Quel que soit le gouvernement que François Hollande et Jean-Marc Ayraud aient pu constituer, il fallait que les analystes professionnels lui trouvent tous les défauts de la terre. C’est la spécificité française : même pas installée, une structure installée par la gauche est disséquée sur la base d’une grille d’analyse identique depuis des années ; les supposés clivages internes du parti socialiste ! Il n’y a en effet qu’au PS qu’il y a des différences internes. Il n’y a qu’au PS que l’on se différencie ! Il n’y aurait qu’au PS que l’on a des querelles de personnes. Sous l’ère sarkozyste, ces références n’existaient pas. Bien évidemment, on ne remarquera pas les points de conformité entre les engagements et les actes, car ce n’est pas vendeur… et les accoucheurs de vérités toutes faites n’auraient plus l’opportunité de pérorer devant les caméras. Et pourtant, ce gouvernement reste globalement conforme aux annonces de François Hollande. Et c’est l’annonce logique d’une gouvernance aussi proche que possible des déclarations de campagne. En dehors des appréciations de personnes qui n’ont pas d’autre intérêt que d’alimenter la polémique, le gouvernement est bien le fruit des principes énoncés durant la campagne. Examinons les clés d’une équipe qui tient la route :
La non présence d’Aubry : c’est le seul point d’attaque de l’UMP. . « S’il se confirme que Martine Aubry n’entre pas au gouvernement, ce sera très intéressant, parce que ce sera peut-être la naissance d’une forme de cohabitation interne au PS », a déclaré lors de son point de presse hebdomadaire une certain Jean-François Copé. « Chacun connaît la détestation profonde entre Martine Aubry et François Hollande. D’ailleurs, les primaires socialistes en ont été le théâtre« , a-t-il souligné. Et illico, les je sais-tout médiatiques se sont engouffrés derrière celui qui est vraiment bien placé pour donner des leçons de loyauté à l’égard du président de la république ! En fait, s’ils enquêtaient au lieu de ressasser des banalités, ils sauraient que Martine Aubry avait déjà annoncé lors du meeting de Toulouse qu’elle n’irait pas au gouvernement. Ce n’était donc pas une nouveauté, mais une confirmation, car la raison essentielle de son renoncement vient du fait que François Hollande a été intransigeant sur le « cumul d’un poste ministériel et la gestion d’une collectivité ». Martine Aubry ne souhaitait pas abandonner la ville de Lille… ni déroger à la règle. Hollande a refusé, comme il l’a fait également pour Delanoé et Rebsamen qui ne peuvent pas être suspectés d’anti-Hollandisme primaire comme le serait Martine Aubry ! Pourquoi ne pas dire qu’en obligeant au respect du non-cumul d’une fonction exécutive et d’une fonction ministérielle, le PS a déjà mis en œuvre ce que la droite n’a jamais pu faire (voir Juppé !). Le reste, ce n’est qu’une vieille recette qui ne fonctionne plus, car elle repose sur des références antérieures et sans cesse en référence au passé. On verra combien de Ministres se maintiendront dans un second mandat… et après on reparlera de la position de Martine Aubry ! Pour une fois que l’on contraint des élus à respecter le nom cumul de mandats il serait plus honnête de la préciser dans les commentaires. Ce constat vaut pour les Députés qui obligatoirement devront laisser leur mandat à leur suppléant(e) dès leur nouvelle nomination au gouvernement.
La parité : Pourquoi ne rappelle-t-on jamais qu’aucun président de la République n’avait imposé cette représentation strictement équilibrée au sein d’un gouvernement ? Tout simplement parce que ce serait avouer qu’il peut y avoir un homme fraîchement élu qui tient parole. Même dans les ministères régaliens, la parité est respectée. Les femmes qui entrent au gouvernement ne seront pas des « juppettes » de façade ou des potiches alibis. Toutes ont un caractère bien trempé. Michèle Delaunay a toutes les compétences sur le poste qu’on lui a confié et qui est terriblement important dans la société actuelle. Les autres aussi! Alors, on cherchera dans l’intitulé des responsabilités du poil sur les œufs, ou on interprétera les astres, les intentions, les inimitiés, les faiblesses supposées . Les remarques des journalistes de Droite (oui, mais ça existe) sont effarantes : elles dénotent en fait un agacement terrible, car ils avaient prévu des dérapages dans ce domaine comme dans tant d’autres et ils ne sont pas au rendez-vous !
La diversité : Il faut du courage pour illustrer, dans un gouvernement, la diversité de cette société que certaines grandes gueules voudraient uniforme, blanche et blonde… Le député UMP Jean-Paul Garraud a affirmé sans honte que « l a composition » du gouvernement risquait d' »entraîner la montée du Front national » (sic) et lui donnait « mal à la France », mettant notamment en cause Christiane Taubira et ses positions sur… l’esclavagisme. Dans un communiqué publié dans la soirée, l’élu provisoire de la Gironde, membre de la Droite populaire, aile droite de l’UMP, a déclaré qu’il « espérait de tout coeur que ce gouvernement » ne soit que « provisoire » car il avait « mal à la France » (sic). Terrible aveu et encore une fois signe fort du fait que le FN a des porte-paroles au sein même de l’UMP. « Ce gouvernement ne reflète pas la volonté d’une majorité de nos concitoyens. Je redoute que la composition du gouvernement entraîne la montée du Front national », a lâché Jean-Paul Garraud tout en se défendant de toute « attaque par rapport à la couleur de peau » (sic) de certains ministres et en se prévalant du « jugement le plus nuancé possible ». Un aveu explicite porté par ces critiques que ne désavouera pas le FN : la diversité est bien respectée et elle repose sur les compétences et pas sur d’autres critères. Cette déclaration des années 30 constitue par son outrance hommage indirectement à François Hollande qui a fait le contraire de ce que Sarkozy aurait fait ! Engagement pris : engagement tenu !
Le renouveau : La présence de pachydermes est on ne peut plus réduite avec seulement un éléphant présent. Laurent Fabius va une fois encore cristalliser la haine des analystes médiatiques. Comme il est le seul à avoir une solide compétence ministérielle, au plus haut niveau, on va s’attaquer à lui. Sa nomination traduit simplement, dans le secteur de la diplomatie, une volonté d’être très vite opérationnel. Bien évidemment, on va rappeler son passé… sans aucune condamnation, alors que son prédécesseur n’était pas d’une virginité absolue en la matière. Mais il ne posait aucun problème déontologique. Pris à la gorge par une situation internationale très préoccupante, et des réunions capitales, François Hollande a fait le choix de l’efficacité, passant outre ses animosités personnelles, ce que, bien évidemment, la Droite n’a pas toujours fait . Le renouveau passe par l’inexpérience gouvernementale et donc il fallait à ce poste clé un homme immédiatement opérationnel. C’est du pragmatisme politique! Comment peut-on reprocher à ce gouvernement d’avoir besoin de 5 piliers reconnus pour leur compétence, alors que les réponses doivent être rapides, construites et efficaces ?
Ce gouvernement n’a donc pas que des qualités, mais il n’a pas davantage tous les défauts. Il respire seulement un premier respect scrupuleux des promesses de François Hollande. C’est sûrement ce qui affole les exégètes vivant de la férocité approximative qui fait leur notoriété. Leur fonds de commerce en a pris encore un coup, ce qui va raviver leur ressentiment et leur recherche de tous les défauts inévitables de la composition d’une équipe. En politique aussi les sélectionneurs sont très nombreux.
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Ton billet camarade m’apprend des choses que je ne savais pas,mais il fait question quand même.
Soit qu’Aubry, Rebsamen et Delanoë avaient un mandat municipal: et à part Rebs, quel lourd Mandat! Mais Ayrault aussi en a un fameux (qui du reste a toujours posé question). Et la Conduite de la ville de Boulogne-sur -Mer n’empêcherait-elle pas aussi Cuvillier d’être Ministre? Et Le Drian n’a-t-il pas un Mandat Important? Que dire en outre de Valls avec Évry, lui qui ne doit sa notoriété que par sa ville et le laboratoire du socialisme des banlieues qu’elle représente?(On aurait pu, à ce sujet,éviter de mettre un trait d’Union: Maire « pro-blancos » d’une cité difficile avec Ministère de l’intérieur. Bref ça ne colle pas, ton plaidoyer!
Tu ne parles pas d’une autre règle,(qui pourtant saute aux yeux) suivie par François Hollande: la Gauche du PS est absolument laminée. Un petit portefeuille à Hamon ne peut faire illusion: il y a des sacrée pointures à UMA, qui avait fait en grande partie le bon score d’Aubry aux primaires, ce qui joint aux 18% de Montebourg (qui a comme d’habitude tourné sa veste) fait que les courants de gauche dominent au PS.
Décidément Mélenchon a bien fait de quitter ce parti au congrès de Reims: il est sous la coupe définitive de sa fraction la plus droitière.