C'est véritablement l'heure des bilans !

Il y a maintenant 4 ans à l’heure où j’entame cette chronique, la France avait un nouveau chef de l’État qui festoyait avec ses potes au Fouquet’s. Le champagne millésimé coulait à flots et les promesses électorales remontaient vers l’air libre, comme les bulles du breuvage. Tous les invités ne voyaient plus la vie en rose … mais plutôt couleur or de lingot ! Il y aurait en effet bientôt les dividendes du soutien apporté à un « ami » fidèle, et ils avaient la garantie du maintien de leur « pouvoir d’achat », conformément aux engagements publics du nouvel occupant de l’Élysée. A quelques mois d’une prochaine échéance électorale, leur bilan est éloquent. Prenons l’un d’entre eux, qui a échappé par miracle au virus de la Grippe A, mais en a tiré tous les bénéfices grâce à Roselyne, la fée des labos pharmaceutiques ! Le directeur général de Sanofi, Chris Viehbacher, a perçu en 2010 une rémunération totale de 3,60 millions d’euros, selon un document présenté en assemblée générale. Ah ! La suppression de la taxe professionnelle était justifiée, car il s’est singulièrement appauvri avec une modeste augmentation du montant de ses stock-options. Heureusement qu’on lui a donné un coup de pouce, car bien qu’ayant mené à bien le rachat de la biotech américaine Genzyme, il n’a touché que 275.000 euros, contre 250.000 un an plus tôt. Un pourboire !
Il recevra en 2011 un salaire fixe de 1,2 millions, comme en 2009 et 2010 (vous voyez bien qu’il y a gel des rémunérations) mais sa rémunération variable, qui a totalisé 2,4 millions d’euros en 2009 et 2010, se situera entre 0 et 200% du fixe en 2011, en fonction de la réalisation d’objectifs. Parmi eux, figurent l’intégration de Genzyme et les performances en matière de recherche. Un boulot d’enfer ! il aura d’ailleurs besoin du soutien de ses dirigeants. Pour le motiver, Serge Weinberg, le président du conseil d’administration de Sanofi, a perçu en 2010 une rémunération totale de 480.158 euros, dont un fixe de 439.748. En 2011, il percevra seulement de Sanofi un chèque de 700.000 euros… au titre du blocage des salaires imposés aux fonctionnaires ! Une promesse tenue…Enfin une !
Dans le même temps, Euler Hermes, président du directoire du leader mondial de l’assurance crédit, vise plus de 200 millions d’euros de résultat net en 2011, une année où la croissance mondiale sera moins vigoureuse que prévu, en raison du séisme japonais. Le crédit ? Ca ne vous dit rien ? Le crédit dont on a bien vu la fiabilité mondiale.
La filiale à 68% du groupe allemand Allianz prévoit néanmois une baisse de sa performance du premier trimestre, où les profits ont pourtant augmenté de 58,2% à 75,3 millions d’euros.
« Notre objectif, c’est de faire plus de deux cents millions d’euros, à la condition de ne pas avoir de gros sinistres sur les neuf prochains mois », a indiqué Wilfried Verstraete. Dites-moi qui a payé les sinistres des crédits outranciers accordés par des banques gavées par le mythe de la spéculation outrancière ? La régularisation de ce monde épouvantable du crédit (cf la Grèce, le Portugal, l’Islande, l’Eire…) n’a donc pas fait que des malheureux. Sanofi a profité des vaccins inutiles, Euler Hermés a été ravie de constater que les mesures prises pour moraliser les prêts gigantesques qui ont plongé la planète dans une crise interminable ont été profitables.
Euler Hermes avait donc annoncé en février un fort rebond de ses résultats annuels à 294 millions d’euros, portés par une chute impressionnante de la sinistralité et dopés par un résultat financier de 123,4 millions d’euros… Cette performance lui avait permis de reprendre le versement d’un dividende à ses actionnaires, une pratique interrompue lorsque le groupe avait été frappé de plein fouet par la crise financière. Les agences de notation ne les avaient pas prévenus…quand il est arrivé un impondérable : le tsunami japonais. Il a fait des milliers de morts, plongé le monde dans les affres de l’angoisse nucléaire, mais ce n’est pas là l’essentiel.
« Le séisme au Japon va coûter, selon nous, un demi point de croissance mondiale et, en conséquence, nous avons revu à la baisse nos prévisions de croissance mondiale », a expliqué avec désespoir un dirigeant de cet assureur n’aimant pas vivre à crédit ! . « Mais le chiffre d’affaires de nos assurés se porte mieux et ces derniers sont un peu plus optimistes qu’il y a six mois. » Ouf ! Dans le fond, heureusement que les présidentielles ne se joueront pas sur un bilan… car elles seraient cuites d’avance : celui du chef de l’État français sortant est terriblement bon. En plus, comme son idée démagogique de prime aux salariés des entreprises effectuant des profits ne sera applicable au mieux…que fin 2012, que l’ISF va disparaître, que les délocalisations des bénéfices restent possibles, il a un programme d’avenir qui va encore rassembler du monde au Fouquet’s.
Les bonnes nouvelles en cette période de bilans 2010 vont se succéder et seront, bien entendu « vendues » comme un signe de redressement de l’économie française. Avec un tour de passe passe statistique, le chômage va baisser car tout sera fait pour dégager vers le RSA tous les cas possibles. Les cours du pétrole virent à la baisse. L’euro, miné par les dettes européennes descend, rendant les exportations plus compétitives. Et, suprême cerise sur le gâteau, Ben Laden a été retrouvé après la béatification de Jean Paul II (c’est le second miracle attendu) ce qui dégage le monde de cette pression intenable qui pesait sur son optimisme acheteur. Il reste bien la centrale nucléaire de Fukushima, mais comme les dirigeants de Tepco se sont excusés, tout ira bien mieux. Plus que des consommateurs ou des citoyens, les Françaises et les Français ont intérêt à devenir des actionnaires !

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