PAS DE PERE NOEL POUR LES ORDURES

Tue, 13 Dec 2005 07:17:00 +0000

Déchets. Le mot est lâché. Souvent dans une poubelle, mais aussi parfois, malheureusement, dans la nature. La citoyenneté n'a jamais autant reposé sur ce que notre société expédie vers un ailleurs dont elle ne veut pas nécessairement connaître l'existence. Rien n'est plus aisé que d'acquérir une poche plus ou moins biodégradable pour y ensevelir les rebuts d'une consommation effrénée. Ce qui se passe après n'intéresse guère le contribuable, sauf au moment de l'arrivée dans sa boite aux lettres d'un papier dont il ne peut pas se débarrasser sans risque : sa feuille d'impôts !

Un lecteur me faisait remarquer, dans un blog antérieur, que l'emploi du mot  » bourrier  » lui rappelait les habitudes de sa grand-mère?Une preuve qu'à toutes les époques, la préoccupation de la récupération, ou de la destruction des restes de la vie collective a constitué un enjeu. Le recyclage s'effectuait pourtant plus aisément qu'à notre époque où tout est majoritairement conçu pour résister le plus longtemps possible, ou pour se briser sans se détruire. Il faut donc collecter pour éliminer. Un double enjeu quand on conjugue sur la même période le coût de l'énergie et celui des structures nécessaires pour réduire ce qui souvent a été fabriqué pour ne pas être réductible. Partout, les élus cherchent des solutions, engoncés dans la contrainte de coûts exorbitants, et celle de la croissance exponentielle des volumes à traiter.

L'IMAGINATION N'A PAS PRIS LE POUVOIR .-
Hier matin, au Conseil général, se réunissait le conseil départemental des déchets (C.D.D.) de la Gironde. Associations, entreprises et responsables de structures intercommunales avaient été invités à prendre connaissance des résultats d'une vaste campagne de concertation menée par le Département. L'occasion de vérifier que l'imagination n'a pas encore pris le pouvoir. Tout le monde se focalise, en effet, sur son secteur réputé de compétence, et s'envoie, certes de plus en plus courtoisement, des poubelles à la tête. Les lieux d'élimination potentiels dressent les citoyens contre les décideurs. La méthode de paiement (taxe ou redevance) vient nécessairement sur le tapis. L'incitation financière au tri sélectif surgit au détour de toutes les interventions. La  » prévention  » fait l'unanimité, sans que l'on sache véritablement si elle doit s'organiser à long terme (éducation par l'école) ou à court terme (ambassadeurs du tri effectuant le porte à porte). Et pendant le débat, la montagne de déchets s'élève, et les profits réalisés par quelques grandes entreprises augmentent !

La mise en ?uvre d'un schéma départemental ne sera guère aisée. Car quel qu'il soit, on soulèvera des critiques des partisans de la redevance ou de ceux de la taxe ; on suscitera une révolte des habitants proches des sites de traitement ou de stockage ; on débouchera sur des préconisations pour réduire les quantités de déchets, alors que le système commercial accentuera son offre d'emballages attractifs, de  » jetables  » divers ; on dissertera sur l'incinération globale ou le tri sélectif méthodique? Le travail sera long, alors que le temps presse. La concertation s'éternisera, alors que de nouvelles pratiques sont à faire émerger dans les plus brefs délais. Aucun texte, aucun règlement ne modifiera les comportements égoïstes, alors que l'élimination des déchets devient un sujet d'intérêt général. Il faudrait donc faire preuve d'imagination, et tenter des démarches inédites pour redonner un sens au mot « déchets ».

 ABONNEMENT ET QUOTAS .-
D'abord, notre société considère qu'une démarche personnelle volontaire est obligatoire pour bénéficier de services de confort positif : eau, assainissement, gaz, électricité, téléphone, internet, transport? Essayez donc d'accéder à l'une de ces prestations publiques ou privées sans un abonnement. Or, il se trouve que l'on admet officiellement que la collecte et l'élimination des déchets est une affaire spontanée? Il suffit d’abandonner sa poubelle sur le trottoir pour qu'un service public la prenne en compte. Aucune démarche citoyenne n'est nécessaire. Et c’est préjudiciable au débat actuel. Vous déménagez, vous allez dans une autre cité et rien ne change, sauf une amélioration ou une diminution du nombre de collectes, ou du système d'élimination.

Pourquoi ne pas créer pour tout propriétaire, quelle que soit la nature de son bien (commerce, service, domicile personnel, immeuble locatif?) l'obligation de s'abonner pour bénéficier de la prise en charge de ses déchets ? Cet abonnement, comme tous les abonnements, serait fixé par la puissance publique (eau, assainissement notamment) selon le nombre de personnes ou l'importance de l'activité. Un signe distinctif annuel appliqué sur le bâtiment ou le lieu, suffirait à attester que l'on peut ramasser la poubelle déposée sur le trottoir. Le taux de l'abonnement pourrait varier avec la nature de la collecte (déduction pour le tri sélectif par exemple). Cette démarche, que l'on ne songerait pas à refuser pour tous les autres services, permettrait de mettre en place la redevance sur la base d'une connaissance réelle de la composition des foyers, alors qu'actuellement cette identification constitue un véritable casse tête pour les collectivités.

SACS BIODEGRADABLES.-
L'autre démarche induite par l'abonnement serait la limitation du volume des déchets ménagers ou commerciaux autorisés à expédier vers l'élimination. Chaque année un nombre de sacs biodégradables correspondant à la  » norme  » admise pour une personne seule, un couple, une famille de 4 personnes ou plus, un commerce… serait distribué à chaque abonné. Seuls ces sacs ou ces poubelles identifiés seraient collectés. Tout le reste ne le serait pas. Plus les abonnés trieraient, moins ils auraient dans les faits besoin de sacs. Si, par manque de civisme ou utilisation abusive de leur dotation, ils étaient obligés de se procurer des sacs supplémentaires ces derniers seraient surtaxés.

Cette double décision, je suis prêt à l'expérimenter si la loi le permet?car je suis certain qu'elle conduira rapidement à une véritable responsabilisation citoyenne.

Seulement, elle n'entre pas dans les affrontements actuels, qui tournent surtout sur les lieux d'élimination, le coût du service et surt
out la délocalisation des problèmes. Les racines du mal sont pourtant ailleurs.

Encore une fois, on recherche des remèdes pour masquer les conséquences de comportements à risques, plutôt que d'essayer de les changer.

Mais je déblogue?

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