week-end plaque tournante de la « drogue » a vite oublié cette opération beaucoup plus commentée que… la compétition elle-même. C’est probablement là l’illustration parfaite du système médiatique : pour devenir célèbre faites surtout parler de vous en mal, car si rien ne justifie pareil intérêt, vous n’existez pas. D’ailleurs, il n’y avait pas eu une ligne ou une minute sur ces championnats de France organisés dans la plus petite cité qui ait relevé ce défi, avant que ne débarquent les contrôleurs pipi officiels ! Et alors, on a parlé de culturisme, pour le plus grand plaisir des organisateurs ! Vive les contrôles antidopages !
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Tout simplement un grand merci
André
Donc c’est un champion de France qui a fait qu’un pavot mauve a fleuri derrière le gymnase, bien seul et extravagant….
Et que partout ailleurs ce n’étaient que coquelicots, paquerettes, primevères, marguerites, boutons d’or et oseilles sauvage avec lesquels les rosières créonaises ont tressé les couronnes des champions sculpteurs de corps!