Wed, 12 Oct 2005 00:00:00 +0000
La sécurité préoccupe de plus en plus les Français. Elle a même lourdement pesé sur les dernière échéances électorales. Le problème, c'est qu'au cours de l'année 2005, le danger qui menaçait notre société réputée paisible a largement évolué. Quand on parlait de la menace de bandes organisées, de jeunes ne respectant rien, des dangers de la route, des cambriolages, des agressions sur les personnes âgées on évoquait les périls graves dont souffraient dans la quotidien les enfants, les femmes, les hommes de notre pays.
Les images de TF1 ont beaucoup fait pour transformer des formes de délinquance classique en fléau insécuritaire électoraliste. La menace était partout. Dans les banlieues, dans la rue, dans les campagnes, dans les transports publics, dans les gares, dans les aéroports? Quelques candidats à l'élection présidentielle ont cyniquement surfé sur cette vague, transformant des faits divers en psychose rentable. De retour au Ministère de l'Intérieur, le « Roquet de Neuilly » a vite modifié le calcul des statistiques, et a vite exigé des mesures spectaculaires, pour donner l'impression au bon peuple que le Karcher constituait l'arme la plus efficace pour remettre de l'ordre dans des zones où rien n'a profondément changé. Un bémol télévisé a suffi à redonner confiance au pays, comme si miraculeusement l'âme humaine s'était apaisée, comme si miraculeusement, les événements d'avant 2001 n'existaient plus.
DES FORMES MASSIVES
Le problème, c'est que désormais l'insécurité a muté, et que plus personne ne peut prétendre la maîtriser, puisqu'elle échappe totalement au contrôle des hommes. Elle ne touche plus à l'arrachage du sac à main, à la rayure sur la voiture neuve, au pillage de massifs floraux ou à la falsification de cartes de crédit. Autant de phénomènes traumatisants mais qui ne remettent pas en péril l'essence même de la vie. L'insécurité déboule sous des formes massives dans le quotidien de pays entiers. Elle aligne les cercueils ou les tombes. Elle cause plus de dégâts que les grandes offensives des récentes guerres mondiales. Même le pire des terroristes n'avait pas imaginé provoquer des ravages aussi dramatiques, aussi dévastateurs.
Le tsunami a lancé une année cauchemardesque. L'horreur de cette vague gigantesque a ému l'Europe des vacances pas chères au soleil. Elle a lancé la pire période du dernier demi-siècle.
Les ouragans ont eux aussi causé probablement plus de morts que tous les attentats antérieurs sur le sol des Etats-Unis, mettant en plus à nu la faiblesse d'un pseudo géant, dont le libéralisme avait occulté toute structure collective solidaire.
Les tempêtes gigantesques, les typhons se multiplient, comme les orages sur le Sud-est de la France, toujours plus soudains, toujours plus violents provoquant la panique, l'angoisse de millions de personnes, le chagrin des sinistrés à répétition.
La raréfaction de la ressource en eau potable aggrave la fragilité des populations africaines. Elle affaiblit, elle effraie, elle tue dans l'indifférence majoritaire.
Les incendies ravagent les forêts, affolant des populations ne trouvant plus leur salut que dans la fuite?
Les coulées de boue, les tremblements de terre se succèdent, laissant derrière eux des villages engloutis ou rasés, des familles décimées, des enfants désemparés et des vieillards hagards.
LE SPECTRE DE LA GRIPPE AVIAIRE
Et voici que surgit de partout le spectre de la grippe aviaire?Quel terroriste a inventé cette menace planétaire qui met en exergue la faiblesse d'une organisation sociale mondialisée, inquiète de voir arriver les oies, les canards, les grues cendrées et les bécasses sauvages ? La crainte d'une pandémie envahit les écrans. On tremble devant les petits écrans. On se voile la face en affirmant que, comme pour les invasions historiques, une armée de sans culotte médicaux arrêteront le virus aux frontières du pays? Un Pasteur des temps modernes est attendu pour mettre un terme à une effroyable menace collective. Le poulet va devenir l'ennemi public numéro un !
En 2005, si l'on cumule les victimes de toutes ces catastrophes, on atteindra des records statistiques. Les victimes sont tellement nombreuses qu'elles n'offrent plus un caractère sensationnel. La fameuse théorie du » kilomètre macchabée » qui a servi à déterminer la » une » des grands quotidiens durant des décennies, et qui gère le rituel quotidien du 20 heures de TF1, n'a plus de sens. On compte désormais en millions de morts et en milliers de kilomètres?On entre dans la catégorie de la catastrophe massive !
L'insécurité a donc brutalement changé de face. Elle découle de la gestion du monde et non plus de l'augmentation des effectifs de la Police ou de Gendarmerie. Les risques encourus par chacune et chacun d'entre nous n'ont plus de dimension individuelle, mais prennent une ampleur planétaire. Le danger n'est plus au coin de la rue mais quelque part, ailleurs, sur une planète déglinguée échappant au contrôle de ses apprentis sorciers?
La grippe aviaire va éclipser le SIDA, la famine, la soif, la pluie diluvienne, le feu, et parions-le, bientôt la neige. Elle va nous placer, face à face, avec cette mort que nous voulons de moins en moins admettre. Le sauve qui peut, comportement d'une société de moins en moins solidaire, va se révéler un aveu collectif d'impuissance face aux réalités incontournables des désastres naturels ou provoqués. On attend une déclaration solennelle de Droopy !
Mais je déblogue?
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