Le vélo ne veut pas rester au parking

Hier j’ai ouvert à l’hôtel de ville de Paris et en présence de plus de 200 représentants des villes et territoires français, des représentants de services divers de l’Etat ainsi que des entreprises concernés, la rencontre technique nationale du Club des Villes et territoires cyclables. Voici les positions prises en tant que président national du CVTC. 
Le thème de ce rendez-vous traditionnel ouvrait, de manière très concrète, la semaine nationale du développement durable sur le thème : « le vélo et le stationnement ».
Le stationnement des vélos possède ces deux déterminants : stratégique et pragmatique !
Pragmatique car un vélo n’est pas toujours en mouvement. Il se stationne ! Même un vélo en libre service qui n’est pas – même à Paris ! – utilisé 24 heures sur 24 ! Stratégique car la facilitation du stationnement est un levier important du développement de l’usage ! Pouvoir garer son vélo, savoir qu’on va pouvoir le faire, une fois arrivé à destination… est la condition essentielle de son utilisation. Car, oui, bien sûr, on ne prend pas son vélo – comme on est dissuadé de prendre sa voiture – quand on sait qu’on va rencontrer de grosses difficultés à le ou la garer !
Au Club, nous aimons ces comparaisons frappées au coin du bon sens, car on a trop longtemps tenu le vélo dans une catégorie « à part » en France, pour gentils « écolos bobos », et on ne s’est donc pas soucié de la chaîne du déplacement à vélo. Des atouts et des obstacles « porte à porte ».
Il suffit pourtant de transposer au vélo un certain nombre de paramètres du déplacement en automobile !
Comme pour la voiture, le stationnement est un mal nécessaire. On dit parfois que le stationnement c’est le « déchet du déplacement » !! Image certes peu poétique, mais que l’élu administrateur du réseau Amorce que je suis trouve parlante ; comparons avec la voiture : le vélo doit disposer d’un stationnement adapté, sécurisé, avec des solutions variées selon les contextes (courte, moyenne et longue durée); analogie toujours avec la voiture, il consomme de l’espace public pour ce faire, mais à la différence de la voiture, il est peu gourmand en m2 de stationnement. Pour une voiture stationnée, on gare au minimum 6 vélos ! Et le vélo le moins gourmand est le vélo partagé car il est le moins stationné (surtout avec les systèmes à fort taux de rotation). Il faut donc gérer ce « déchet », voire le recycler (il n’est pas interdit de réfléchir à des solutions combinant le stationnement des vélos et d’autres tâches urbaines : le tri des déchets ménagers justement !).
Avantage sur la voiture, outre son faible encombrement : un vélo se gare plus facilement, il est léger… on peut l’accrocher à un candélabre, une croix de Saint-André… Ce ne sont que des solutions à défaut d’une véritable offre de stationnement, certes. Mais il n’est pas non plus interdit d’inventer. C’est même recommandé, comme à New-York où la Ville a imaginé de réutiliser les anciens parcmètres, plutôt que de les démonter, en les transformant en appuis vélo !
Le stationnement, c’est un maillon clé de la chaîne du déplacement à vélo : stationnement au départ, à l’arrivée, sur l’espace public, dans les espaces privés, en rabattement dans les gares et pôles d’échanges (ou pour les clients sortants de ces mêmes gares) pour quelques minutes, pour la journée… C’est aussi une bonne façon d’engager une politique cyclable, un premier signe en direction de l’usager. Un signe visible, si on équipe tous les pôles générateurs de trafic (équipements sportifs, de loisirs, quartiers commerçants, écoles et universités, etc.). C’est la théorie du perchoir : mettez des arceaux dans votre ville et vous verrez les vélos s’y garer. Vous montrerez ainsi une pratique existante dont tout le monde n’a pas conscience… !
S’agissant du stationnement dans les gares et les stations de transports publics, dont on parlera beaucoup aujourd’hui et notamment cet après-midi avec Fabienne Keller auteure d’un rapport sur la gare contemporaine, nous ne pouvons que faire mieux en France !!
La part moyenne d’accès des gares à vélo est actuellement de 2%, contre 1% il y 10 ans, rappellent les auteurs de l’excellente étude sur l’économie du vélo. Elle dépasse 10% dans certaines gares (on pense bien entendu à Strasbourg) et 30% aux Pays-Bas !!C’est un objectif majeur du développement du vélo dans notre pays que de favoriser – enfin – la combinaison vélo et transport public (RER, TER). Sans délai !
C’est une solution à notre portée – collectivités ET SNCF – qui doit nous permettre à la fois de contenir l’étalement urbain et d’offrir des solutions de mobilité aux populations aujourd’hui captives de la voiture dans le périurbain. Je pense notamment aux personnes qui, dans ces territoires, subissent durement les effets de la crise économique.
C’est pourquoi il faut que notre pays se dote – ENFIN ! – d’une politique nationale vélo. Et que dans ce cadre, le « stationnement en gare » soit identifié comme un des chantiers prioritaires. Que l’Etat demande à la SNCF d’accélérer son action dans ce sens, et équipe un grand nombre de gares de vélostations et de stationnements sécurisés.
Force est de constater que ce Plan national, que nous demandons sans relâche, avec d’autres acteurs du vélo, Plan que le Coordonnateur interministériel, Hubert Peigné a mis au point depuis deux ans, n’est même pas une promesse du Gouvernement à ce jour.
Il n’empêche, nous continuerons d’interpeller l’État pour qu’il soit, dans le cadre de ses missions, aux côtés des collectivités, des villes et agglomérations, des régions aussi qui viennent de renouveler leurs exécutifs et qui vont accentuer leurs efforts en direction du vélo et de l’intermodalité dans le courant de ce nouveau mandat régional. La venue de la Sénatrice Fabienne Keller permettra de dialoguer autour de son rapport sur les gares du futur. Annick Lepetit, députée et adjointe au Maire de Paris nous a permis de présenter sur France 2 le cas de la fameuse Place de la République, que la Mairie de Paris va aménager de manière exemplaire en terme de cohabitation des modes de circulation. Nous avons rencontré le cabinet du Secrétaire d’État au Logement, Benoit Apparu, il y a quelques jours, et proposé des mesures concrètes sur lesquelles j’aurai l’occasion de revenir. Elles ont été écoutées mais sans éveiller beaucoup d’intérêt, et surtout sans grand espoir de les voir reprises dans le débat sur le Grenelle 2. Nous ne renonçons pourtant pas à ce que l’État prenne au sérieux le vélo dans notre pays, même si peu de choses le laisse croire aujourd’hui. Même si le Plan de relance et le Grand emprunt n’en ont soufflé mot, même si le Grenelle de l’environnement ne l’avait pas convié dans les discussions.
L’abandon de la taxe carbone et la disparition de la taxe professionnelle n’augurent pas de lendemains faciles pour le budget des collectivités territoriales… Il faut inventer un nouveau modèle de développement où la mobilité alternative à la voiture solo, et notamment le vélo, seul ou combiné aux transports publics, ont un rôle majeur à jouer. Aujourd’hui, c’est la première journée de la semaine du développement durable, je ne souhaite pas que vous repartiez convaincus que la politique gouvernementale pour le développement indispensable des pratiques du vélo ressemble à… un poisson d’avril. Et pourtant ! Une politique vélo forte constitue un levier extraordinaire permettant de bâtir une véritable politique de développement durable. Elle doit en effet être globale et transversale. C’est certainement le plus dur.

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Cet article a 5 commentaires

  1. J.J.

    «  »On a trop longtemps tenu le vélo dans une catégorie « à part » en France, pour gentils « écolos bobos », et on ne s’est donc pas soucié de la chaîne du déplacement à vélo. Des atouts et des obstacles « porte à porte ». » » »dit JMD.

    Et bien, je vais vous parler d’un temps…..(air connu)
    Au lendemain de la guerre et de l’occupation , le vélo était devenu un mode de transport incontournabble, pour la bonne raison que les raisons de se déplacer avaient cru dans une proportion considérable et que l’on avait pas encore trouvé mieux (ou pire !).

    Le vélo n’était, il s’en faut, un mode de locomotion « snob », mais au contraire très populaire et indispensable.
    Sa valeur résidait non seulement dans son prix d’achat, mais dans la difficulté de s’en procurer dans le commerce.

    Je me souviens qu’à cette époque, des portiques avaient été installés aux endroits strtégiques dans la ville pour y garer les vélos. Un gardien les surveillait. Il percevait une modeste taxe auprès des usagers qui pouvaient ainsi partir à pied tranquilles.

    Le dimanche après midi, à proximité des cinémas de la ville, il n’y avait pas une place de libre.
    Les cinépiles n’étaient pas rebutés par les pentes à plus de 10 0/0 (certaines à 13 ou 14)qui permettent d’accéder à la ville, et ce avec des engins aux mécaniques plus que rudimentaires (pignons fixes pour certains, pas de doubles plateaux ni de dérailleurs pour la plupart ! ).

    Nécessité faisait force de loi !

  2. Lap0ng

    Je trouve, bien au contraire, que l’aménagement pour les vélos dans Paris est plutôt réussi… j’ai acheté un vélo électrique sur le net (buzibi.fr) alors que je suis pas un adepte du vélo et je m’adapte très bien aux déplacements à vélo dans Paris. Pour ce qui est du Parking, je trouve toujours une grande place à disposition avec du passage… Pourquoi ne pas faire comme les vélibs? utiliser des emplacements en les aménageant avec des racks pour vélos… sur des places de voitures par exemple.

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