Trop souvent, dans les discussions autour d’une table où l’on aborde des sujets d’actualité, arrive cette remarque désobligeante : « que ce soit la droite ou la gauche, c’est pareil ». C’est cette simple affirmation qui met à mal la démocratie, car elle traduit un rejet global des différences réelles existant entre les deux grands courants de pensée existant en France. En fait, à quelques mois de l’élection présidentielle, la Gauche a une belle opportunité de mettre en évidence cet écart réel entre deux visions du fonctionnement social. Le basculement du Sénat offre en effet, chaque jour, une opportunité de mettre en valeur une autre politique. D’abord, ce sera un espace de propositions concrètes démontrant que le PS et ses alliés peuvent faire autrement ! Ensuite ils mettront en évidence que l’on peut « promettre » et « tenir », ce qui leur donnera, en cette période de tâtonnements, de mensonges, de tripatouillages, une crédibilité supérieure à celle du Sarkozysme, navigant désormais sans autre boussole que celle qui permet d’indiquer la moins mauvaise sortie. Enfin, si les propositions majoritaires dans la Haute assemblée sont rejetées par les députés UMP forcenés, le clivage droite-gauche deviendra vite patent !
Le nouveau Sénat a donc immédiatement lancé sa première offensive contre la très contestée réforme territoriale en adoptant, en commission, une proposition de loi PS modifiant radicalement son volet consacré à l’intercommunalité. L’UMP a essuyé un revers cuisant sur ce thème, et elle ne sait plus comment se dépêtrer d’une décision présidentielle strictement politicienne et destinée, non pas à simplifier la gestion territoriale, mais à augmenter les chances de la droite de récupérer quelques départements ou régions lors des prochains renouvellements. Les fusions ne riment à rien, sauf que derrière, se profilait le charcutage des nouveaux cantons où auraient été élus ces élus professionnels que seraient les « conseillers territoriaux ». La raclée inquiète pour le congrès de l’AMF durant lequel le paisible Jacques Pélissard devrait avoir chaud aux fesses face à André Laignel ! La révolte est, en effet, plus que jamais présente sur le terrain, même si les Préfets ont été invités à mettre la pédale douce par un Fillon beaucoup plus pragmatique que son chef élyséen.
« Première étape, on règle les problèmes urgents pour les élus locaux en butte aux dysfonctionnements majeurs créés par la réforme de l’intercommunalité », a expliqué, le président PS de la commission des Lois, Jean-Pierre Sueur. C’est à dire que l’on va élargir les délais durant lesquels les élus pourront travailler paisiblement sur des accords potentiels. Tout le monde en est d’accord, sauf les «inconditionnels » qui préfèrent le suicide à la rédition ! Ce report recueillera une large majorité au sénat et placera les Députés UMP face à un refus, qui constituerait un désastre pour eux dans huit mois… Ils le savent, et beaucoup risquent d’éviter de venir voter le jour où sera discuté le renvoi aux calendes grecques de cette mise sous la coupe du Préfet, dont on sait combien il est indépendant de l’UMP, des collectivités territoriales.
La proposition de Loi devait inclure un amendement abrogeant le conseiller territorial, mais cette abrogation fera finalement l’objet d’un texte présenté le 15 novembre par le groupe communiste. En revanche, le texte Sueur mettra à bas des pans entiers de cette réforme destructrice pour la gestion républicaine des territoires. Le PS a tenu parole : il modifie radicalement le volet de la réforme territoriale consacré à l’intercommunalité, volet qui a provoqué la colère des élus de tous bords, et que je combats depuis juillet 2009 ! Bien des élus girondins peuvent témoigner que, dans la campagne de la Présidence de l’Association des maires de la Gironde, je n’ai jamais flanché. La commission des lois a carrément repoussé le délai au… 31 décembre 2013, et redonné la main aux élus, au détriment du préfet, dans ce processus. C’est en fait une véritable décision de Gauche, consistant à accroitre les pouvoirs des élus en étendant les prérogatives de la commission départementale de coopération intercommunale (CDCI). Cette commission composée des élus concernés est chargée, selon la réforme du gouvernement, de donner son avis sur le schéma de regroupement des communes élaboré par le préfet. J’ai donc eu raison de faire campagne, en fin d’année 2010, sur l’importance de l’élection à l’Association des Maires, et de défendre l’idée de listes séparées pour la CDCI. Bien entendu, tout le monde l’a oublié, mais je relis avec plaisir ce que j’ai écrit sur le sujet depuis 2 ans !
La commission des Lois du Sénat a complètement renversé le dispositif, en confiant à cette CDCI la compétence d’élaborer les schémas départementaux de coopération intercommunale (SDCI), puis de les adopter. Elle a par ailleurs préservé les syndicats intercommunaux déjà existants, en particulier scolaires, menacés de disparaître. Un désaveu terrible pour M. Schmitt, Préfet de Gironde, ami de Brice d’Auvergne, qui, d’un revers de main avait supprimé tous les syndicats des Regroupements pédagogiques intercommunaux, car cette décision uniquement faite pour récupérer des postes d’enseignants, constituait la mort de l’école rurale ! Mais bien évidemment, maintenant que la victoire est proche, il n’y aura plus que des… résistants ! En fait, dans les deux camps, les premiers combattants n’étaient pas nombreux sur le terrain, chacun essayant souvent de sauver sa peau ou son pouvoir. Je ne me fais aucune illusion, tout le monde va expliquer, comme le font, sans vergogne, les sénateurs girondins UMP, qu’ils n’ont jamais cautionné les manœuvres sarkozystes passées. Et pourtant… que serait-il arrivé sans la victoire de la Gauche au Sénat? Lincoln avait raison : « un bulletin de vote est plus efficace qu’une balle ! »
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Bravo!!! C’est un bon début que de remiser cette « réforme » au pays des illusions Sarkosyenne!!! Il n’empêche que cet énorme millefeuille administratif devra être aminci, pas de cette façon autocratique, mais il faudra trouver… La remise en route de la décentralisation saura peut-être remédier à ce problème, à moins que les Socialistes ne préservent à tout prix leurs amis-élus…