S’engager dans la vie publique c’est plonger pour bien des citoyen.ne.s dans les illusions surtout s’ils .elles n’ont jamais exercé un mandat dans une structure dédiée à l’action sociale. Lentement quand se dissipe le brouillard du succès les réalités des mandats électifs se découvrent peu à peu. D’ailleurs ce n’est pas le propre du niveau local puisqu’il y a des constantes similaires au plan national.
L’ambition de détenir une parcelle de pouvoir au service de l’intérêt général fond parfois lentement quand elle se heurte au fonctionnement des institutions de la démocratie réputée représentative. Il existe depuis trois décennies une imprégnation des esprits sur les capacités d’action confiées aux élus. Une vision idyllique de la décentralisation mitterrandienne traîne dans l’opinion dominante.
Elle conduit souvent bien des électrices et des électeurs à croire que leurs élus de tous niveaux pourraient résoudre tous les problèmes qu’ils rencontrent. S’ils ne le font pas d’ailleurs c’est parce qu’ils ne le veulent pas ou, avec une louche de populisme car il réserverait les bénéfices de leur action aux autres et notamment aux étrangers. Impossible désormais de persuader les débouté.e.s du « coup de pouce » que les vrais pouvoirs de celle ou celui qu’ils ont élu n’existent qu’à la marge.
Un emploi, un logement, un soutien financier, une dérogation de n’importe quel ordre appartiendraient à leur fonction. Et lorsqu’ils rappellent des règles, des principes, des contraintes, leur crédibilité en prend un bon coup. Le sentiment d’impuissance commence à naître. « Toi qui est au conseil municipal, tu peux pas demander qu’on accélère mon permis de construire ? » ; « Ma fille n’a pas de boulot tu peux pas la faire embaucher dans les écoles ? » ; « Ma belle-mère perd la tête, il faut que tu lui trouves une place à la maison de retraite ? ». la liste serait longue !
L’élu.e doit mériter la confiance qu’on lui aurait accordée. Dans le fond s’il n’en a pas conscience ce style de demandes lui rappelle qu’il.elle n’est dans le fond qu’un « produit » devant être rentable. Et c’est une généralité politique applicable à tous.te.s les strates électives. Seulement le contexte a beaucoup changé et les contrôles officiels, les contraintes financières, les exigences réglementaires font que les réponses apportées ne sont pas à la hauteur des l’insistance des demandes.
Dans les conseils ou les assemblées les marges de manœuvre pour exister sont mineurs voire faibles. Le système devient tellement verrouillé que plus personne n’y trouve vraiment son compte. Les communes sont été amputées d’une bonne part de leurs compétences ce qui frustre la grande majorité des conseiller;e.s qui n’ont pas le label « communautaire ».
La presse quand elle assiste aux réunions leur apprenant des décisions auxquelles ils ne sont pas associés. Cette dichotomie s’accentue et l’inutilité de leur fonction non exécutive est vite ressentie par les arrivant.e.s qui finissent par protester contre le manque d’information et leur non association à des décisions prises ailleurs.
Les départements viennent d’être privés de leur marge de manœuvre fiscale et donc du pouvoir réel de gérer librement leur destin financier. Les élu.e.s n’auront plus qu’à assurer sur des recettes contraintes des dépenses obligatoires en augmentation. Il est à craindre qu’à l’avenir ils soient purement et simplement les gestionnaires d’un vaste CDAS (conseil départemental d’action sociale).
On dit même que la future loi des 4 D (déconcentration, différenciation, décomplexification et décentralisation) va à petits pas conforter ce rôle passionnant dans lequel lA dimension des choix politiques n’existeraient qu’à la marge.
Au Parlement on y arrive avec l’envie de changer ce système que les prédécesseurs ont tellement abîmés que l’on ne comprend pas que l’on ne peut en fait ne rien faire. Le « groupe » décide avec les ténors qui prennent la lumière et font adopter de gré ou de force les projets, les réformes, les lois circonstancielles souhaitées par le Président et contrôlées par Bercy. La lutte entre sa conscience et les consignes, la fronde ou la soumission, le rythme à suivre ou à refuser… le contexte n’a rien à voir avec ce que l’électorat croît.
De plus en plus les contraintes professionnelles prennent le pas dans la vie quotidienne et si elles pèsent trop un choix s’impose. La pression négative dans une fonction élective qui vous déçoit aide à revenir sur son engagement. La santé constitue un facteur important dans les défections. La famille aussi (on ne peut tenir que si la fonction est partagée moralement par l’entourage) constitue un paramètre décisif.
C’est ainsi que dans ce contexte, un médecin brillamment élue maire de la seconde ville de France, à Marseille, préfère se retirer après quelques mois d’exercice du pouvoir. Un signe fort pour moi du malaise qui s’installe dans la période de crise tous azimuts.
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Lorsqu’on consulte les textes officiels du rôle du maire, on constate qu’il est avant tout un gestionnaire de sa commune et pas la » NOUNOU » de ses administrés.
Or ce rôle a été depuis longtemps dévoyé par des personnages peu recommandables (v. Dassault et sa distribution de billets de 500
En effet, Marseille est un bel exemple de ce que tu avances… !
Eh oui, plus que jamais, dans notre pays, la démocratie est au moins à refonder. À la réflexion, je pense plutôt qu’elle reste à inventer…
Le problème c’est le clientèlisme. Beaucoup trop d’élus fonctionnent avec des petits services et s’asseoient sur l’intérêt général qui est pour eux un gros mot… Pas de projet pour l’avenir de leur collectivité… Rien que des miettes données aux uns et aux autres pour garder le pouvoir local. Les exemples foisonnent malheureusement.