Le chiendent de la haine finit toujours par étouffer la raison

« En opposant la haine à la haine, on ne fait que la répandre, en surface comme en profondeur. ». Ce constat de Gandhi mériterait d’être pris en considération en cette journée dramatique pour la République française. En fait, depuis des mois, des propos réputés anodins et sans autre influence que celle que l’on prête aux saillies de campagne électorale sont répandus. En exaltant ce qu’il y a de plus vil (la haine de l’autre), on finit simplement par faire des Hommes des loups pour les autres Hommes. L’irresponsabilité ambiante, laissant croire que tout le monde a la distanciation nécessaire pour analyser le degré des propos publics, accentue les faiblesses d’esprit. Le drame n’est jamais sans aucune racine et la démence a bon dos. En tolérant les sous-entendus dangereux, en répandant la haine ordinaire, en exacerbant le communautarisme, en ignorant la dangerosité des effets d’annonce, nous avons toutes et tous une part de responsabilité dans les déviances horribles de notre société. Les mots sont autant de balles qui sont parfois tirées à bout portant sur la raison. En définitive, il faut peut-être revenir sur nos indifférences personnelles et plus encore sur cette opinion dominante apathique qui approuve du fond de ses chaumières des phrases irresponsables mettant en cause les fondements du vivre ensemble.
Quelques éléments méconnus sur les événements dramatiques récents filtrent dans les médias sans avoir été antérieurement très commentés. De quelle origine étaient les premières victimes ? les militaires abattus à Montauban et à Toulouse sont trois Français d’origine maghrébine, tandis que le soldat blessé, entre la vie et la mort est d’origine antillaise. Un hasard ? Dommage que dès le début ces précisions n’aient pas été données, car elles auraient peut-être permis d’éviter d’autres désastres. Les malheureuses petites victimes de Toulouse sont de confession juive, mais là, c’est tellement évident que c’est admis dès le départ… difficile de ne pas se poser la question sur la place du « racisme viscéral et nazi » dans cette conjonction d’assassinats désespérants. Dressés à tuer, à exécuter, à agir avec froideur, les hommes faibles peuvent transformer leur lâcheté en haine farouche. Dans quelques entourages, quand certains affichent sans crainte leurs nostalgies racistes, et quand d’autres tentent de les séduire par des aguichages idéologiques, on joue avec le feu ! La preuve !
Selon le site Le Point.fr (1) « les policiers restent persuadés qu’il s’agit d’un militaire – toujours en activité ou non -, compte tenu de son mode opératoire, de sa manière de se déplacer et de sa façon d’utiliser son arme, lui permettant de tirer et viser à 10 mètres de distance ». Il reste à savoir s’il est en activité ou s’il a perdu son uniforme en conservant les instructions reçues. Une autre information refait surface dans le même article.
En 2008, le 17e régiment de génie parachutiste de Montauban s’était fait déjà connaître par une publication dans Le Canard Enchaîné, sans que cette affaire ne soulève une indignation particulière dans le grand public et moins encore dans les hautes sphères gouvernementales. La hiérarchie militaire y avait identifié des soldats proches des mouvements « néonazis ». Jamel Benserhir, un ancien militaire, avait dénoncé à sa hiérarchie les agissements de trois « frères d’armes », qui avaient poussé la provocation jusqu’à se faire prendre en photo faisant le salut nazi derrière un drapeau à croix gammée. Ce cliché avait alors été publié par Le Canard enchaîné… sans que l’on sache quelles suites avaient été données à cette révélation. Il serait intéressant de savoir maintenant ce qu’est devenu le dossier ? Quelles poursuites avaient été engagées ? Quelles condamnations avaient été prononcées ? A-t-il été enterré ? Par qui ? Au nom de quoi ?
Certes, actuellement, aucun lien ne peut être établi entre ces faits anciens et ceux de ce jour, mais quoi qu’il advienne, on retiendra que lorsque l’on tolère la croissance de la haine, on doit savoir qu’elle finit tôt ou tard par échapper à ses « jardiniers » ! C’est une herbe folle qui, comme le chiendent, s’accroche aux terres arides de la bêtise. Elle reste souterraine pour surgir de manière totalement imprévue.
Ce soir, j’ai le sentiment désastreux que la France est lentement tombée dans la spirale infernale qui détruit ses fondements républicains : la laïcité, la fraternité et la liberté. On peut suspendre toutes les campagnes du monde : le mal est fait ! C’est trop tard. Ruiné matériellement, car vidé de sa substance par les « profiteurs », notre pays l’est aussi politiquement par des complicités idéologiques circonstancielles l’ayant amputé des principes historiques qui lui ont permis de résister à l’usure du temps.
(1) Le Point.fr

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Cet article a 6 commentaires

  1. bourbona

    ecoeurement

  2. Une machine à tuer, vraisemblablement forgée dans un de nos « meilleurs ateliers »… Une idéologie simpliste cultivée dans un milieu adapté… Des propos de campagne banalisant la haine de tout ce qui ne correspond pas au standard inventé pour la circonstance…
    Tout est rassemblé pour que le monstre se réveille.
    La mort de la marionnette évitera de remonter à ses concepteurs volontaires et involontaires.

  3. J.J.

    C’est [ la haine] une herbe folle qui, comme le chiendent, s’accroche aux terres arides de la bêtise.

    Que j’admire cette belle phrase !

    Et j’ajoute : un usage bien compris de la Culture pourrait fournir un efficace désherbant (bio, si possible). C’est bien connu, c’est dans les terres incultes que prolifèrent les plantes nuisibles.

  4. Cubitus

    Je ne crois pas à la motivation politique. Quelle doctrine, même la plus extrême, amènerait de nos jours à assassiner froidement de très jeunes enfants ? Quand on a un enfant en face de soi, on ne le classe pas musulman, juif, chrétien, animiste ou autre. On ne voit qu’un enfant dans toute sa candeur et sa beauté.

    Ce type est simplement un frustré profond, un médiocre doublé vraisemblablement d’un psychopathe. Ce qu’on appelle vugairement un « mal-baisé ». Ce n’est pas un fou : il est lucide et calculateur. Une arme au poing, il se sent l’égal de Dieu, investi du pouvoir de vie et de mort sur ses semblables. Cette impression de puissance, c’est ce qui le fait jouir car il sort enfin de sa médiocrité. Son pouvoir, sa virilité c’est son arme. Ajoutons à cela le sentiment de narguer impunément la société et les autorités : c’est un jeu pour lui. Un jeu morbide et criminel mais un jeu quand même. Tout dans son mode opératoire le démontre. Il ne tue pas des êtres humains, il s’attaque à des symboles ce qui explique sa froideur. El joue au chat et à la souris ce qui l’amuse.

    Ses cibles le sont non par ce qu’elles représentent pour lui mais pour les autres : l’armée, les, juifs, les enfants. Il sait que ce qu’il fait va faire mal, très mal même. Demain, il s’attaquera à d’autres symboles, des policiers, synonymes d’ordre et de répression, une maison de retraite, un curé, une femme enceinte, que sais je, toutes choses qu’on nous a appris à respecter. Il a la haine de la société et il choisit ses cibles dans ce qui lui fera le plus mal. Il cherche à faire coup double à chaque fois pour impressionner davantage : militaires en même temps que maghrébins (même si 2 d’entre eux étaient catholiques), enfants et juifs.

    Lisant les commentaires des lecteurs de divers articles mis en ligne après l’assassinat des militaires et avant celui des enfants, j’ai été profondément atterré de découvrir qu’un certain nombre d’entre eux estimait que c’était bien fait pour eux compte tenu des divers conflits où nos armées se trouvent engagées. Certains tenaient même des propos ignobles, dépourvus de toute humanité ou compassion. Ne nous voilons pas la face, des frustrés, des haineux, des barjots comme on dit, il y en a plein autour de nous. Heureusement que tous ne passent pas à l’acte.

    Peut-être suis-je naïf, mais c’est bien ce que cette tragique histoire m’inspire.

  5. batistin

    Pour ma part, puisque chacun y va de son scénario, cherchant à donner un sens plausible à un acte horrible, je dirai ceci:
    Ce qui se joue aux tables de négociations, pour engager une guerre en Syrie, trouvera dans cet acte de folie meurtrière une justification…
    Si cela vous parait tiré par les cheveux, suivez, comme je vais le faire, les discours de nos dirigeants dans les semaines à venir.
    Et voyez comme l’amalgame sera fait, entre la nécessité d’augmenter la sécurité intérieure du pays, et celle d’affirmer haut et fort ses convictions « républicaines et démocratiques » à l’étranger.
    L’entrée en guerre nécessite toujours un acte violent en lever de rideau.

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