Le sport pour tous… pas pour demain !

Au Ministère des sports, la Conférence nationale a brièvement débattu de la notion de « sport pour tous ». Un concept social qui, bien évidemment, devrait entrer dans les nouvelles propositions du candidat-président sur son retour vers le peuple. Le temps presse, et c’est à marche forcée que se dessinera une nouvelle politique qui n’a pas eu l’heur de plaire durant les dix dernières années. Bien évidemment, on en restera au énième effet d’annonce, puisqu’il n’y a plus un euro dans les caisses et qu’une vraie politique en ce sens nécessiterait des années de travail concret, nettement différent de celui qui a été mis en œuvre à ce jour. Là encore, quel que soit le gouvernement qui s’emparera d’un tel sujet, il lui faudra un courage sans faille, car les lobbies sont déjà en alerte.
Le « sport pour tous » repose en effet sur le principe de la plus large accessibilité possible à une activité d’épanouissement personnel, par une activité physique librement choisie. Il existe trois paramètres pour atteindre cet objectif démocratique : des lieux adéquats de pratique sportive, des modes de financement de cette pratique, et une organisation adaptée à tous les niveaux ! Ce serait bien évidemment une révolution, car ces choix conduiraient à remettre en cause des années de retard accumulées, au nom de la valeur accordée aux performances et au spectacle.
En définitive, il faudra aborder le domaine du « sport codifié et organisé », placé sous la responsabilité des fédérations spécialisées, dont l’objectif serait très clair : permettre la compétition à tous les niveaux et favoriser l’éclosion des talents parmi les plus licenciés les plus motivés. Actuellement, elles pratiquent une double course concurrentielle dangereuse, en recherchant à augmenter le nombre de « licenciés » par un « enrôlement » précoce du maximum d’enfants et en développant une inflation de « normes » conditionnant l’accès à la compétition. La pression sur les clubs devient souvent tellement forte qu’elle finit par « étrangler » l’activité sportive elle-même, avec des conséquences financières de moins en moins supportables.
Le « sport pour tous » devient alors un leurre car lentement, au fil de leur « vieillissement » les cohortes de licenciés s’effritent : par lassitude, par des tarifs trop élevés ou sous le diktat des effets de mode. Le poids des structures fédérales (ligues, comités…) a souvent rendu les aides publiques sans effet, tant les « amendes », les « engagements », les « déplacements », pèsent sur les budgets … et les exigences « techniques » engloutissent les crédits d’investissement des collectivités locales. Tant qu’une régulation beaucoup plus forte du monde institutionnel ne sera pas mise en œuvre, il est à craindre que le « sport codifié et organisé » aille en France vers la perte de son influence, car il ne correspond plus à la société de la facilité ou du rêve productif.
Il ne saurait être question, par ailleurs, d’éviter le débat sur le « sport éducatif », celui des apprentissages qui permettent d’espérer un jour avoir un « sport citoyen ».
Inévitablement, le système scolaire est mis en cause, et d’ailleurs, dans la conférence nationale, le débat a vite dégénéré. Tant que l’on n’aura pas clarifié les objectifs dévolus au milieu enseignant, on ne cessera de taper sur l’école, le collège ou le lycée, inutilement et de manière totalement injuste. Les fédérations voudraient chacune que le sport scolaire serve de tremplin à leurs propres activités, et comme le veut une absurde logique, elles rendent responsables de leurs échecs des gens auxquels on devrait simplement demander d’amener les jeunes à aimer les pratiques sportives et leur ouvrir la liberté de choix entre la compétition ou le simple dépassement de soi. Il relève de la responsabilité de l’État pour son développement et les moyens humains, mais lentement on voit poindre un transfert vers les… collectivités territoriales avec des déclarations qui visent à substituer aux profs des « moniteurs » spécialisés ! C’est palpable dans le contexte gouvernemental actuel visant à tailler massivement dans la fonction publique d’État !
Il reste à régler le dernier secteur, qui ne cesse de grimper sans que l’on sache véritablement si c’est durable ou circonstanciel. Le « sport libre » se taille une place de plus en plus grande dans la société moderne ayant le culte du corps. Les salles privées accueillent de plus en plus de monde et les activités dites de pleine nature font un tabac (randonnées pédestres, cyclistes, équestres ou aquatiques…). Le refus croissant des contraintes organisationnelles, parfois la montée de la perception du lien entre le sport et la santé, souvent une aspiration à rester « jeune », conduisent des millions de personnes à rechercher des opportunités de rester actives. Dans ce secteur, il existe des pistes inexploitées en France, car jugées dérisoires : le chemin de l’école, le trajet domicile travail, le temps de travail… alors qu’ils pourraient constituer un vrai gisement de progrès. Qui mettra en place les réseaux d’éducateurs diplômés indispensables ? Qui veillera à la sécurité des lieux ? Qui assumera la promotion ? Inutile de préciser que les aménagements de pistes cyclables, de sentiers, de bassins nautiques, de plaines de jeux, de city stades, de skate parcs, de plages surveillées, de parcours de santé et de tout le reste, relèveront des collectivités territoriales. Sauf si ces installations s’avèrent « rentables », et dans ce cas, le « privé » prendra tout ce qui peut l’être.

Cette publication a un commentaire

  1. J.J.

    «  »Sauf si ces installations s’avèrent « rentables », et dans ce cas, le « privé » prendra tout ce qui peut l’être. «  » »

    C’est ce que j’attendais, hélas : quand les Picsous allaient -ils montrer le bout du nez ?

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